Décompositions à la Steinberg sur une catégorie additive
aa r X i v : . [ m a t h . R T ] S e p Décompositions à la Steinberg sur une catégorieadditive
Aurélien Djament ∗ , Antoine Touzé † et Christine Vespa ‡
12 septembre 2019
Résumé
Nous donnons une description des foncteurs simples à valeurs de di-mension finie allant d’une petite catégorie additive dans la catégorie desespaces vectoriels sur un corps. Cette description est analogue à des théo-rèmes de décomposition tensorielle de Steinberg en théorie des représen-tations des groupes. Nos résultats reposent sur la notion de foncteur po-lynomial introduite par Eilenberg et Mac Lane. Nous en donnons desapplications aux représentations des groupes linéaires ou aux propriétésde finitude des catégories de foncteurs.
Abstract
We give a description of simple functors taking finitely generated val-ues, from a small additive category to the category of vector spaces overa field. This description is analogous to Steinberg’s tensor product the-orems in group representation theory. Our results rest on the notionof polynomial functor introduced by Eilenberg and Mac Lane. We giveapplications to representations of general linear groups or to finitenessproperties of functor categories.
Mots-clefs : représentations et foncteurs polynomiaux, représentations et fonc-teurs simples, catégories additives, décomposition tensorielle, présentation finie.
Classification MSC 2010 :
Introduction
Les théorèmes de décomposition tensorielle sont une pierre angulaire de lathéorie des représentations des groupes. Un premier exemple est donné par unthéorème de Steinberg [56] sur les représentations de dimension finie de SL n ( Z ) . ∗ CNRS, laboratoire Paul Painlevé (UMR8524), Université de Lille, Cité scientifique, bât.M2, 59655 VILLENEUVE D’ASCQ CEDEX, FRANCE, [email protected]. † Université de Lille, laboratoire Paul Painlevé (UMR8524), Cité scientifique, bât. M2, 59655VILLENEUVE D’ASCQ CEDEX, FRANCE, [email protected]. ‡ Université de Strasbourg, IRMA (UMR7501), 7, rue René Descartes, 67084 Strasbourgcedex, France, [email protected]. M de dimension finie est simplesi et seulement si elle se décompose sous la forme : M ≃ S ⊗ T (1)où S est une représentation simple factorisant par un groupe fini SL n ( Z /m Z ) et T est une représentation polynomiale simple. Une telle décomposition tensorielleest alors unique. Des cas particuliers de cette décomposition tensorielle avaientété obtenus préalablement par Bass-Milnor-Serre [4] et Serre [52] ; les théorèmesde superrigidité de Margulis [43, chap. VII, § 5] donnent des résultats nettementplus généraux en ce sens, à l’aide de méthodes beaucoup plus complexes. Undeuxième exemple, également dû à Steinberg [55], concerne les groupes finisde type Lie sur un corps fini de cardinal q = p r (avec p premier) G ( F q ) (parexemple G ( F q ) = GL n ( F q ) ). Plus précisément, si k est un corps algébriquementclos contenant F q , une représentation k -linéaire M de G ( F q ) est simple si etseulement si elle se décompose comme un produit tensoriel M ≃ M [0]0 ⊗ M [1]1 ⊗ · · · ⊗ M [ r − r − (2)où les M i sont des représentations simples p -restreintes de G ( k ) , et l’exposant [ i ] indique que l’on a restreint la représentation M i le long du morphisme degroupes G ( F q ) → G ( k ) induit par le plongement F q → k , x x p i . Dans le casde SL n ( F q ) (respectivement GL n ( F q ) ) les représentations M i sont uniquementdéterminées (resp. uniquement déterminées à tensorisation par des puissancesdu déterminant près).Les catégories de foncteurs de source une petite catégorie C constituent unegénéralisation naturelle des représentations des groupes. En théorie des repré-sentations, elles apparaissent par exemple dans l’étude des représentations in-décomposables des algèbres de dimension finie, comme dans les travaux d’Aus-lander [2, 3] ou de Gabriel [28], ou dans l’étude des propriétés de pureté pourles modules sur des anneaux généraux [37]. En topologie algébrique, elles sontnotamment reliées aux modules sur l’algèbre de Steenrod [31, 38, 39, 40], àl’homologie de Hochschild topologique (THH) [48] ou à l’homologie stable desgroupes [23, 5, 17, 15].Dans cet article, nous obtenons des analogues des décompositions de Stein-berg (1) et (2) pour les catégories de foncteurs d’une petite catégorie additive A vers les espaces vectoriels sur un corps k . Nous noterons dans la suite F ( A ; k ) cette catégorie de foncteurs et F df ( A ; k ) sa sous-catégorie pleine des foncteursprenant des valeurs de dimension finie. Dans un souci de simplicité, bien quecertains de nos résultats soient valables dans un cadre plus vaste, on supposedans toute cette introduction que k est un corps commutatif algébri-quement clos et A une petite catégorie additive . On renvoie le lecteur aucorps du texte pour les énoncés les plus généraux.Nos résultats reposent sur la notion de foncteur polynomial introduite ini-tialement par Eilenberg et Mac Lane [20] à des fins de topologie algébrique. Lesfoncteurs polynomiaux constituent une généralisation naturelle des foncteursadditifs (les foncteurs polynomiaux de degré sont, à un terme constant près,les foncteurs additifs). Nous renvoyons le lecteur à la section 1.4 pour plus dedétails sur cette notion classique qui intervient par exemple dans les différentesparties de la topologie algébrique mentionnées ci-dessus.2a notion d’ idéal d’une petite catégorie additive A (voir début de la section3.1) étend celle pour un anneau A . Nous introduisons la notion d’ idéal k -cotrivial de A dans la définition 3.1. C’est un analogue catégorique de la condition qu’unanneau quotient A/I est fini et de caractéristique inversible dans k . Notre pre-mier théorème principal est l’analogue fonctoriel de la décomposition tensorielle(1). Dans ce théorème (et dans tout l’article) le produit tensoriel de deux fonc-teurs est défini terme à terme : ( F ⊗ G )( a ) = F ( a ) ⊗ G ( a ) et pris sur k . Théorème 1 (Corollaire 3.7) . Un foncteur F de F df ( A ; k ) est simple si etseulement s’il est isomorphe à un produit tensoriel F ≃ S ⊗ T, où S est un foncteur simple factorisant par une catégorie quotient A / I pourun idéal k -cotrivial I , et T est un foncteur simple polynomial de F df ( A ; k ) . Deplus, S et T sont uniquement déterminés, à isomorphisme près. Un cas intéressant d’application du théorème 1 est celui où la catégorie A ne possède pas d’idéal k -cotrivial autre que A elle-même. Par exemple, lorsque A est F p -linéaire et que k contient F p . Dans ce cas, le théorème 1 affirme quetous les simples de F df ( A , k ) sont polynomiaux.Bien que la décomposition tensorielle (1) et le théorème 1 soient formelle-ment similaires, les relations entre ces deux énoncés ne sont pas complètementcomprises (voir les remarques 3.8 et A.7 pour plus de détails).Nous passons maintenant à un analogue fonctoriel de la décomposition ten-sorielle (2). Il est bien connu que les représentations polynomiales simples desgroupes GL n ( k ) s’obtiennent par des constructions fonctorielles, c’est-à-direqu’elles sont de la forme F ( k n ) où F est un endofoncteur simple des k -espacesvectoriels. Nous appelons foncteurs élémentaires les foncteurs F qui sont desquotients simples des puissances tensorielles. Nous renvoyons à la section 5 etl’appendice B pour des descriptions plus explicites, et mentionnons seulementque si k est de caractéristique nulle, les foncteurs élémentaires sont les foncteursde Schur classiques [26, Chap. 6.1]. Si E est un foncteur élémentaire et π estun foncteur additif de A vers la catégorie des k -espaces vectoriels, on note π ∗ E la restriction de E le long de π (c’est-à-dire le foncteur composé E ◦ π ). Notredeuxième théorème principal est le suivant. Théorème 2 (Théorème 7.5) . Un foncteur polynomial F de F df ( A ; k ) estsimple si et seulement s’il est isomorphe à un produit tensoriel F ≃ π ∗ E ⊗ · · · ⊗ π ∗ n E n où n ∈ N , les π i sont des foncteurs additifs simples deux à deux non isomorphesde F df ( A ; k ) et les E i sont des foncteurs élémentaires non constants. De plus,l’entier n et les classes d’isomorphisme des E i et des π i sont uniques, à permu-tation des facteurs près. Les théorèmes principaux 1 et 2 sont valables pour toutes les petites catégo-ries additives A , sans restriction. Nous illustrons nos théorèmes dans trois casparticuliers. Dans la suite, P ( A ) désigne la catégorie des A -modules projectifsde type fini sur un anneau A . 3. Si A = P ( Z ) , le foncteur π : P ( Z ) → k - Mod d’extension des scalairesest le seul foncteur additif simple. Les foncteurs simples à valeurs dedimensions finies sont donc les produits tensoriels S ⊗ π ∗ E , où S est unfoncteur simple factorisant par une catégorie P ( Z /m Z ) avec m inversibledans k , et E est un foncteur élémentaire.2. Si A = P ( F q ) et si k est un surcorps de F q , on obtient une nouvelledémonstration d’un théorème de Kuhn [39, Thm 5.23] et [41, Thm 7.11].3. Pour A = Λ - mod , la catégorie des modules de type fini sur une k -algèbre Λ de dimension finie, nos théorèmes montrent que les foncteurssimples à valeurs de dimensions finies sont les produits tensoriels de laforme π ∗ E ⊗ · · · ⊗ π ∗ n E n où les E i sont des foncteurs élémentaires etles π i : Λ - mod → k - mod sont des foncteurs additifs simples. Ces fonc-teurs additifs simples ont été décrits par Auslander [3], nos théorèmespermettent donc d’étendre cette description aux foncteurs simples nonadditifs.Nous décrivons maintenant quelques applications des théorèmes 1 et 2. Décomposition pour GL n ( A ) ( A anneau fini) Lorsque A = P ( A ) , l’évaluation sur A n d’un foncteur de F ( A ; k ) donnenaturellement une représentation de GL n ( A ) . Dans le cas d’un p -anneau fini A (c’est-à-dire un anneau fini de caractéristique une puissance de p ), où p estla caractéristique de k , nous pouvons obtenir à partir des théorèmes 1 et 2 unthéorème de décomposition tensorielle pour les groupes finis GL n ( A ) . (L’énoncédu théorème 6.9 est légèrement plus précis sur la propriété d’unicité.) Théorème 3 (Théorème 6.9) . Si k est de caractéristique p = 0 , soient A un p -anneau fini, et { S , . . . , S m } un système complet de A -modules simples. Onnote B i un facteur de composition du ( k, A ) -bimodule S i ⊗ Z k .Soit M une représentation k -linéaire de GL n ( A ) . Alors M est simple si etseulement si elle peut s’écrire comme un produit tensoriel M ≃ M [ B ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ B m ] m où les M i sont des représentations polynomiales simples p -restreintes des groupes GL nd i ( k ) , où d i = dim S i et l’exposant [ B i ] signifie que l’on restreint la repré-sentation M i le long du morphisme de groupes GL n ( A ) → GL nd i ( k ) induit parle morphisme A → M d i ( k ) correspondant au bimodule B i . De plus, les M i sontuniquement déterminés à tensorisation par une puissance du déterminant près. Lorsque A = F q , le théorème 3 redonne la décomposition tensorielle deSteinberg (2). Les méthodes de notre article donnent donc une nouvelle dé-monstration de ce résultat fondamental. Dans le cas où A n’est pas un corps, lethéorème 3 semble nouveau et suggère que certains résultats bien connus pourles groupes classiques sur un corps pourraient se généraliser au cas d’un anneaufini. Il serait intéressant de savoir s’il existe des variantes du théorème 3 pourles groupes orthogonaux et symplectiques.4 écomposition pour des représentations EML-polynomiales sur unanneau commutatif On suppose maintenant que A est un anneau commutatif, éventuellementinfini. Pour obtenir des décompositions tensorielles d’une représentation V de G ( A ) , où G désigne un monoïde multiplicatif M n , ou son sous-groupe GL n ou SL n , nous avons besoin d’hypothèses de régularité sur le morphisme d’action ρ : G ( A ) → End k ( V ) . Nous introduisons la notion de représentation polynomialeà la Eilenberg Mac Lane , ou plus brièvement représentation EML-polynomiale ,dans la définition 7.13. C’est une version affaiblie de la notion classique de re-présentation polynomiale [29], dans laquelle on demande que ρ soit une fonctionpolynomiale à la Eilenberg-Mac Lane (par opposition à un polynôme). Les deuxpropriétés suivantes donnent un grand nombre d’exemples.1. Toute représentation polynomiale de GL n ( k ) au sens classique [29] estEML-polynomiale.2. La notion de représentation EML-polynomiale est stable par produit ten-soriel et par restriction le long des morphismes d’anneaux.Si M est une représentation de G ( k ) , on note M [ φ ] la représentation de G ( A ) obtenue par restriction de M le long du morphisme G ( A ) → G ( k ) induit par unmorphisme d’anneaux φ : A → k . Nous obtenons (cf. théorème 7.26) le théorèmede décomposition suivant. Théorème 4.
Soient A un anneau commutatif et M une représentation k -linéaire de dimension finie de SL n ( A ) . On suppose que M est EML-polynomiale.Alors M est simple si et seulement si elle peut s’écrire comme un produit ten-soriel M ≃ M [ φ ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ φ m ] m où les M i sont des représentations polynomiales (au sens classique) simples de SL n ( k ) , qui sont p -restreintes si k est de caractéristique p > , et les φ i : A → k sont des morphismes d’anneaux deux à deux distincts.De plus, les morphismes φ i et les représentations M i apparaissant dans unetelle décomposition sont uniquement déterminés. L’existence d’une décomposition de ce type est également vraie (et établiedans l’article) en remplaçant SL n par M n ou GL n . En revanche, l’unicité n’estgénéralement plus exacte pour GL n sous la forme précédente, ni même souscelle donnée par le théorème 3 pour un anneau fini, c’est pourquoi nous noussommes concentrés sur le cas de SL n .Tout comme pour le théorème 3, il serait intéressant de savoir s’il existe desversions du théorème 4 pour d’autres groupes classiques.Notons que même lorsque A = k , il existe des représentations k -linéairessimples de GL n ( A ) qui ne sont pas EML-polynomiales (par exemple une repré-sentation fournie par un caractère ψ : GL n ( A ) → k × bien choisi, voir l’exempleA.2). Pour de telles représentations, on ne peut pas espérer de décompositionde Steinberg comme dans le théorème 4, l’hypothèse de régularité sur les repré-sentations n’est donc pas superflue. Représentations EML-polynomiales et arithmétique
La notion de polynomialité à la Eilenberg-Mac Lane utilisée dans la définition7.13 ne fait intervenir que la structure additive des anneaux de matrices M n ( A ) ,5andis que la notion de représentation concerne leur structure multiplicative . Lapolynomialité à la Eilenberg-Mac Lane constitue donc une forme de propriété arithmétique .Le résultat arithmétique suivant fournit une illustration de cette observation.Nous l’obtenons comme conséquence du théorème 4 ou plutôt de l’analogue pourles représentations des monoïdes multiplicatifs M n ( A ) . Nous n’en connaissonspas de démonstration directe. Proposition 5 (Proposition 7.28) . Soient A un anneau commutatif et K uncorps commutatif. Soit ϕ : A → K une fonction EML-polynomiale de degré d > , et multiplicative au sens où ϕ ( xy ) = ϕ ( x ) ϕ ( y ) pour tous x , y ∈ A . Alorsil existe une extension finie de corps commutatifs K ⊂ L de degré au plus d ! etdes morphismes d’anneaux f i : A → L , pour ≤ i ≤ d , tels que ∀ x ∈ A ϕ ( x ) = d Y i =1 f i ( x ) . De plus, les morphismes f i sont uniques à l’ordre des facteurs près (et à agran-dissement du corps L près). On obtient en fait un résultat d’unicité un peu plus précis — voir la re-marque 7.29.
Application aux propriétés de finitude des catégories de foncteurs
Nous appliquons également nos théorèmes principaux à l’étude de proprié-tés de finitude des catégories F ( A ; k ) (dans cette partie, le corps k peut êtrequelconque). Ces propriétés sont banales lorsque cette catégorie est localementnoethérienne, mais elles valent sous des hypothèses bien plus faibles et faciles àvérifier. On rappelle qu’une catégorie abélienne est localement noethérienne sielle possède un ensemble de générateurs noethériens, et qu’un objet est dit fini s’il est à la fois noethérien et artinien. Théorème 6 (Théorème 8.7) . Si, pour tout idéal k -cotrivial I de A , les catégo-ries F ( A / I ; k ) et F (( A / I ) op ; k ) sont localement noethériennes, alors la classedes foncteurs finis de F df ( A ; k ) est stable par produit tensoriel. L’hypothèse de ce théorème est en particulier vérifiée pour A = P ( A ) , où A est un anneau quelconque (y compris non noethérien).Notre section 8 s’intéresse ensuite à la propriété de présentation finie pour lesfoncteurs finis, et plus généralement à la propriété pf ∞ d’existence d’une réso-lution projective dont tous les termes sont de type fini. Rappelons qu’un lemmeclassique et important de L. Schwartz (cf. par exemple [24, proposition 10.1])stipule que, si F est un corps fini, tout foncteur fini de F ( P ( F ); F ) possède lapropriété pf ∞ . La démonstration, élémentaire, est indépendante des profondsrésultats de noethérianité de Putman-Sam-Snowden [50, 51] (bien postérieurs) ;elle nécessite toutefois de façon cruciale la finitude de F . Le lemme de Schwartz ades implications importantes sur la comparaison cohomologique de la catégorie F ( P ( F ); F ) et de sa sous-catégorie pleine de foncteurs analytiques, étroitementliée à la topologie algébrique via les modules instables sur l’algèbre de Steenroden vertu de [31]. Notre théorème 8.9 fournit une vaste généralisation du lemme6e Schwartz, y compris dans des catégories de foncteurs non localement noethé-riennes (si l’on s’intéresse seulement à la présentation finie, on peut affaiblir leshypothèses — cf. théorème 8.8). Afin d’éviter toute condition technique, nousnous contenterons ici de donner un cas particulier du théorème 8.9. Théorème 7.
Soit A un anneau commutatif de type fini. Tout foncteur fini de F df ( P ( A ); k ) possède la propriété pf ∞ dans F ( P ( A ); k ) . Ce résultat ne découle pas de propriétés formelles générales car la catégorie F ( P ( A ); k ) n’est localement noethérienne que si A est fini (proposition 8.17). Enrevanche, on montre que sa sous-catégorie F df ( P ( A ); k ) est localement finie, sansaucune hypothèse sur l’anneau A , dès lors que le corps k est de caractéristiquenulle (proposition 8.33). Foncteurs simples ne prenant pas des valeurs de dimension finie
Les théorèmes 1 et 2 concernent les foncteurs simples prenant des valeurs dedimension finie. Sous de fortes hypothèses de finitude sur A , tous les foncteurssimples de F ( A ; k ) appartiennent à F df ( A ; k ) , mais c’est loin d’être le cas engénéral. Nous discutons quelques aspects de cette question dans l’appendice A.Dans la section A.1, nous donnons des exemples explicites de foncteurssimples de F ( P ( L ); k ) (pour L un corps commutatif infini) prenant une seulevaleur non nulle de dimension finie.Il semble en général hors de portée de décrire les foncteurs simples ne prenantaucune valeur de dimension finie non nulle. Nous constatons toutefois, dans lasection A.2, qu’il en existe dans un cadre général, par exemple dans F ( P ( A ); k ) ,où A est un anneau commutatif de caractéristique nulle.Dans un souci de simplicité, nous avons fait le choix dans cet article de for-muler nos résultats pour des foncteurs simples prenant des valeurs de dimensionsfinies. Notons néanmoins que cette propriété est un cas particulier de la notionplus générale et intrinsèque d’ endofinitude dans les catégories abéliennes. Nousexpliquons ce point dans la section A.3. Remerciements.
Le premier auteur remercie Ofer Gabber pour l’entretienqu’il lui a accordé sur des questions arithmétiques reliées à ce travail, ainsi queHenning Krause pour l’avoir initié à la notion d’endofinitude.Les auteurs ont bénéficié du soutien partiel de l’Agence Nationale de laRecherche, via le projet ANR ChroK [ANR-16-CE40-0003] et le labex CEMPI[ANR-11-LABX-0007-01]. Ils ne soutiennent pas pour autant l’ANR, dont ilsrevendiquent la restitution des moyens aux laboratoires sous forme de créditsrécurrents.
Table des matières
Produits tensoriels et extension des scalaires 143 Décomposition tensorielle globale 17 F ( A, K ) pour A anneau fini 32 F ( A, K ) ( A commutatif) . . . . . . . . 427.4 Applications aux représentations polynomiales . . . . . . . . . . 437.5 Traductions arithmétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 K -cotriviaux . . . . . . . . . . 558.4 La propriété localement finie dans F ( A, K ) . . . . . . . . . . . . 598.5 Produit tensoriel de foncteurs de longueur finie . . . . . . . . . . 638.6 Présentation finie et généralisations . . . . . . . . . . . . . . . . . 64 A Foncteurs simples ne prenant pas des valeurs de dimension finie 67
A.1 Foncteurs simples prenant une valeur non nulle de dimension finie 67A.2 Foncteurs simples qui ne prennent aucune valeur de dimensionfinie non nulle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70A.3 Notion intrinsèque : endofinitude (centrale) . . . . . . . . . . . . 71A.4 Produits infinis de foncteurs simples . . . . . . . . . . . . . . . . 73
B Foncteurs élémentaires 74Conventions. Dans tout l’article, on désigne par : • A une petite catégorie additive ; • E une catégorie de Grothendieck ; • K un corps commutatif ; • K [ M ] la K -algèbre d’un monoïde (ou d’un groupe) M , de sorteque les K [ M ] -modules s’identifient aux représentations K -linéairesde M . auf mention explicite du contraire, les produits tensoriels de basenon spécifiée sont pris sur K . La plupart des catégories abéliennes considérées dans cet article seront des catégories de Grothendieck à l’instar des catégories considérées dans [27], c’est-à-dire des catégories abéliennes avec sommes arbitraires, colimites filtrantesexactes et un générateur. Le générateur assure en particulier que les sous-objetsd’un objet donné forment un ensemble. La catégorie A - Mod des modules àgauche sur un anneau A est un exemple de catégorie de Grothendieck.Un objet s de la catégorie de Grothendieck E est simple s’il est non nulet n’admet aucun sous-objet trivial. L’anneau des endomorphismes End E ( s ) est alors un corps (généralement non commutatif). Les classes d’isomorphismed’objets simples de E forment un ensemble, qu’on notera Irr( E ) . Un objet de E est dit semi-simple s’il est somme directe d’une famille d’objets simples de E . Il est dit semi-simple isotypique de type s s’il est somme directe de copiesd’un objet simple s . Les propriétés des objets semi-simples de E sont analoguesà celles des objets semi-simples dans les catégories de modules. Pour plus dedétails nous renvoyons à [9, § 4], qui traite de catégories de modules, mais dontles démonstrations valent en fait dans toute catégorie de Grothendieck.Un objet x de E est de type fini si toute famille de sous-objets de x , filtrantecroissante pour l’inclusion et de réunion x , contient x . De manière équivalente,le foncteur E ( x, − ) commute aux colimites filtrantes de monomorphismes. Unobjet de type fini non nul possède toujours un quotient simple. Dualement, unobjet x est de type cofini si toute famille de sous-objets, filtrante décroissantepour l’inclusion et d’intersection nulle, contient l’objet nul. Un objet de typecofini non nul possède toujours un sous-objet simple. Soient C et D deux catégories, avec C petite (ou essentiellement petite). Onnote Fct ( C , D ) la catégorie des foncteurs de C vers D , les morphismes étant lestransformations naturelles. On note Φ ∗ : Fct ( C ′ , D ) → Fct ( C , D ) le foncteur deprécomposition par un foncteur Φ :
C → C ′ .Si D possède des limites ou des colimites, il en est de même pour Fct ( C , D ) ,où elles se calculent au but . En particulier, si D est abélienne (resp. avec colimitesfiltrantes exactes), il en est de même pour Fct ( C , D ) . Pour une catégorie D avecsommes arbitraires, M un objet de D et E un ensemble, on note M [ E ] la sommede copies de M indexées par E . Une variation classique autour du lemme deYoneda donne une bijection : Fct ( C , D )( M [ C ( t, − )] , F ) ≃ D ( M, F ( t )) naturelle en les objets M , t et F de D , C et Fct ( C , D ) respectivement. Il enrésulte que si M est un objet générateur (resp. projectif) de D , alors les foncteurs M [ C ( t, − )] engendrent (resp. sont projectifs dans) Fct ( C , D ) lorsque t parcourt9n squelette de C . Dualement, si D possède des produits, on note M E le produitde copies de M indexées par E , et on a une bijection naturelle en M , t et F : Fct ( C , D )( F, M C ( − ,t ) ) ≃ D ( F ( t ) , M ) . En particulier, si M est un cogénérateur injectif de D , alors les foncteurs M C ( − ,t ) forment un ensemble de cogénérateurs injectifs de Fct ( C , D ) . Ces considérationsimpliquent la proposition classique suivante. Proposition 1.1. Si D est une catégorie de Grothendieck (resp. une catégorieabélienne avec assez de projectifs, resp. avec assez d’injectifs) alors Fct ( C , D ) est une catégorie de Grothendieck (resp. une catégorie abélienne avec assez deprojectifs, resp. avec assez d’injectifs). Si S est un ensemble d’objets de C , on dit que S est un support (resp. co-support ) d’un foncteur F : C → E si ce foncteur est isomorphe à un quotient(resp. sous-foncteur) d’une somme directe (resp. d’un produit) de foncteurs dutype M [ C ( s, − )] (resp. M C ( − ,s ) ) où M est un objet de E et s un élément de S .Si k est un anneau, on note F ( C ; k ) la catégorie Fct ( C , k - Mod ) . C’est unecatégorie de Grothendieck dont un générateur projectif est donné par la sommedes foncteurs P t C ( − ) = k [ C ( t, − )] , qui représentent l’évaluation en t , et qu’onappelle projectifs standard. Un foncteur est de type fini si et seulement s’il estquotient d’une somme finie de projectifs standard.Si A est un anneau, on note P ( A ) la sous-catégorie pleine de A - Mod des A -modules projectifs de type fini. La catégorie F ( P ( A ); k ) sera notée simplement F ( A, k ) ; certains de nos énoncés ne vaudront que dans ce cadre.Si k est un corps, on note F df ( C ; k ) (resp. F df ( A, k ) ) la sous-catégorie pleinede F ( C ; k ) (resp. F ( A, k ) ) des foncteurs prenant des valeurs de dimension finiesur k . La plupart de nos résultats ne traiteront que de tels foncteurs. La propriété classique suivante peut se trouver dans [7, prop. 3.4.1 et 3.4.2].Notre terminologie de foncteur réflexif s’inspire de [7, déf. 3.5.2].
Proposition et définition 1.2.
Soient C et C ′ deux catégories et F : C → C ′ un foncteur. On suppose que F possède un adjoint à gauche G et un adjoint àdroite H .Les assertions suivantes sont alors équivalentes :1. l’unité Id C ′ → F G est un isomorphisme ;2. la coünité
F H → Id C ′ est un isomorphisme.Lorsqu’elles sont vérifiées, on dira que F est réflexif . La définition suivante provient de la théorie des recollements, qui est sous-jacente à ce paragraphe et à d’autres considérations de l’article, mais nous n’au-rons explicitement besoin que de la notion de prolongement intermédiaire . Lesrecollements et prolongements intermédiaires ont d’abord été introduits dans lecadre des catégories triangulées dans [6]. Pour le contexte abélien, notammentde catégories de foncteurs, nous nous référons à [39].
1. Pour davantage de rappels sur cette notion, notamment une présentation plus concep-tuelle en termes d’extensions de Kan, on pourra par exemple consulter [16, § 2.3]. éfinition 1.3. Soient D , D ′ des catégories abéliennes et F : D → D ′ unfoncteur réflexif. On note G et H les adjoints à gauche et à droite respectivementde F . On appelle prolongement intermédiaire associé à F le foncteur D ′ → D image de la transformation naturelle G → H dont l’adjointe Id D ′ → F H estl’inverse de la coünité.Pour les propriétés élémentaires suivantes, on renvoie par exemple à [39, § 4].
Proposition 1.4.
Soient F : D → D ′ un foncteur réflexif entre catégoriesabéliennes et T : D ′ → D le prolongement intermédiaire associé.1. L’image par le foncteur F d’un objet simple de D est soit nulle, soitsimple dans D ′ .2. L’endofoncteur F T de D ′ est isomorphe à l’identité.3. Le foncteur T est pleinement fidèle. Il est additif et préserve les mono-morphismes et les épimorphismes.4. Le foncteur T envoie un objet simple de D ′ sur un objet simple de D .De plus, deux objets simples non isomorphes ont des images par T nonisomorphes. L’une des classes de prolongements intermédiaires les plus importantes dansla théorie des catégories de foncteurs est celle provenant de la proposition sui-vante, qui constitue un cas particulier de [7, proposition 3.7.3].
Proposition 1.5.
Soient C une petite catégorie et D une sous-catégorie pleinede C . Le foncteur de restriction Fct ( C , E ) → Fct ( D , E ) est réflexif. Si D est une sous-catégorie à un objet, on déduit de la proposition 1.4 : Corollaire 1.6.
Soient C une petite catégorie, t un objet de C et k un anneau.Alors le foncteur F ( C ; k ) → k [End C ( t )] - Mod d’évaluation en t envoie un objetsimple F sur un objet nul ou simple, qui a alors le même corps d’endomor-phismes que F . Dans cet article nous ne traitons que des foncteurs polynomiaux sur unepetite catégorie additive, cadre classique remontant à Eilenberg-Mac Lane [20,chapitre II]. Soit D une catégorie abélienne. Foncteurs additifs
On rappelle qu’un foncteur F : A → D est additif s’ilvérifie l’une des conditions équivalentes suivantes :1. pour tout couple ( s, t ) d’objets de A , la fonction A ( s, t ) → D ( F ( s ) , F ( t )) induite par F est additive ;2. On a F (0) = 0 et pour tout couple ( s, t ) d’objets de A le morphismecanonique F ( s ⊕ t ) → F ( s ) ⊕ F ( t ) de D est un monomorphisme ;3. pour tout couple ( s, t ) d’objets de A , le morphisme canonique F ( s ⊕ t ) → F ( s ) ⊕ F ( t ) est un isomorphisme ;4. pour tout couple ( s, t ) d’objets de A , le morphisme canonique F ( s ) ⊕ F ( t ) → F ( s ⊕ t ) est un isomorphisme.11n note Add ( A , D ) la sous-catégorie pleine de Fct ( A , D ) formée des fonc-teurs additifs. C’en est une sous-catégorie épaisse, stable par limites et colimites.On notera Add ( A ; k ) pour Add ( A , k - Mod ) , lorsque k est un anneau. La pro-priété élémentaire suivante est classique [19, 62]. Proposition 1.7.
Soient A et k deux anneaux. L’évaluation en A induit uneéquivalence de catégories Add ( P ( A ); k ) ≃ −→ ( A op ⊗ Z k ) - Mod dont un quasi-inverse est donné par la tensorisation au-dessus de A avec un ( k, A ) -bimodule. Fonctions polynomiales entre groupes abéliens
Soient V et E des groupesabéliens, f : V → E une fonction et n ∈ N ∪ {− } . La n -ème déviation de f [20,§ 8] est la fonction δ n ( f ) : V n → E définie par δ n ( f )( a , . . . , a n ) := X I ⊂{ ,...,n } ( − n −| I | f ( a I ) où | I | désigne le cardinal de l’ensemble I et a I := P i ∈ I a i . On dit que f est une fonction polynomiale de degré au plus n si la fonction δ n +1 ( f ) est identiquementnulle (ce qui implique que les déviations δ i ( f ) sont également nulles pour i ≥ n + 1 ). Les fonctions polynomiales (resp. les fonctions polynomiales de degré auplus n ) forment un sous-groupe noté P ol ( V, W ) (resp. P ol n ( V, W ) ) du groupeabélien des fonctions V → W . Pour une étude systématique de ces fonctionspolynomiales, on pourra consulter Passi [46, chap. V]. Effets croisés
Soit n un entier strictement positif. Le n -ème effet croisé estle foncteur cr n : Fct ( A , D ) → Fct ( A n , D ) défini par cr n ( F )( t , . . . , t n ) := Ker (cid:16) F (cid:16) n M i =1 t i (cid:17) → n M i =1 F (cid:16)M j = i t j (cid:17)(cid:17) (morphismes induits par les projections canoniques). Le multifoncteur en n va-riables cr n ( F ) est symétrique au sens où l’on dispose d’isomorphismes cr n ( F )( t , . . . , t n ) ≃ cr n ( F )( t σ (1) , . . . , t σ ( n ) ) pour toute permutation σ de { , . . . , n } , isomorphismesvérifiant les propriétés de naturalité appropriées. On a une décomposition na-turelle [20, théorème 9.1] : F (cid:16) n M i =1 t i (cid:17) ≃ M ≤ j < ··· 2. Nous ne suivons pas l’indexation d’Eilenberg et Mac Lane pour les déviations (et plustard, les effets croisés) : ce que nous nommons n -ème déviation (resp. effet croisé) correspondà leur ( n − -ème déviation (resp. effet croisé). Cela nous permet de nous conformer auxconventions les plus courantes pour les effets croisés. oncteurs polynomiaux Un foncteur F de Fct ( A , D ) est polynomial de de-gré au plus n s’il vérifie les conditions suivantes, qui sont équivalentes d’après[20, Théorème 9.11] :1. pour tout couple ( s, t ) d’objets de A , la fonction A ( s, t ) → D ( F ( s ) , F ( t )) induite par F est polynomiale de degré au plus n ;2. cr n +1 ( F ) = 0 .Un foncteur F est de degré n s’il est de degré au plus n et si cr n F = 0 . Exemple . Les foncteurs constants sont les foncteurs polynomiaux de degréau plus . Les foncteurs additifs sont les foncteurs polynomiaux de degré au plus et nuls sur l’objet nul.On note P ol n ( A , D ) la sous-catégorie pleine de Fct ( A , D ) dont les objetssont les foncteurs polynomiaux de degré au plus n . C’est une sous-catégorieépaisse, stable par limites et colimites. Si Φ : A → B est un foncteur additifentre catégories additives essentiellement petites, le foncteur de précomposition Φ ∗ envoie P ol n ( B , D ) dans P ol n ( A , D ) .Le rôle fondamental des fonctions additives (resp. foncteurs additifs) est misen évidence par les propositions suivantes, qui découlent de ce que la dernièredéviation (resp. le dernier effet croisé) non nul(le) d’une fonction (resp. d’unfoncteur) est additive (resp. additif) par rapport à chaque variable. Proposition 1.9. Soient U et V deux groupes abéliens. Les assertions suivantessont équivalentes.1. Le groupe abélien Ab ( U, V ) est réduit à .2. Toute fonction polynomiale de U dans V est constante. Proposition 1.10. Les assertions suivantes sont équivalentes.1. La catégorie Add ( A , D ) est réduite à .2. Tout foncteur polynomial A → D est constant.Si D = k - Mod pour un anneau k , ces assertions équivalent aussi aux suivantes :1. A ( x, y ) ⊗ Z k = 0 pour tous objets x et y de A ;2. End A ( x ) ⊗ Z k = 0 pour tout objet x de A . Effets croisés comme adjoints, et produits tensoriels Soit F red ( A n ; K ) la catégorie pleine de F ( A n ; K ) dont les objets sont les foncteurs multiréduits(c’est-à-dire les foncteurs F tels que F ( a , . . . , a n ) = 0 dès que l’un des a i estnul). Cette catégorie est reliée à F ( A ; K ) par la paire de foncteurs suivante,où cr n est le n -ème effet croisé, et ∆ ∗ est la précomposition par le foncteurdiagonale ∆ : A → A n , c’est-à-dire ∆ ∗ F ( x ) = F ( x, . . . , x ) : cr n : F ( A ; K ) ⇆ F red ( A n ; K ) : ∆ ∗ . Proposition 1.11. Le foncteur cr n est adjoint au foncteur ∆ ∗ des deux côtés.On a donc des isomorphismes naturels : F ( A ; K )(∆ ∗ F, G ) ≃ F red ( A n ; K )( F, cr n G ) , F ( A ; K )( G, ∆ ∗ F ) ≃ F red ( A n ; K )( cr n G, F ) . F , . . . , F n sont des foncteurs réduits (c’est-à-direnuls sur l’objet nul) et que F = F ⊠ · · · ⊠ F n est leur produit tensoriel externe,défini par ( F ⊠ · · · ⊠ F n )( a , . . . , a n ) = F ( a ) ⊗· · ·⊗ F n ( a n ) . Dans ce cas, ∆ ∗ F estégal au produit tensoriel des F i , défini par ( F ⊗· · ·⊗ F n )( a ) = F ( a ) ⊗· · ·⊗ F n ( a ) . Dans cette section, nous étendons aux catégories de foncteurs générales desrésultats classiques sur les représentations simples des produits tensoriels d’al-gèbres, pour lesquels on pourra se référer à [9, § 12].Dans toute la section, C et C ′ désignent deux petites catégories. On rappelleque K désigne un corps commutatif. Étant donnés un foncteur F de F ( C ; K ) et un foncteur G de F ( C ′ ; K ) on note F ⊠ G le foncteur de F ( C × C ′ ; K ) telque ( F ⊠ G )( c, c ′ ) := F ( c ) ⊗ G ( c ′ ) , les produits tensoriels étant pris commed’habitude sur K . Proposition 2.1. Soit S un objet simple de F ( C ; K ) . Les conditions suivantessont équivalentes.1. Le morphisme canonique K → End F ( C ; K ) ( S ) est un isomorphisme.2. Pour toute petite catégorie C ′ et tout couple F, G d’objets de F ( C ′ ; K ) , leproduit tensoriel par Id S induit un isomorphisme : F ( C ′ ; K )( F, G ) Id S ⊠ − −−−−→ F ( C × C ′ ; K )( S ⊠ F, S ⊠ G ) . 3. Pour toute petite catégorie C ′ et tout foncteur simple T de F ( C ′ ; K ) , leproduit tensoriel S ⊠ T est un foncteur simple de F ( C × C ′ ; K ) .4. Pour toute extension L de K , S ⊗ K L est un objet simple de F ( C ; L ) .Démonstration. (1) ⇒ (3). Via l’isomorphisme canonique de catégories F ( C ×C ′ ; K ) ≃ Fct ( C ′ , F ( C ; K )) , le foncteur S ⊠ T prend ses valeurs dans la sous-catégorie pleine S de F ( C ; K ) constituée des foncteurs semi-simples isotypiquesde type S . Comme celle-ci est stable par sous-quotients, il suffit de montrer quele foncteur qu’on obtient en voyant S ⊠ T comme objet de Fct ( C ′ , S ) est simple.Mais S est équivalente (via Hom( S, − ) ) à la catégorie des espaces vectoriels sur K , et via cette équivalence, S ⊠ T s’identifie au foncteur T de F ( C ′ ; K ) , qui estpar hypothèse simple, d’où la simplicité de S ⊠ T .(3) ⇒ (4) : soit C ′ la catégorie à un objet associée au monoïde multiplicatif L µ sous-jacent à L . La catégorie F ( C ; L ) s’identifie à la sous-catégorie pleine,qui est stable par sous-quotient (donc préserve la simplicité), de F ( C × C ′ ; K ) constituée des foncteurs sur lesquels les éléments de K à la source (vus commeflèches de C ′ ) agissent par l’homothétie correspondante au but et sur lesquelsl’action de L à la source est additive, d’où le résultat en prenant pour T le K [ L µ ] -module simple L .(4) ⇒ (1) : pour toute extension L de K , le foncteur S ⊗ K L prend na-turellement ses valeurs dans les modules à gauche libres sur l’anneau A L :=End( S ) ⊗ K L . Comme par hypothèse S ⊗ K L est simple dans F ( C ; L ) , on endéduit que tout élément non nul de A L définit un automorphisme de ce foncteur.Comme une homothétie sur un module libre non nul ne peut être inversible que14i son rapport l’est, on en déduit que A L est un corps . Supposons que End( S ) contienne strictement K et considérons un élément ξ ∈ End( S ) \ K : si ξ estalgébrique sur K , A L n’est pas un corps si l’on prend pour L un corps de rup-ture d’un polynôme irréductible sur K annulant ξ , ce qui est absurde. Si ξ esttranscendant, A K ( x ) n’est pas un corps car son élément non nul ξ ⊗ − ⊗ x n’est pas inversible. On en déduit donc End( S ) = K .L’implication (2) ⇒ (1) est évidente (prendre pour C ′ la catégorie à un seulmorphisme), et l’implication réciproque s’établit comme (1) ⇒ (3). Définition 2.2. Un foncteur simple est absolument simple lorsqu’il vérifie lesconditions équivalentes de la proposition 2.1. Proposition 2.3. 1. Si K est algébriquement clos, alors tout foncteur simplede F ( C ; K ) à valeurs de dimension finie (ou, plus généralement, prenantau moins une valeur de dimension finie non nulle) est absolument simple.2. Si pour tout objet a de C , l’ensemble C ( a, a ) est fini, et si K contienttoutes les racines de l’unité, alors tout foncteur simple de F ( C ; K ) estabsolument simple.Démonstration. Soit F un foncteur simple de F ( C ; K ) tel qu’il existe un objet t de C tel que F ( t ) soit non nul et de dimension finie. Alors End( F ) est un sous-espace vectoriel de F ( t ) , car F est un quotient de P t C (on a une flèche non nulle P t C → F et F est simple), donc est de dimension finie sur K . Par conséquent, si K est algébriquement clos, End( F ) est nécessairement réduit à K .Démontrons la deuxième assertion. Si F est simple et F ( t ) = 0 alors F ( t ) est un K [End C ( t )] -module simple qui a même corps d’endomorphismes que F ,d’après le corollaire 1.6. Il suffit donc de vérifier que si M est un monoïde fini, S un K [ M ] -module simple et K contient les racines de l’unité, alors End( S ) ≃ K .Si le monoïde M est un groupe , il s’agit d’un corollaire classique du théo-rème d’induction de Brauer (voir par exemple [13, Theorem Remarque . La première propriété tombe en défaut si l’on omet l’hypothèsedes valeurs de dimension finie. C’est déjà vrai pour des algèbres : si K est uncorps algébriquement clos et A une K -algèbre, il peut exister des A -modulessimples dont le corps des endomorphismes est strictement plus gros que K .N’importe quelle extension stricte du corps K fournit un tel A !Il nous sera parfois utile de ramener l’étude de foncteurs simples à celle defoncteurs absolument simples, vu les bonnes propriétés dont jouissent ces der-niers. On peut le faire, au prix d’une extension finie des scalaires et de dévissages,par l’intermédiaire de la propriété suivante. Proposition 2.5. Soit S un foncteur simple de F df ( C ; K ) . Il existe une exten-sion finie de corps commutatifs K ⊂ L telle que le foncteur S ⊗ K L de F ( C ; L ) possède une filtration finie dont les sous-quotients sont absolument simples.Démonstration. Comme S est à valeurs de dimension finie, le corps End( S ) estde dimension finie sur K et donc a fortiori sur son centre Z . Soit L un corpsneutralisant — cf. [9, § 15.3] — de End( S ) (sur Z ) : c’est une extension finie de Z et donc de K telle que End( S ) ⊗ Z L ≃ M n ( L ) comme L -algèbres pour uncertain entier n > . Par conséquent, S ⊗ Z L est la somme directe de n copiesd’un foncteur absolument simple de F ( C ; L ) .15uitte à remplacer L par une extension finie, on peut supposer que K ⊂ L est une extension normale. Alors S ⊗ K L possède une filtration de longueur auplus rn , où r est le degré de Z sur K , dont les sous-quotients sont absolumentsimples.La proposition 2.6 est une variante fonctorielle de [9, § 12.1, proposition 2]. Proposition 2.6. Soit F un foncteur simple de F ( C × C ′ ; K ) . On suppose qu’ilexiste un objet ( x, y ) de C × C ′ tel que F ( x, y ) soit de dimension finie non nullesur K . Alors il existe des foncteurs simples S de F ( C ; K ) et T de F ( C ′ ; K ) ,uniques à isomorphisme près, tels que F soit isomorphe à un quotient de S ⊠ T .Démonstration. Si S et T existent, alors pour tous les objets t de C et u de C ′ ,le foncteur F ( t, − ) , resp. F ( − , u ) est semi-simple isotypique de type S , resp. T .Ceci prouve l’unicité de S et T . Montrons leur existence.Notons que { ( x, y ) } est un support et un co-support de F . Il s’ensuit que { x } (resp. { y } ) est un support et un co-support de F ( − , u ) (resp. F ( t, − ) ) pourtout objet u de C ′ (resp. t de C ). Soit M un K [End C ( x )] -module simple contenudans F ( x, y ) (il en existe car F ( x, y ) est de dimension finie non nulle sur K ) :alors F ( − , y ) contient le foncteur simple S de F ( C ; K ) obtenu en appliquant à M le prolongement intermédiaire associé à la restriction de C à sa sous-catégoriepleine constituée du seul objet t (cf. propositions 1.5 et 1.4), car le foncteur deprolongement intermédiaire préserve les monomorphismes, et l’hypothèse qu’unensemble d’objets d’un foncteur en constitue un support et un co-support estéquivalente à dire que ce foncteur s’identifie au prolongement intermédiaire desa restriction à la sous-catégorie pleine déterminée par cet ensemble.Ainsi, vu comme objet de Fct ( C ′ , F ( C ; K ))( ≃ F ( C × C ′ ; K )) , F prend unevaleur contenant un objet simple S de F ( C ; K ) . La simplicité de F montrealors que toutes les valeurs de ce foncteur sont des objets semi-simples isoty-piques de type S dans F ( C ; K ) , puisque { y } constitue un support de F (vu dans Fct ( C ′ , F ( C ; K )) ). On obtient de même un simple T de F ( C ′ ; K ) tel que F ( c, − ) soit un foncteur semi-simple isotypique de type T pour tout objet c de C .Pour voir que F est un quotient de S ⊠ T , on raisonne comme au début dela démonstration de la proposition 2.1 : la sous-catégorie S de Fct ( C , K ) desfoncteurs semi-simples isotypiques de type S est équivalente à End( S ) op - Mod .Il existe donc un foncteur simple T ′ de F ( C ′ , End( S ) op ) tel que F ≃ S ⊠ End( S ) op T ′ .L’image de T ′ dans F ( C ′ ; K ) (par le foncteur de restriction des scalaires au but)contient manifestement T , de sorte qu’on dispose dans F ( C ′ ; End( S ) op ) d’unépimorphisme T ⊗ K End( S ) ։ T ′ , d’où un épimorphisme S ⊠ T ։ F . Remarque . Le résultat tombe en général en défaut si l’on omet l’hypothèsed’une valeur de dimension finie. Là encore, c’est un problème d’algèbres : soient A l’algèbre de polynômes K [ x ] et B l’algèbre de polynômes K [ t P ] , où les indéter-minées t P sont indexées par les polynômes irréductibles unitaires P de K [ X ] .On fait du corps K ( x ) un A ⊗ B -module via les morphismes de K -algèbres K [ x ] ֒ → K ( x ) (inclusion canonique) et K [ t P ] → K ( x ) envoyant t P sur /P . Cemodule est simple car le morphisme A ⊗ B → K ( x ) ainsi défini est surjectif.Mais K ( x ) ne contient aucun K [ x ] -module simple ! Corollaire 2.8. Supposons que tous les simples de F df ( C ; K ) sont absolumentsimples (voir la proposition 2.3 pour des conditions suffisantes concrètes). Alors es simples de F df ( C × C ′ ; K ) sont les bifoncteurs de la forme S ⊠ T où S et T sont des simples de F df ( C ; K ) et F df ( C ′ ; K ) respectivement. De plus, deuxsimples S ⊠ T et S ′ ⊠ T ′ sont isomorphes si et seulement si S ≃ S ′ et T ≃ T ′ . Afin de manier commodément ces notions liées à l’extension des scalaires aubut des catégories de foncteurs, nous introduisons une terminologie directementinspirée (au vu de la proposition 1.7) de la théorie classique des représentations. Définition 2.9. Nous dirons que K est un corps de décomposition (resp. corpsde décomposition non additif ) de la catégorie A si tout foncteur simple à valeursde dimension finie de Add ( A ; K ) (resp. F df ( A ; K ) ) est absolument simple.Si A est un anneau, K est un corps de décomposition de la catégorie P ( A ) si et seulement si K est un corps de décomposition ( splitting field en anglais)de la K -algèbre A op ⊗ Z K au sens usuel de la théorie des représentations (oùl’on suppose souvent cette K -algèbre de dimension finie — cf. par exemple [13,§ 7.B]), en vertu de la proposition 1.7. Exemple . 1. La proposition 2.3 montre qu’un corps commutatif algé-briquement clos est un corps de décomposition non additif d’une petitecatégorie additive arbitraire.2. Cette même proposition montre qu’un corps commutatif contenant toutesles racines de l’unité est un corps de décomposition non additif de toutepetite catégorie additive A telle que A ( a, a ) soit fini pour tout a ∈ Ob A .3. Si k est un corps fini, tout surcorps commutatif de k est un corps dedécomposition de P ( k ) . Tout corps commutatif est un corps de décom-position de P ( Z ) et de P ( Q ) . Remarque . Une grande partie des résultats de changement de base decette section s’étend (avec les mêmes démonstrations) à la situation plus intrin-sèque suivante : soient D une catégorie abélienne k -linéaire (où k est un anneaucommutatif) et A une k -algèbre. Les objets x de D munis d’une action de A (c’est-à-dire d’un morphisme de k -algèbres A → End E ( x ) ) forment une catégo-rie abélienne D L , qui est une catégorie de Grothendieck si c’est le cas de D .On dispose d’un foncteur d’extension des scalaires D → D L , qui est adjoint àgauche au foncteur d’oubli.Le lien avec la situation considérée dans cette section provient de l’observa-tion suivante. Si C (resp. A ) est une petite catégorie (resp. une petite catégorieadditive), la catégorie F ( C ; k ) L (resp. Add ( A ; k ) L ) est équivalente à F ( C ; L ) (resp. Add ( A ; L ) ), et les foncteurs d’oubli et d’extension des scalaires au sensabstrait précédent s’identifient à ceux considérés auparavant entre catégories defoncteurs. On rappelle (cf. Mitchell [44, § 3, p. 18], Street [57]) qu’un idéal I d’une petitecatégorie additive A est un sous-foncteur de Hom A : A op × A → Ab . Autre-ment dit, I consiste en la donnée de sous-groupes I ( x, y ) de A ( x, y ) stables parcomposition à droite et à gauche par des morphismes quelconques. Un tel idéal17étermine une catégorie additive A / I ayant les mêmes objets que A et dontles morphismes sont donnés par ( A / I )( x, y ) := A ( x, y ) / I ( x, y ) , la compositionétant induite par celle de A . On dispose ainsi d’un foncteur additif canoniqueplein et essentiellement surjectif (c’est l’identité sur les objets) π I : A → A / I .Réciproquement, tout foncteur additif depuis A détermine un idéal en considé-rant les noyaux des morphismes induits entre groupes abéliens de flèches. Nousnoterons parfois simplement I ⊳ A pour signifier que I est un idéal de A .La condition suivante apparaîtra de façon récurrente dans le présent article. Définition 3.1. Soit I un idéal de A . Nous dirons que I est K -cotrivial si,pour tous objets x et y de A , les conditions suivantes sont vérifiées :1. le groupe abélien A ( x, y ) / I ( x, y ) est fini ;2. le groupe abélien K ⊗ Z A ( x, y ) / I ( x, y ) est nul. Exemple . Dans un certain nombre de situations courantes, A ne possède pasd’autre idéal K -cotrivial que A . C’est notamment le cas si la catégorie additive A est linéaire sur un corps L , si L est infini ou que car( L ) = car( K ) . Exemple . Les idéaux bilatères d’un anneau A sont en bijection avec lesidéaux de la catégorie P ( A ) . La bijection envoie un idéal I sur le foncteur I. Hom P ( A ) . Elle induit une bijection entre les idéaux bilatères I de A tels que A/I est fini et K ⊗ Z A/I est nul (que nous appellerons également idéaux K -cotriviaux de A ) et les idéaux K -cotriviaux de P ( A ) .L’énoncé et la démonstration du théorème suivant s’inspirent de résultats deSteinberg [56, théorèmes 6 et 8] mentionnés dans l’introduction. On y emploiela notation suivante. Pour I ⊳ A , on désigne par ψ I : A → A / I × A le foncteur dont les composantes sont la projection canonique π I : A → A / I etl’identité A → A . Si J ⊳ A est contenu dans I , on désigne par ρ I , J le foncteurcanonique A / J × A → A / I × A (produit de la projection A / J → A / I et del’identité de A ). Théorème 3.4. 1. Soit F un foncteur de type fini et de type cofini de F df ( A ; K ) . Il existe un idéal K -cotrivial I ⊳ A et B : A / I ×A → K - Mod tels que :(a) le foncteur B est polynomial par rapport à la deuxième variable, c’est-à-dire que pour tout x , B ( x, − ) est un foncteur polynomial de F ( A ; K ) ;(b) F ≃ B ◦ ψ I .2. De plus, si I ⊳ A et J ⊳ A sont K -cotriviaux et si B : A / I × A → K - Mod et B ′ : A / J × A → K - Mod sont polynomiaux par rapport à la deuxièmevariable, alors les deux propriétés suivantes sont équivalentes :(a) B ◦ ψ I ≃ B ′ ◦ ψ J ;(b) il existe K ⊳ A , K -cotrivial, contenu dans I et J , tel que B ◦ ρ I , K ≃ B ′ ◦ ρ J , K dans F ( A / K × A ; K ) .3. Enfin, si I ⊳ A est K -cotrivial et que B : A / I × A → K - Mod estpolynomial par rapport à la deuxième variable, alors B est simple si etseulement si B ◦ ψ I est un foncteur simple de F ( A ; K ) . 18n obtient en particulier le résultat suivant, qui s’applique aux situationsde l’exemple 3.2 : Corollaire 3.5. Si A est le seul idéal K -cotrivial de A , alors tout foncteursimple de F df ( A ; K ) est polynomial.Exemple . Si k est un corps infini , tout foncteur simple de F df ( k, K ) estpolynomial. En particulier, si car( k ) = car( K ) , le foncteur constant K est le seulfoncteur simple de F df ( k, K ) , et F df ( k, K ) est réduite aux foncteurs constants.Steinberg [56, theorem p. 343] a montré que toute représentation complexede dimension finie d’un groupe SL n ( Q ) (pour n ∈ N ) est polynomiale : lapolynomialité des foncteurs simples de F df ( Q , C ) est à mettre en parallèle de cerésultat. Corollaire 3.7. Si K contient toutes les racines de l’unité, alors un objet de F df ( A ; K ) est simple si et seulement s’il est isomorphe à un produit tensoriel π ∗I ( S ) ⊗ T , où I est un idéal K -cotrivial de A , S est un simple de F df ( A / I ; K ) et T est un simple polynomial de F df ( A ; K ) .De plus, deux simples π ∗I ( S ) ⊗ T et π ∗J ( S ′ ) ⊗ T ′ sont isomorphes si et seule-ment si on a des isomorphismes T ≃ T ′ et π ∗I ( S ) ≃ π ∗J ( S ′ ) .Démonstration. D’après le corollaire 2.8, si I est K -cotrivial et K a toutes lesracines de l’unité, les simples de F df ( A / I × A ; K ) sont les bifoncteurs de laforme S ⊠ T avec S et T simples (uniquement déterminés à isomorphisme près).De plus, un tel simple est polynomial en la deuxième variable si et seulement si T est polynomial. Le résultat découle alors directement du théorème 3.4. Remarque . Lorsque A = P ( A ) , un foncteur donne par évaluation sur chaque A n une représentation de GL n ( A ) , et on peut donc penser F ( A, K ) comme unavatar des représentations K -linéaires de GL ∞ ( A ) . Avec ce point de vue, lecorollaire 3.7 pour A = P ( A ) est formellement analogue à la décompositiontensorielle de Steinberg [56] (la formule (1) de l’introduction de notre article)ou aux résultats similaires de Bass-Milnor-Serre [4]. Cependant, contrairementà ces résultats, le corollaire 3.7 ne requiert aucune hypothèse sur l’anneau A .Ceci est rapprocher de phénomènes de « stabilisation » classiques : il est plusfacile de donner une présentation du groupe GL ∞ ( A ) que des groupes GL n ( A ) , n < ∞ . Il ne semble donc pas qu’on puisse déduire directement les résultatsde [56, 4] de ceux pour F ( A, K ) ou inversement. À cet égard, la situation estdifférente de l’article [30] où Harman utilise les résultats de [4] pour obtenirdes résultats de structure sur des catégories de foncteurs dont la source sont lesgroupes abéliens, mais avec des morphismes modifiés (monomorphismes munisd’un scindement). Pour f ∈ A ( x, y ) , on note u [ f ] (la lettre u est mise pour unipotent ) l’auto-morphisme de x ⊕ y donné matriciellement par (cid:18) f (cid:19) . Le lemme suivant,immédiat, énumère les propriétés des morphismes u [ f ] dont nous aurons besoin. Lemme 3.9. Soient x , y , z des objets de A , f, f ′ ∈ A ( x, y ) et g ∈ A ( y, z ) .1. On a u [ f ] u [ f ′ ] = u [ f ′ ] u [ f ] = u [ f + f ′ ] . . On a des diagrammes commutatifs dans A : x ⊕ y x ⊕ g (cid:15) (cid:15) u [ f ] / / x ⊕ y x ⊕ g (cid:15) (cid:15) x ⊕ z u [ gf ] / / x ⊕ z , x ⊕ z u [ gf ] / / f ⊕ z (cid:15) (cid:15) x ⊕ z f ⊕ z (cid:15) (cid:15) y ⊕ z u [ g ] / / y ⊕ z . 3. Notons p ( f, g ) : x ⊕ y ⊕ z → x ⊕ z le morphisme dont les composantes x → x et z → z sont les identités, la composante y → z est g et les autrescomposantes sont nulles. Alors p ( f, g ) est un épimorphisme scindé, et lediagramme suivant commute : x ⊕ y ⊕ z p ( f,g ) / / u [ f ] ⊕ z (cid:15) (cid:15) x ⊕ z u [ gf ] (cid:15) (cid:15) x ⊕ y ⊕ z p ( f,g ) / / x ⊕ z . 4. Notons i ( f, g ) : x ⊕ y ⊕ z → x ⊕ z le morphisme dont les composantes x → x et z → z sont les identités, la composante x → y est f et les autrescomposantes sont nulles. Alors i ( f, g ) est un monomorphisme scindé, etle diagramme suivant commute : x ⊕ z i ( f,g ) / / u [ gf ] (cid:15) (cid:15) x ⊕ y ⊕ z x ⊕ u [ g ] (cid:15) (cid:15) x ⊕ z i ( f,g ) / / x ⊕ y ⊕ z . Le lemme suivant est la clé de la démonstration du théorème 3.4. Lemme 3.10. Soit F un objet de F df ( A ; K ) . On suppose que F est de type finiou de type cofini. Alors il existe un idéal K -cotrivial I de A tel que, pour tousobjets x et y de A , la fonction A ( x, y ) → Hom K ( F ( x ) , F ( y )) qu’induit F soit la composée de l’application linéaire canonique π I ( x, y ) : A ( x, y ) → ( A ( x, y ) / I ( x, y )) × A ( x, y ) et d’une fonction ( A ( x, y ) / I ( x, y )) × A ( x, y ) → Hom K ( F ( x ) , F ( y )) polynomialepar rapport à la deuxième variable.De plus, cette factorisation est unique et fonctorielle en x et y .Démonstration. Étant donné des objets x et y de A , notons I ( x, y ) l’ensembledes morphismes f de A ( x, y ) tels que l’automorphisme F ( u [ f ] ⊕ t ) de F ( x ⊕ y ⊕ t )soit unipotent pour tout objet t de A .Comme le produit de deux automorphismes unipotents permutables est uni-potent, le lemme 3.9.1 montre que I ( x, y ) est un sous-groupe de A ( x, y ) .20oient f ∈ I ( x, y ) et g ∈ A ( y, z ) , montrons que gf ∈ I ( x, z ) . Soit t un objetde A . En utilisant le lemme 3.9.3, on obtient un diagramme commutatif F ( x ⊕ y ⊕ z ⊕ t ) F ( p ( f,g ) ⊕ t ) / / F ( u [ f ] ⊕ z ⊕ t ) (cid:15) (cid:15) F ( x ⊕ z ⊕ t ) F ( u [ gf ] ⊕ t ) (cid:15) (cid:15) F ( x ⊕ y ⊕ z ⊕ t ) F ( p ( f,g ) ⊕ t ) / / F ( x ⊕ z ⊕ t ) (3)dans lequel F ( p ( f, g ) ⊕ t ) est un épimorphisme. Comme F ( u [ f ] ⊕ z ⊕ t ) estunipotent puisque f appartient à I ( x, y ) , on en déduit que F ( u [ gf ] ⊕ t ) estégalement unipotent. On a donc bien gf ∈ I ( x, z ) .On établit de façon analogue, à partir du lemme 3.9.4, que, pour f ∈ A ( x, y ) et g ∈ I ( y, z ) , on a gf ∈ I ( x, z ) .Par conséquent, I est un idéal de A .Comme F est supposé de type fini ou de type cofini, il existe un objet s de A qui en constitue un support ou un co-support. Pour un tel s , un morphisme f ∈ A ( x, y ) appartient à I ( x, y ) dès que F ( u [ f ] ⊕ s ) est unipotent. Montronsce fait lorsque, par exemple, s est un support de F (l’autre cas se traite demanière analogue). Cette hypothèse implique que s est également un support de τ a ( F ) := F ◦ ( a ⊕− ) pour tout objet a de A (cela résulte de l’effet du foncteur detranslation τ a sur les foncteurs projectifs P b A ). Par conséquent, pour tout objet t de A , le morphisme ξ : F ( x ⊕ y ⊕ s ) ⊕A ( s,t ) → F ( x ⊕ y ⊕ t ) dont la composanteindexée par un morphisme α ∈ A ( s, t ) est F ( x ⊕ y ⊕ α ) : F ( x ⊕ y ⊕ s ) → F ( x ⊕ y ⊕ t ) est un épimorphisme. Le diagramme commutatif F ( x ⊕ y ⊕ s ) ⊕A ( s,t ) ξ / / F ( u [ f ] ⊕ s ) ⊕A ( s,t ) (cid:15) (cid:15) F ( x ⊕ y ⊕ t ) F ( u [ f ] ⊕ t ) (cid:15) (cid:15) F ( x ⊕ y ⊕ s ) ⊕A ( s,t ) ξ / / F ( x ⊕ y ⊕ t ) montre donc que F ( u [ f ] ⊕ t ) est unipotent si c’est le cas de F ( u [ f ] ⊕ s ) , de sorteque f ∈ I ( x, y ) si F ( u [ f ] ⊕ s ) est unipotent.Soit ¯ K une clôture algébrique de K . Par ailleurs, pour tous objets x et y de A , notons d ( x, y ) := dim K F ( x ⊕ y ⊕ s ) . On dispose d’un morphismede groupes A ( x, y ) → ( ¯ K × ) d ( x,y ) obtenu en trigonalisant simultanément lesautomorphismes permutables ¯ K ⊗ K F ( u [ f ] ⊕ s ) (pour f ∈ A ( x, y ) ) de ¯ K ⊗ K F ( x ⊕ y ⊕ s ) , les composantes A ( x, y ) → ¯ K × du morphisme étant les différentscoefficients diagonaux des matrices ainsi obtenues.Le noyau de ce morphisme est exactement I ( x, y ) d’après ce qu’on vient demontrer sur s , de sorte qu’il induit un monomorphisme de groupes φ x,y = ( φ x,y , . . . , φ d ( x,y ) x,y ) : A ( x, y ) / I ( x, y ) → ( ¯ K × ) d ( x,y ) . Soient f ∈ A ( x, y ) et g ∈ A ( y, z ) des morphismes de A . Si g est un épimor-21hisme scindé, alors le lemme 3.9.2 procure un diagramme commutatif F ( x ⊕ y ⊕ s ) F ( x ⊕ g ⊕ s ) (cid:15) (cid:15) F ( u [ f ] ⊕ s ) / / F ( x ⊕ y ⊕ s ) F ( x ⊕ g ⊕ s ) (cid:15) (cid:15) F ( x ⊕ z ⊕ s ) F ( u [ gf ] ⊕ s ) / / F ( x ⊕ z ⊕ s ) où F ( x ⊕ g ⊕ s ) est un épimorphisme, ce qui implique l’existence d’une fonctioninjective σ : { , . . . , d ( x, z ) } → { , . . . , d ( x, y ) } telle que φ ix,z ( gf ) = φ σ ( i ) x,y ( f ) pour tout i ∈ { , . . . , d ( x, z ) } . De même, si f est un monomorphisme scindé, lelemme 3.9.2 implique l’existence d’une fonction injective τ : { , . . . , d ( x, z ) } →{ , . . . , d ( y, z ) } telle que φ ix,z ( gf ) = φ σ ( i ) y,z ( g ) pour tout i ∈ { , . . . , d ( x, z ) } .Comme tout morphisme f de A ( x, y ) se factorise en x α −→ x ⊕ y Id −→ x ⊕ y β −→ y où α a pour composantes l’identité x → x et f : x → y , et est donc un mono-morphisme scindé, et β est la projection canonique, qui est un épimorphismescindé, on en déduit (en appliquant ce qui précède à la composée β ◦ Id puis à β ◦ α ) que l’image de φ x,y est finie , de cardinal majoré par le nombre de fonctionsinjectives de { , . . . , d ( x, y ) } vers { , . . . , d ( x ⊕ y, x ⊕ y ) } . A ( x, y ) / I ( x, y ) est donc isomorphe à un sous-groupe fini d’un produit decopies de ¯ K × , ce qui implique la nullité de K ⊗ A ( x, y ) / I ( x, y ) . Ainsi, l’idéal I de A est K -cotrivial.Pour f ∈ A ( x, y ) et t ∈ Ob A , considérons la décomposition de Jordan mul-tiplicative de F ( u [ f ] ⊕ t ) en produit permutable d’un automorphisme unipotent U ( f ) et d’un automorphisme absolument semi-simple D ( f ) . (Une telle décom-position existe toujours, car les valeurs propres de F ( u [ f ] ⊕ t ) sont des racinesde l’unité grâce à ce qui précède, elles sont donc séparables — cf. [10, chap. 7,§ 5.9, th. 1 et prop. 17].) Comme les u [ f ] sont deux à deux permutables, U et D définissent des morphismes de groupes A ( x, y ) → Aut K ( F ( x ⊕ y ⊕ t )) dontles images commutent ; de plus, le noyau de D contient I ( x, y ) , de sorte que cesmorphismes induisent un morphisme de groupes ( A ( x, y ) / I ( x, y )) × A ( x, y ) → Aut K ( F ( x ⊕ y ⊕ t )) . De plus, le morphisme U : A ( x, y ) → Aut K ( F ( x ⊕ y ⊕ t )) est à valeurs dans les matrices triangulaires supérieures strictes pour un choixconvenable de base, ce qui implique qu’il est polynomial, de degré strictementinférieur à dim K F ( x ⊕ y ⊕ t ) . En prenant t = 0 et en écrivant tout morphisme f ∈ A ( x, y ) comme la composée de l’inclusion canonique x → x ⊕ x ⊕ y suiviede u [ f ] puis de la projection canonique x ⊕ y ։ y et en appliquant le foncteur F , on obtient l’existence de la factorisation recherchée. Son unicité découle dulemme 3.11 ci-après.La fonctorialité en y de la décomposition obtenue se montre à partir dudiagramme (3) (avec t = 0 ), en appliquant la décomposition de Jordan auxflèches verticales. La fonctorialité en x s’établit de façon analogue. Lemme 3.11. Soient E un K -espace vectoriel, V un groupe abélien et U unsous-groupe de V tel quel K ⊗ Z V /U = 0 . Alors la restriction de la fonction E V/U × V → E V induite par l’application linéaire canonique V → V /U × V (dontles composantes sont la projection et l’identité) à l’espace vectoriel des fonctions /U × V → E qui sont polynomiales par rapport à la deuxième variable estinjective.Démonstration. Montrons d’abord que la restriction de V à U définit une appli-cation linéaire injective P ol ( V, E ) → P ol ( U, E ) . Supposons en effet qu’il existeune fonction polynomiale non nulle f : V → E dont la restriction à U soitnulle ; soit n ≥ le degré de f . Alors la n -déviation δ n ( f ) : V n → E estune fonction additive par rapport à chacune des n variables et non identique-ment nulle. On voit par récurrence descendante sur l’entier r ∈ { , . . . , n } que δ n ( f )( a , . . . , a n ) = 0 si au moins r des éléments a , . . . , a n de V appartiennentà U : pour r = n cela résulte de la nullité de f sur U , et le pas de la récurrences’obtient en utilisant que toute fonction additive V /U → E est nulle, en raisonde la nullité de K ⊗ Z V /U . Pour r = 0 , on voit que δ n ( f ) est identiquementnulle, contradiction qui établit l’injectivité souhaitée.Considérons maintenant une fonction f : V /U × V → E polynomiale parrapport à la deuxième variable et telle que f (¯ x, x ) = 0 pour tout x ∈ V , où ¯ x désigne la classe de x modulo U . Pour tout x ∈ V , la fonction V → E t f (¯ x, x + t ) est polynomiale et nulle sur U , elle est donc identiquement nulled’après ce qui précède, d’où le lemme. Lemme 3.12. Soit I ⊳ A tel que K ⊗ Z ( A ( x, y ) / I ( x, y )) = 0 pour tous objets x et y de A .1. Si X est un foncteur de F ( A / I × A ; K ) polynomial par rapport à ladeuxième variable, alors tout sous-foncteur de ψ ∗I ( X ) est isomorphe à ψ ∗ I ( Y ) pour un sous-foncteur Y de X dans F ( A / I × A ; K ) .2. Soient X et Y des objets de F ( A / I × A ; K ) polynomiaux par rapport àla deuxième variable. Alors ψ I induit une bijection : F ( A / I × A ; K )( X, Y ) ≃ −→ F ( A ; K )( ψ ∗I X, ψ ∗I Y ) . Démonstration. Les deux assertions se déduisent du lemme 3.11. On note aupréalable que la sous-catégorie pleine B de A / I × A constituée des objets dutype ( a, a ) (où a est un objet de A ) est équivalente au sens de Morita à A / I ×A :l’inclusion induit une équivalence F ( A / I × A ; K ) ≃ −→ F ( B ; K ) . En effet, toutobjet de A / I × A est facteur direct d’un objet de B . On peut donc remplacer ψ I : A → A / I × A par le foncteur additif essentiellement surjectif A → B qu’ilinduit.Pour la première assertion, soit F un sous-foncteur de ψ ∗I X : pour tousobjets r et s de A , on dispose d’un diagramme commutatif ensembliste (entraits pleins) A ( a, b ) f / / j (cid:15) (cid:15) Hom K ( F ( a ) , F ( b )) α / / Hom K ( F ( a ) , ψ ∗I X ( b ))( A ( a, b ) / I ( a, b )) × A ( a, b ) g / / ❤❤❤❤❤❤❤❤❤ Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I X ( b )) β ✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐✐ où les flèches f et g sont données par la fonctorialité de F et X respectivement, α et β sont induites par les inclusions F ( b ) ⊂ ψ ∗I X ( b ) et F ( a ) ⊂ ψ ∗I X ( a ) respectivement, et j est induite par ψ I . L’existence d’une fonction ensembliste23n pointillé faisant commuter le diagramme, et naturelle en x et y , est équivalenteau fait que F est isomorphe à la précomposition par ψ I d’un sous-foncteur de X . Comme α est un monomorphisme de K -espaces vectoriels, l’existence de laflèche en pointillé équivaut à la nullité de la composée de βg et de la projectionde Hom K ( F ( a ) , ψ ∗I X ( b )) sur Coker α . Or la précomposition de cette composéeavec A ( a, b ) j −→ ( A ( a, b ) / I ( a, b )) × A ( a, b ) est nulle (grâce à la commutativité dudiagramme), de sorte que l’hypothèse faite sur X et le lemme 3.11 garantissentl’existence de la flèche en pointillé. Ce même lemme montre la naturalité en x et y des factorisations obtenues, d’où le premier point.Pour la deuxième assertion, l’injectivité résulte de l’observation d’équivalencede Morita du début et de l’essentielle surjectivité du foncteur A → B qu’induit ψ I . Pour la surjectivité, considérons une transformation naturelle ψ ∗I X → ψ ∗I Y :c’est une collection d’applications linéaires ψ ∗I X ( a ) → ψ ∗I Y ( a ) , pour a objet de A , telle que le diagramme ensembliste évident A ( a, b ) / / (cid:15) (cid:15) Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I X ( b )) (cid:15) (cid:15) Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I X ( b )) / / Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I Y ( b )) (4)commute pour tous objets a et b de A . Le fait que cette transformation naturelleappartient à l’image du morphisme F ( A / I×A ; K )( X, Y ) → F ( A ; K )( ψ ∗I X, ψ ∗I Y ) équivaut à la commutativité du diagramme évident ( A ( a, b ) / I ( a, b )) × A ( a, b ) / / (cid:15) (cid:15) Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I X ( b )) (cid:15) (cid:15) Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I X ( b )) / / Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I Y ( b )) , (5)dans lequel les deux composées ( A ( a, b ) / I ( a, b )) ×A ( a, b ) → Hom K ( ψ ∗I X ( a ) , ψ ∗I Y ( b )) sont polynomiales par rapport à la deuxième variable. Comme le diagrammecommutatif (4) s’obtient en composant (5) avec A ( a, b ) j −→ ( A ( a, b ) / I ( a, b )) ×A ( a, b ) , le lemme 3.11 implique la commutativité de (5), ce qui achève la dé-monstration. Lemme 3.13. Soient k un anneau, F un foncteur de F ( A ; k ) , S un support de F et T un co-support de F et d ∈ N . Si pour tous s ∈ S et t ∈ T , la fonction A ( s, t ) → Hom k ( F ( s ) , F ( t )) induite par F est polynomiale de degré au plus d , alors F est un foncteur poly-nomial de degré au plus d .Démonstration. Soient x et y deux objets de A . Considérons le diagrammecommutatif A ( x, y ) / / (cid:15) (cid:15) Hom k ( F ( x ) , F ( y )) (cid:15) (cid:15) Q A ( s, t ) / / Q Hom k ( F ( s ) , F ( t )) 24ù les produits sont pris sur tous les s ∈ S , t ∈ T et toutes les flèches f : s → x et g : y → t de A , les flèches horizontales sont données par l’effet de F sur lesmorphismes, et les flèches verticales sont induites par l’image inverse le long de f et l’image directe le long de g .Par hypothèse, la flèche horizontale inférieure est une fonction polynomialede degré au plus d .Les flèches verticales sont des morphismes de groupes abéliens, et celle dedroite est injective puisque S (resp. T ) est un support (resp. co-support) de F .Il en résulte que la flèche horizontale supérieure est une fonction polynomialede degré au plus d , ce qui achève la démonstration. Démonstration du théorème 3.4. Montrons l’assertion 1. L’équivalence de Mo-rita entre A / I × A et sa sous-catégorie pleine B dont les objets sont les ( x, x ) pour x ∈ Ob A , déjà observée au début de la démonstration du lemme 3.12,et le lemme 3.10 montrent que tout foncteur S de F df ( A ; K ) est isomorphe à B ◦ ψ I pour un idéal K -cotrivial I et un foncteur B de F ( A / I × A ; K ) tel que,pour tout objet t de A / I , le foncteur B ( t, − ) de F ( A ; K ) induit une fonctionpolynomiale entre les groupes abéliens de morphismes. Si S est de type fini et detype cofini, ou simple, il en est de même pour B (car ψ ∗I est fidèle et commuteà toutes les limites et colimites), qui est donc polynomial grâce au lemme 3.13.L’assertion 3 du théorème 3.4 découle de la première propriété du lemme 3.12.Pour établir l’assertion 2, on note déjà que l’intersection K de deux idéaux I et J de A (définie par K ( x, y ) = I ( x, y ) ∩J ( x, y ) ⊂ A ( x, y ) pour tous objets x et y de A ) est un idéal de A , qui est K -cotrivial si I et J le sont (en effet, pour tousobjets x et y de A , le groupe abélien A ( x, y ) / K ( x, y ) s’injecte canoniquementdans A ( x, y ) / I ( x, y ) ⊕A ( x, y ) / J ( x, y ) ). Précomposant B et B ′ par ρ I , K et ρ J , K respectivement, on se ramène au cas où I = J , dans lequel il s’agit de montrerque B et B ′ sont isomorphes lorsque B et B ′ sont deux foncteurs polynomiauxpar rapport à la deuxième variable tels que B ◦ ψ I ≃ B ′ ◦ ψ I . Cela résulte de ladeuxième propriété du lemme 3.12. Cette section contient une généralisation (directe) aux catégories additivesdes décompositions classiques des algèbres données par des familles d’idempo-tents orthogonaux [13, § 6A]. Nous obtenons en particulier la proposition 4.3,qui s’applique aux catégories A / I apparaissant dans le théorème 3.4, et permetune décomposition tensorielle plus fine des simples qui y apparaissent.Appelons idempotent de A un foncteur additif e : A → A qui est l’identitésur les objets, et tel que e = e . On note alors e A la catégorie ayant les mêmesobjets que A avec Hom e A ( a, b ) = e Hom A ( a, b ) et avec la loi de composition ( ef ) ◦ ( eg ) = e ( f ◦ g ) . Cette loi est bien définie, e A est une catégorie additive,et on a un foncteur quotient canonique π e : A → e A . Une famille localement finie d’idempotents orthogonaux de A est une familled’idempotents ( e i ) i ∈ I de A telle que :1. e i e j = 0 = e j e i si i = j ; 25. pour tous objets a, b de A , seul un nombre fini d’idempotents induisentune application non nulle e i : A ( a, b ) → A ( a, b ) ;3. P i ∈ I e i = 1 (la somme signifie la somme sur les morphismes, et l’identitésur les objets. Cette somme éventuellement infinie a un sens car elle esten fait finie à cause de la condition précédente).Soit ( A i ) i ∈ I une famille de catégories additives. La somme L i ∈ I A i est la sous-catégorie pleine de Q i ∈ I A i , dont les objets sont les familles ( x i ) i ∈ I telles quetous les x i sont nuls sauf un nombre fini d’entre eux. Lemme 4.1. Pour toute famille ( e i ) i ∈ I localement finie d’idempotents ortho-gonaux de A , le foncteur Y i ∈ I π e i : A → Y i ∈ I e i A est à valeurs dans la sous-catégorie L i ∈ I e i A , et pour toute catégorie abélienne D , il induit une équivalence de catégories : Fct M i ∈ I e i A , D ! ≃ Fct ( A , D ) . Démonstration. La deuxième condition dans la définition des familles locale-ment finies d’idempotents orthogonaux assure que pour tout objet x de A , etpour tous les i sauf un nombre fini, π e i ( x ) est nul dans e i A . Ainsi Q i ∈ I π e i està valeurs dans L i ∈ I e i A . La troisième condition assure que Q i ∈ I π e i est pleine-ment fidèle. Il induit donc une équivalence de catégories entre A et son image ∆ . L’équivalence de catégories du lemme découle alors du fait que tout objet de L i ∈ I e i A est facteur direct d’un objet de ∆ . Proposition 4.2. Soient ( e i ) i ∈ I une famille localement finie d’idempotents or-thogonaux de A , J un sous-ensemble fini de I , et pour tout j ∈ J soit S j unfoncteur non constant de F ( e j A ; K ) .1. Le foncteur N j ∈ J π ∗ e j S j est absolument simple si et seulement si les fonc-teurs S j sont absolument simples.2. Si on a un isomorphisme entre deux foncteurs absolument simples : O i ∈ J π ∗ e j S j ≃ O k ∈ K π ∗ e k T k alors J = K et pour tout j ∈ J , le foncteur S j est isomorphe à T j .Enfin, K est un corps de décomposition non additif de A si et seulement si c’estun corps de décomposition non additif de chaque catégorie e j A . Dans ce cas,tous les foncteurs simples de F df ( A ; K ) sont isomorphes à un produit tensorieldu type ci-dessus.Démonstration. Le fait que K est un corps de décomposition non additif des e j A si c’est un corps de décomposition non additif de A découle de ce que F df ( e j A ; K ) est une sous-catégorie pleine stable par sous-quotient de F df ( A ; K ) .Les autres assertions découlent du lemme précédent et des propositions 2.1et 2.6, lorsque la famille d’idempotents est finie . Le cas général s’en déduitcar tout foncteur de type fini sur une catégorie somme directe de catégoriesadditives se factorise par la projection sur la somme directe d’une sous-famillefinie. 26i V est un groupe abélien et p un nombre premier, on note ( p ) V le sous-groupe de torsion p -primaire de V . On note ( p ) A la sous-catégorie de A avec lesmêmes objets que A et dont les groupes abéliens de morphismes sont donnéspar ( ( p ) A )( x, y ) = ( p ) ( A ( x, y )) . On a un foncteur canonique (qui est l’identitésur les objets et qui envoie un morphisme sur sa composante p -primaire) : π p : A → ( p ) A . Proposition 4.3. Soit S un foncteur non constant de F ( A ; K ) . Si les groupesabéliens de morphismes A ( x, y ) sont finis pour tous objets x et y de A et que K est un corps de décomposition non additif de A , alors S est simple si etseulement s’il existe un ensemble fini P de nombres premiers, et des simplesnon constants S p de F ( ( p ) A ; K ) , pour tout p ∈ P , tels que S ≃ O p ∈ P π ∗ p S p . De plus, dans une telle décomposition tensorielle, l’ensemble P est uniquementdéterminé, et les S p sont uniquement déterminés à isomorphisme près.Démonstration. Comme les ensembles de morphismes sont finis dans A , toutfoncteur de type fini de F ( A ; K ) prend des valeurs de dimension finie. Parconséquent, le résultat découle de la proposition 4.2 et de la décompositionprimaire des groupes abéliens finis. Pour tout K [ S d ] -module M on définit E M : K - Mod → K - Mod par : E M ( V ) := Im (cid:16)(cid:0) V ⊗ d ⊗ M (cid:1) S d N −→ (cid:0) V ⊗ d ⊗ M (cid:1) S d (cid:17) . Le morphisme N apparaissant dans cette formule est la norme, qui est l’appli-cation M G → M G définie pour tout groupe fini G agissant K -linéairement sur M , et qui à un coïnvariant m associe l’invariant N ( m ) = P g ∈ G gm . L’action de S d sur le K -module V ⊗ d ⊗ M est donnée par σ ( v ⊗ · · · ⊗ v d ⊗ m ) = v σ − (1) ⊗ · · · ⊗ v σ − ( d ) ⊗ σm . Définition 5.1. Un foncteur élémentaire E est un endofoncteur de K - Mod telqu’il existe un K [ S d ] -module simple M et un isomorphisme E ≃ E M . Remarque . Les foncteurs élémentaires sont intimement reliés aux foncteursde Schur classiques. Nous n’utiliserons que la définition élémentaire donnée ci-dessus dans la section 5, et renvoyons le lecteur à l’appendice B pour des détailssur les relations avec les foncteurs de Schur et les représentations de GL n ( K ) .Le but de la section est d’établir le théorème suivant de décompositiontensorielle à la Steinberg pour les foncteurs absolument simples polynomiaux.Contrairement au théorème 3.4, il n’utilise pas d’hypothèse de dimension finiesur les foncteurs. 27 héorème 5.3. Soit S un foncteur polynomial de degré d > de F ( A ; K ) . Lesconditions suivantes sont équivalentes.(1) Le foncteur S est simple, et il existe des foncteurs additifs absolumentsimples π i tels que S soit un quotient de π ⊗ · · · ⊗ π d .(2) Le foncteur S est simple, et il existe des foncteurs additifs absolumentsimples π i tels que S soit un sous-foncteur de π ⊗ · · · ⊗ π d .(3) Il existe un entier n strictement positif, des foncteurs additifs absolumentsimples π i deux-à-deux non isomorphes, des foncteurs élémentaires E i non constants, et un isomorphisme : S ≃ π ∗ E ⊗ · · · ⊗ π ∗ n E n , De plus, si S vérifie les conditions équivalentes précédentes, les foncteurs π i et E i sont uniquement déterminés (à isomorphisme près et à une permutation desindices près), et S est absolument simple. Le corollaire 5.4 ci-dessous donne une situation où le théorème 5.3 s’appliquefacilement. Des illustrations de ce corollaire seront données dans la section 6, etune généralisation en sera donnée dans la section 7, au théorème 7.5. Corollaire 5.4. Soit A un anneau. On suppose que K est un corps de dé-composition de P ( A ) (par exemple K est algébriquement clos). Tout foncteurpolynomial simple S de F df ( A, K ) est absolument simple, et s’écrit de manièreunique (à permutation des indices près) comme produit tensoriel : S ≃ π ∗ E ⊗ · · · ⊗ π ∗ n E n , où les E i sont des foncteurs élémentaires non constants, et les π i : P ( A ) → K - Mod sont des foncteurs additifs simples à valeurs de dimensions finies, deux-à-deux non isomorphes. Réciproquement, tout produit tensoriel de ce type définitun simple polynomial de F df ( A, K ) . (Le foncteur simple constant s’obtient parle produit tensoriel vide.)Démonstration. L’énoncé est clair si S est un foncteur constant. Supposons S non constant et soit d = deg S > . Alors cr d S est additif en chaque variable, età valeurs de dimension finie. Les simples de F df ( P ( A ) × d ; K ) additifs en chaquevariable sont de la forme π ⊠ · · · ⊠ π d , où les π i sont absolument simples additifs,d’après le corollaire 2.8. En particulier, cr d S admet une filtration finie (de lon-gueur bornée par dim K cr d S ( A, . . . , A ) ) dont les sous-quotients sont de la forme π ⊠ · · · ⊠ π d . En utilisant l’adjonction diagonale-effets croisés et la simplicité de S , on obtient que S est un quotient du foncteur ∆ ∗ cr d S ( x ) = cr d S ( x, . . . , x ) ,où d est le degré de S . Ainsi S est un quotient d’un des facteurs π ⊗ · · · ⊗ π d dela filtration de ∆ ∗ cr d S . L’existence et l’unicité de la décomposition, ainsi quel’absolue simplicité de S , découlent du théorème 5.3. Nous démontrons le théorème 5.3 en une série de propositions. De manièreplus précise, l’équivalence (1) ⇔ (2) est démontrée dans la proposition 5.5, l’im-plication (1) ⇒ (3) est démontrée dans la proposition 5.11, l’implication (3) ⇒ (1)est démontrée dans la proposition 5.13. Enfin, l’unicité de la décomposition etl’absolue simplicité des simples sont démontrées dans la proposition 5.10.28 roposition 5.5 (Démonstration de (1) ⇔ (2)) . Soit S un foncteur simple de F ( A ; K ) , d ≥ . Soient π , . . . , π d des foncteurs absolument simples additifs.Alors on a équivalence entre les assertions suivantes.1. Le foncteur S est un quotient de π ⊗ · · · ⊗ π d .2. Le foncteur cr d S est un facteur direct de L σ ∈ S d π σ (1) ⊠ · · · ⊠ π σ ( d ) .3. Le foncteur S est un sous-foncteur de π ⊗ · · · ⊗ π d Démonstration. Soit B = π ⊗ · · · ⊗ π d et C = L σ ∈ S d π σ (1) ⊠ · · · ⊠ π σ ( d ) . On a C = cr d B . Montrons (1) ⇒ (2) Par exactitude des effets croisés, cr d S est quotientde cr d B = C . D’après la troisième condition de la proposition 2.1, C est semi-simple, donc S est un facteur direct de C . Montrons (2) ⇒ (1). Par adjonctionentre diagonale et effets croisés, il existe un morphisme non nul ∆ ∗ d cr d S → S .Mais ∆ ∗ d cr d S est un facteur direct de ∆ ∗ d C et ce dernier est isomorphe à unesomme directe de d ! copies de B . Il existe donc un morphisme non nul (donc unépimorphisme) B → S . La démonstration de (2) ⇔ (3) est similaire.Notons F c ( K - Mod × n ; K ) la catégorie des foncteurs F de K - Mod × n vers K - Mod , tels que pour tout ( v , . . . , v n ) , F ( v , . . . , v n ) est la colimite des sous-espaces vectoriels F ( u , . . . , u n ) où les u i sont les sous-espaces de dimension finiedes v i . Par exemple, les foncteurs élémentaires sont des objets de F c ( K - Mod ; K ) .Le lemme suivant est évident, et justifie pourquoi nous ne distinguerons pas dansla suite un foncteur élémentaire et sa restriction à la sous-catégorie P ( K ) . Lemme 5.6. Le foncteur de restriction de K - Mod × n à P ( K ) × n induit uneéquivalence de catégories : F c ( K - Mod × n ; K ) ≃ −→ F ( P ( K ) × n ; K ) dont un quasi-inverse L est donné en prolongeant les foncteurs par colimite surles sous-espaces de dimension finie. Si P = ( π , . . . , π n ) est un n -uplet de foncteurs additifs π i : A → K - Mod ,on définit un foncteur d’évaluation : ev P : F ( P ( K ) × n ; K ) → F ( A ; K ) par la formule : ev P F ( a ) := LF ( π ( a ) , . . . , π n ( a )) . Exemple . Notons T d : P ( K ) → K - Mod le foncteur de d -ème puissancetensorielle : T d ( V ) = V ⊗ d . Pour n ≥ , on pose T λ = T λ ⊠ · · · ⊠ T λ n , où λ = ( λ , . . . , λ n ) est un n -uplet d’entiers positifs. On a alors : ev P T λ = π ⊗ λ ⊗ · · · ⊗ π ⊗ λ n n . Si E M = E M ⊠ · · · ⊠ E M n où chaque M i est un K [ S λ i ] -module simple, on a : ev P E M = π ∗ E M ⊗ · · · ⊗ π ∗ n E M n . Lemme 5.8. Soient P = ( π , . . . , π n ) et R = ( ρ , . . . , ρ m ) deux uplets de fonc-teurs additifs absolument simples, dont les éléments sont deux-à-deux non iso-morphes. Soient λ = ( λ , . . . , λ n ) et µ = ( µ , . . . , µ m ) deux uplets d’entiersstrictement positifs. Soit F : P ( K ) × n → K - Mod un quotient d’une sommedirecte de copies de T λ et soit G : P ( K ) × m → K - Mod un sous-foncteur d’unproduit de copies de T µ . . Si F ( A ; K ) (ev P F, ev R G ) = 0 , alors n = m et il existe une permutation σ ∈ S n telle que pour tout i , λ i = µ σ ( i ) et π i ≃ ρ σ ( i ) .2. Si P = R et λ = µ , alors le foncteur ev P induit un isomorphisme : F ( P ( K ) × n ; K ) (cid:0) F, G (cid:1) ≃ F ( A ; K ) (cid:0) ev P F, ev P G (cid:1) . Démonstration. Pour les deux affirmations, il suffit de traiter le cas de F = T λ et G = T µ , le cas général s’en déduit par exactitude à gauche des Hom et parfidélité de ev P (ce dernier point résulte de ce que tout objet de K - Mod × n est colimite filtrante de facteurs directs d’objets dans l’image essentielle de ( π , . . . , π n ) : A → K - Mod × n , puisque les π i sont additifs et non nuls).Démontrons le premier point. Notons d = P λ i et e = P µ j . Le foncteur ev P T λ est de degré d et ev R T µ est de degré e . Par la proposition 1.11, l’existenced’un morphisme non nul ev P T λ → ev R T µ implique d = e . Pour ≤ k ≤ d , onpose π k := π i ( k ) où i ( k ) est l’unique indice tel que P j
Les foncteurs élémentaires sont absolument simples. De plus pourtout d ≥ , tout quotient simple de T d est isomorphe à un foncteur élémentaire.Démonstration. Si F est un objet de F ( K, K ) , on note cF = cr d F ( K, . . . , K ) .Le groupe S d agit sur cF en permutant les copies de K en argument de cr d F .Ceci définit un foncteur exact c : F ( K, K ) → K [ S d ] - Mod .Le foncteur c est réflexif (cf. définition 1.2). En effet, la proposition 1.11fournit des isomorphismes de K [ S d ] -modules naturels en FcF ≃ F ( K, K )( T d , F ) et ( cF ) ∗ ≃ F ( K, K )( F, T d ) , (6)30’action sur les espaces de morphismes étant induite par l’action de S d sur T d .Ainsi, c possède des adjoints à gauche et à droite donnés respectivement par M ( T d ⊗ M ) S d et M ( T d ⊗ M ) S d , de sorte qu’un calcul direct d’effets croisés montre la réflexivité de c , et le fait quele prolongement intermédiaire associé est la norme. L’absolue simplicité de E M se déduit alors de la proposition 1.4 et de l’absolue simplicité des représentationssimples des groupes symétriques [33, théorème 11.5].Si S est un quotient simple de T d , alors c ( S ) est non nul (utiliser le pre-mier isomorphisme de (6)), donc la proposition 1.4 montre également que S estisomorphe à E M pour un K [ S d ] -module simple M . Proposition 5.10 (Démonstration de l’unicité et de l’absolue simplicité) . Soient λ = ( λ , . . . , λ n ) et µ = ( µ , . . . , µ m ) deux uplets d’entiers strictement positifs.Soient P = ( π , . . . , π n ) et R = ( ρ , . . . , ρ m ) deux uplets de foncteurs additifs ab-solument simples. On suppose que les éléments de P (resp. R ) sont deux-à-deuxnon isomorphes. Soit L = ( L , . . . , L n ) un n -uplet où chaque L i est une repré-sentation simple de K [ S λ i ] , et soit M = ( M , . . . , M m ) un m -uplet où chaque M i est une représentation simple de K [ S µ i ] .1. Si F ( A ; K )(ev P E L , ev R E M ) = 0 alors n = m et il existe une permutation σ ∈ S n telle que pour tout i , λ i = µ σ ( i ) , A i ≃ B σ ( i ) , et L i ≃ M σ ( i ) .2. F ( A ; K )(ev P E M , ev P E M ) ≃ K .Démonstration. Si F ( A ; K )(ev P E L , ev R E M ) = 0 alors, d’après le lemme 5.8, λ et µ sont égaux à une permutation σ près, et π i ≃ ρ σ ( i ) . En notant M σ =( M σ (1) , . . . , M σ ( n ) ) on a alors un isomorphisme de foncteurs ev R E M ≃ ev P E M σ .Donc d’après le lemme 5.8, on a un isomorphisme : F ( A ; K )(ev P E L , ev R E M ) ≃ F ( P ( K ) × n ; K ) (cid:0) E L , E M σ (cid:1) . ( ∗ ) Puisque les deux foncteurs élémentaires E L et E M sont isomorphes si et seule-ment si L et M sont isomorphes, la non-nullité du membre de droite impliquel’existence d’isomorphismes L i ≃ M σ ( i ) . Finalement, si λ = µ , P = R et L = M ,alors σ est l’identité donc M σ = M et d’après l’absolue simplicité des E L (cf.lemme 5.9 et proposition 2.1) le membre de droite de ( ∗ ) est isomorphe à K . Proposition 5.11 (Démonstration de (1) ⇒ (3)) . Soient λ = ( λ , . . . , λ n ) un n -uplet d’entiers strictement positifs, et P = ( π , . . . , π n ) un n -uplet de foncteursadditifs absolument simples et deux à deux non isomorphes. Alors tout quotientsimple de ev P T λ est isomorphe à un foncteur de la forme ev P E M , où M =( M , . . . , M n ) est un uplet dont chaque M i est un K [ S λ i ] -module simple.Démonstration. D’après le lemme 5.5, un quotient simple S de ev P T λ est aussiun sous-foncteur de ev P T λ . Le foncteur S est donc l’image d’un endomorphismede ev P T λ . Mais ev P induit un isomorphisme entre les endomorphismes de T λ etles endomorphismes de ev P T λ . De plus, ev P est exact, donc préserve les images.On en déduit que S ≃ ev P S ′ , où S ′ est l’image d’un endomorphisme de T λ .Comme ev P est exact et fidèle, la simplicité de S implique que S ′ est simple.Donc S ′ est un simple de F ( P ( K ) × n ; K ) et un quotient de T λ . Or les simplesquotients de T d sont les E M , avec M représentation simple de K [ S d ] . D’après la31roposition 2.6, cela implique que S ′ est un quotient d’un foncteur E M . Commeles E M sont absolument simples, E M est simple d’après la proposition 2.1. Donc S ′ ≃ E M , et ainsi S ≃ ev P E M . Lemme 5.12. Soient π , . . . , π d des foncteurs absolument simples additifs, et F un sous-foncteur de π ⊗ · · · ⊗ π d . Alors F admet un sous-foncteur simple.Démonstration. Par l’absurde, supposons que F n’admet pas de sous-foncteursimple. Le foncteur F lui-même n’est donc pas simple, et il admet un sous-foncteur propre F . Le foncteur cr d F est un sous-objet du foncteur semi-simple cr d ( π ⊗ · · · ⊗ π d ) = M σ ∈ S d π σ (1) ⊠ · · · ⊠ π σ ( d ) de F ( A × d ; K ) , donc il en est facteur direct. Comme cr d F est de plus stable parl’action de S d , il existe un morphisme non nul π ⊠ · · · ⊠ π d → cr d F , donc unmorphisme non nul π ⊗ · · · ⊗ π d → F par la proposition 1.11. On note φ lacomposée φ : π ⊗ · · · ⊗ π d → F ֒ → π ⊗ · · · ⊗ π d . Le foncteur Im φ est un sous-foncteur de F , donc de F , et n’est donc pas simple.Ainsi, il existe F tel que F ( Im φ ( F . En itérant ce raisonnement, on peutconstruire une suite infinie ( φ n ) n ≥ d’endomorphismes de π ⊗ · · · ⊗ π d tels que Im φ n +1 ( Im φ n pour tout n . Une telle suite de morphismes est nécessairementune famille libre de End( π ⊗ · · ·⊗ π d ) . Ceci contredit la finitude de la dimensionde cette algèbre (la dimension se calcule en utilisant les propositions 1.11 et 2.1comme dans la démonstration du lemme 5.8). Proposition 5.13 (Démonstration de (3) ⇒ (1)) . Soit λ = ( λ , . . . , λ n ) un n -uplet d’entiers strictement positifs, soit P = ( π , . . . , π n ) un n -uplet de fonc-teurs additifs absolument simples et deux à deux non isomorphes, et soit M =( M , . . . , M n ) un uplet dont chaque M i est une représentation simple de K [ S λ i ] .Alors le foncteur ev P E M est un quotient simple de ev P T λ .Démonstration. Le foncteur ev P E M est clairement un quotient de ev P T λ . Mon-trons qu’il est simple. D’après le lemme 5.12, ev P E M admet un sous-foncteursimple S . D’après la proposition 5.11, S ≃ ev P E L pour un certain n -uplet L de représentations de groupes symétriques. Les calculs d’espaces de morphismesde la proposition 5.10 forcent alors le monomorphisme S ֒ → ev P E M à être unisomorphisme. Ainsi ev P E M est simple. F ( A, K ) pour A anneau fini Nous appelons p -anneau un anneau A de caractéristique p r , pour un nombrepremier p et un entier r > . Si A est un anneau fini, on note ( p ) A la partie p -primaire du groupe abélien A , munie de l’unique structure de p -anneau pourlaquelle la surjection canonique A → ( p ) A est un morphisme d’anneaux. On note π p : P ( A ) → P ( ( p ) A ) le foncteur qui envoie un A -module projectif de type finisur sa partie p -primaire. Le théorème suivant résume les résultats démontrésdans les sections 3, 4 et 5 dans le cas particulièrement simple où la catégoriesource est P ( A ) pour un anneau fini A , et où K est suffisamment gros.32 héorème 6.1. Soit A un anneau fini ; notons q la caractéristique de K .1. Les valeurs des foncteurs simples de F ( A, K ) sont de dimension finie.2. Si A est un p -anneau et q = p , alors tous les simples sont polynomiaux.En particulier K est un corps de décomposition de P ( A ) si et seulementsi c’en est un corps de décomposition non additif.3. Si A est un p -anneau et q = p , le seul simple polynomial est le foncteurconstant de valeur K .Supposons de plus que K est un corps de décomposition non additif pour P ( A ) .Notons P l’ensemble (fini) des nombres premiers tels que ( p ) A = 0 , et S unensemble fini de représentants des classes d’isomorphisme de foncteurs additifs P ( A ) → K - Mod simples. Un foncteur F de F ( A, K ) est simple si et seulements’il peut s’écrire sous la forme d’un produit tensoriel : F ≃ O p ∈ P,p = q π ∗ p S p ⊗ O π ∈S π ∗ E π ! . où les S p sont des simples de F ( ( p ) A, K ) et les E π sont des foncteurs élémen-taires. De plus, dans une telle décomposition, les S p et les E π sont uniquementdéterminés à isomorphisme près.Démonstration. Comme A est fini, les projectifs standard de F ( A, K ) sont àvaleurs de dimensions finies, donc leurs quotients (en particulier les simples)sont à valeurs de dimensions finies. Ceci prouve la première assertion. Si A estun p -anneau et q = p , la polynomialité des simples découle du corollaire 3.5.La propriété sur le corps de décomposition provient du corollaire 5.4. Si A estun p -anneau et q = p , alors P ( A )( x, y ) ⊗ Z K = 0 et il n’y a pas de foncteurspolynomiaux non constants d’après la proposition 1.10. Finalement, si K est uncorps de décomposition non additif de P ( A ) , les simples s’écrivent de manièreunique comme un produit tensoriel de simples de la forme π ∗ p S p où les S p sontdes simples de F ( ( p ) A, K ) , d’après la proposition 4.3, et le corollaire 5.4 donneune décomposition tensorielle du simple π ∗ q S q . Nous donnons maintenant les conséquences du théorème 6.1 sur la structuredes K [ M n ( A )] -modules simples, pour un p -anneau fini A . Se donner un ( K, A ) -bimodule B de dimension finie ℓ sur K équivaut à se donner un morphismed’anneaux A → M ℓ ( K ) . On en déduit pour tout n ≥ un morphisme d’anneaux(qui est le morphisme d’anneaux définissant le ( K, M n ( A )) -bimodule B ⊕ n ) ψ B : M n ( A ) → M n ( M ℓ ( K )) ≃ M nℓ ( K ) . Notation 6.2. Pour tout K [ M nℓ ( K )] -module M , on note M [ B ] le K [ M n ( A )] -module obtenu par restriction le long de K [ ψ B ] : K [ M n ( A )] → K [ M nℓ ( B )] .Pour un module M de la forme M ≃ E ( K nℓ ) avec E un endofoncteur des K -espaces vectoriels, on a donc un isomorphisme de K [ M n ( A )] -modules M [ B ] ≃ ( π ∗ B E )( A n ) où π B : P ( A ) → K - Mod est le foncteur additif π B ( − ) = B ⊗ A − (d’après la proposition 1.7, tous les foncteurs additifs sont de cette forme).33 éfinition 6.3. Un K [ M nℓ ( K )] -module est élémentaire s’il est non nul etisomorphe à un module de la forme E ( K nℓ ) , où E est un foncteur élémentaire.Le corollaire 1.6 assure que les K [ M nℓ ( K )] -modules élémentaires sont simples,et donne une bijection entre les classes d’isomorphisme de représentations élé-mentaires de K [ M nℓ ( K )] et les classes d’isomorphisme de foncteurs élémen-taires ne s’annulant pas sur K nℓ . La traduction de théorème 6.1 en termes de K [ M n ( A )] -modules simples est donc directe et donne le théorème suivant. Théorème 6.4. Soit A un p -anneau fini, et K un corps de décomposition de P ( A ) , de caractéristique p . Soit { B , . . . , B m } un ensemble de représentants desclasses d’isomorphisme de ( K, A ) -bimodules simples.Un K [ M n ( A )] -module M est simple si et seulement s’il existe des modulesélémentaires M , . . . , M m et un isomorphisme de K [ M n ( A )] -modules : M ≃ M [ B ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ B m ] m . De plus, les M i apparaissant dans une telle décomposition sont uniquement dé-terminés, à isomorphisme de K [ M n dim K ( B i ) ( K )] -modules près. Enfin tous les K [ M n ( A )] -modules simples sont absolument simples. Nous commençons par des observations élémentaires reliant un monoïde uni-taire M et son sous-monoïde M × des éléments inversibles. Soit ι : K [ M × ] → K [ M ] l’inclusion d’anneaux. On définit deux applications K -linéaires : r : K [ M ] → K [ M × ] , δ : K [ M ] → K ≃ End K ( K ) nulles sur les éléments non inversibles de M , et respectivement égales à l’identitéet à sur M × . Les trois conditions suivantes sont alors équivalentes :(i) le produit de deux éléments de M est inversible si et seulement si lesdeux éléments sont inversibles,(ii) l’application r est un morphisme d’anneaux,(iii) l’application δ est un morphisme d’anneaux.Lorsque ces conditions sont satisfaites, δ définit un K [ M ] -module de dimension qu’on note encore δ . Exemple . Si M est un monoïde fini, ou si M = M n ( A ) pour un anneaucommutatif A , alors r est un morphisme d’anneaux. Lemme 6.6. On suppose que r est un morphisme d’anneaux.1. La restriction le long de r induit un foncteur pleinement fidèle r ∗ : K [ M × ] - Mod → K [ M ] - Mod De plus r ∗ préserve les simples et induit une injection Irr( K [ M × ]) ֒ → Irr( K [ M ]) entre les classes d’isomorphismes de modules simples.2. La restriction le long de ι induit un foncteur essentiellement surjectif ι ∗ : K [ M ] - Mod → K [ M × ] - Mod . e plus ι ∗ préserve les simples si et seulement si − ⊗ δ préserve les K [ M ] -modules simples. Si c’est le cas, alors ι ∗ induit une bijection entrel’ensemble des classes d’isomorphisme des modules simples M ⊗ δ et Irr( K [ M × ]) .Démonstration. L’énoncé est une conséquence directe des identités ι ∗ r ∗ M = M et r ∗ ι ∗ M = M ⊗ δ .Pour transporter le théorème de décomposition tensorielle 6.4 au niveau des K [ GL n ( A )] -modules, commençons par quelques rappels classiques issus de lathéorie des anneaux artiniens (cf. par exemple [9]). Dans la suite de cette sous-section, p désigne un nombre premier, A un p -anneau fini, et l’on suppose que K est de caractéristique p .L’idéal de A engendré par p , qui en est un élément nilpotent central, estinclus dans son radical. Par conséquent, le morphisme surjectif d’anneaux A ։ A/p induit un isomorphisme A/ Rad( A ) ≃ −→ ( A/p ) / Rad( A/p ) . En appliquant lecorollaire de [9, § 12.7 (page 220)], on en déduit que le morphisme canonique ( A/ Rad( A )) ⊗ Z K → ( A ⊗ Z K ) / Rad( A ⊗ Z K ) est un isomorphisme.Il existe un nombre fini de classes d’isomorphisme de A -modules à droitesimples, notons S , . . . , S m des représentants de ces classes d’isomorphisme. Pourchaque i , le corps d’endomorphismes de S i est isomorphe à F p ri pour un entier r i > qu’on appellera exposant de S i ; si ℓ i > désigne la dimension de S i sur cecorps (appelée endodimension de S i ), on dispose d’un isomorphisme d’anneaux A/ Rad( A ) ≃ m Y i =1 M ℓ i ( F p ri ) et, par équivalence de Morita, d’un isomorphisme d’anneaux M n ( A ) / Rad( M n ( A )) ≃ m Y i =1 M nℓ i ( F p ri ) , (7)pour tout entier n > ; cet isomorphisme est induit par des morphismes d’an-neaux ψ i,n : M n ( A ) → M nℓ i ( F p ri ) définissant les M n ( A ) -modules simples S ⊕ ni . D’après le résultat de changement de base susmentionné, on en déduit unisomorphisme M n ( A ⊗ Z K ) / Rad( M n ( A ⊗ Z K )) ≃ m Y i =1 M nℓ i ( F p ri ⊗ Z K ) . (8)Si l’on suppose que K est un corps de décomposition de P ( A ) (ce qui revientà dire que ce corps contient chaque F p ri ), on dispose, par la théorie de Galoisdes corps finis, d’un isomorphisme de ( K, F p ri ) -bimodules F p ri ⊗ Z K ≃ K × K (1) × · · · × K ( r i − où l’action de F p ri sur chaque facteur est déduite d’un choix de plongement F p ri → K et l’exposant ( t ) indique que l’action de K sur lui-même est torduepar φ t , où φ désigne le morphisme de Frobenius. Autrement dit, si B i est unfacteur de composition du ( K, A ) -bimodule S i ⊗ Z K , on a S i ⊗ Z K ≃ B i ⊕ B (1) i ⊕ · · · ⊕ B ( r i − i (9)35comme ( K, A ) -bimodules), où l’exposant ( t ) signifie encore que l’action de K sur B i est tordue par φ t ( B ( t ) := K φ t ⊗ K B ). Par conséquent, les B ( j ) i , où ≤ i ≤ m et ≤ j < r i , forment un système de représentants des ( K, A ) -bimodules simples.Rappelons par ailleurs qu’une partition λ = ( λ , . . . , λ n ) est p r -restreinte sion a λ n < p r et pour tout i < n , λ i − λ i +1 < p r . Toute partition p r -restreinte λ sedécompose de manière unique en une somme λ = λ + pλ + · · · + p r − λ r − où les λ i sont des partitions p -restreintes. D’après la proposition B.2 de l’appendice B,les foncteurs élémentaires sont isomorphes aux socles L λ des foncteurs de Schur S λ indexés par les partitions p -restreintes. Notation 6.7. Soit λ une partition p r -restreinte, et λ + · · · + p r − λ r − sadécomposition à l’aide de partitions p -restreintes λ i . On note : L λ ( K n ) = L λ ( K n ) [0] ⊗ · · · ⊗ L λ r − ( K n ) [ r − où l’exposant ‘ [ k ] ’ indique la restriction d’un module le long de φ k . Remarque . On dispose d’isomorphismes canoniques ( L [ i ] ) [ B ] ≃ L [ B ( i ) ] . Théorème 6.9. Soit A un p -anneau fini et K un corps de décomposition de P ( A ) , de caractéristique p . Soit { S , . . . , S m } un système complet de A -modulessimples. On note r i l’exposant de S i , ℓ i son endodimension, et B i un facteur decomposition du ( K, A ) -bimodule S i ⊗ Z K .Un ensemble de représentants des classes d’isomorphisme des K [ GL n ( A )] -modules simples est donné par les produits tensoriels L λ (1) ( K nℓ ) [ B ] ⊗ · · · ⊗ L λ ( m ) ( K nℓ m ) [ B m ] où les λ ( i ) = ( λ ( i ) , . . . , λ ( i ) nℓ i ) parcourent l’ensemble des partitions p r i -restreintestelles que λ ( i ) nℓ i = 0 . De plus, tous les K [ GL n ( A )] -modules simples sont abso-lument simples.Démonstration. Notons L ( λ (1) , . . . , λ ( m )) le K [ M n ( A )] -module : L ( λ (1) , . . . , λ ( m )) := L λ (1) ( K nℓ ) [ B ] ⊗ · · · ⊗ L λ ( m ) ( K nℓ m ) [ B m ] . D’après le théorème 6.4, les L ( λ (1) , . . . , λ ( m )) , indexés par les partitions p r i -restreintes λ ( i ) , forment un système de représentants des classes d’isomorphismede K [ M n ( A )] -modules simples. D’après le deuxième point du lemme 6.6, pourdémontrer le théorème 6.9, il suffit de démontrer que si les λ ( i ) nℓ i sont tous nonnuls alors : L ( λ (1) , . . . , λ ( m )) ⊗ δ ≃ L ( λ (1) , . . . , λ ( m )) (10)et que si l’un des λ ( i ) nℓ i est nul alors il existe des partitions µ (1) , . . . , µ ( m ) avectous les µ ( i ) nℓ i non nuls, telles que L ( λ (1) , . . . , λ ( m )) ⊗ δ ≃ L ( µ (1) , . . . , µ ( m )) . (11)Les isomorphismes (10) et (11) sont une conséquence directe des isomor-phismes de K [ M n ( A )] -modules ( ∗ ) et ( ∗∗ ) ci-dessous, où chaque δ i désigne lareprésentation δ relative à K [ M nℓ i ( K )] , où λ est une partition quelconque de la36orme ( λ , . . . , λ nℓ i ), et où µ est la partition µ = ( λ + p r i − , . . . , λ nℓ i + p r i − ,avec r i l’exposant de B i : ( ∗ ) δ ≃ δ [ B ]1 ⊗ · · · ⊗ δ [ B m ] m , ( ∗∗ ) L λ ( K nℓ i ) [ B i ] ⊗ δ [ B i ] i ≃ ( L λ ( K nℓ i ) [ B i ] si λ nℓ i = 0 , L µ ( K nℓ i ) [ B i ] si λ nℓ i = 0 .Il ne reste plus qu’à établir les isomorphismes ( ∗ ) et ( ∗∗ ) .Pour démontrer ( ∗ ) , il suffit de vérifier que l’action d’un élément x ∈ M n ( A ) sur δ [ B ]1 ⊗ · · · ⊗ δ [ B m ] m est l’identité si x ∈ GL n ( A ) , et est nulle si x GL n ( A ) .Cela provient de ce qu’un élément d’un anneau est inversible si et seulement si saclasse modulo le radical de l’anneau est inversible, ainsi que des isomorphismes(8) et (9).Démontrons ( ∗∗ ) . Supposons d’abord λ nℓ i = 0 . Alors, l’une au moins despartitions p -restreintes intervenant dans la décomposition de λ a un nℓ i -èmeterme non nul. La proposition B.4 de l’appendice B donne un isomorphisme : L λ ( K nℓ i ) [ B i ] ⊗ δ [ B i ] i = ( L λ i ( K nℓ i ) ⊗ δ i ) [ B i ] ≃ L λ ( K nℓ i ) [ B i ] . Supposons maintenant λ nℓ i = 0 . Comme le morphisme M n ( A ) → M nℓ i ( K ) définissant B i se factorise par ψ i,n (défini après l’isomorphisme (7)), qui està valeurs dans M nℓ i ( F p ri ) , la restriction de δ i à son image coïncide avec lecaractère det ⊗ p ri − , de sorte que : L λ ( K nℓ i ) [ B i ] ⊗ δ [ B i ] i = ( L λ i ( K nℓ i ) ⊗ δ i ) [ B i ] = ( L λ ( K nℓ i ) ⊗ det ⊗ p ri − ) [ B i ] . De plus, comme p r i − P ≤ k Démonstration. Pour tout objet a de C , on a un morphisme d’anneaux r a : K [End C ( a )] → K [Aut C ( a )] qui est l’identité sur les éléments inversibles de End C ( a ) et nul sur les éléments non inversibles. On note T a : K [End C ( a )] - Mod →F ( C ; K ) le prolongement intermédiaire associé à l’évaluation d’un foncteur sur a .D’après le lemme 6.6 et le corollaire 1.6, le foncteur Φ a = T a ◦ r ∗ a est pleinementfidèle et induit une injection (toujours notée Φ a ) : Φ a : Irr( K [Aut C ( a )] - Mod ) → Irr( F ( C ; K )) [ M ] → [ T a ( r ∗ a M )] . Pour démontrer la proposition, il reste à montrer que tout élément de Irr( F ( C ; K )) est dans l’image de Φ a pour un élément a unique à isomorphisme près.Pour voir que tout élément [ S ] de Irr( F ( C ; K )) est dans l’image d’un Φ a ,prenons un objet x de C tel que S ( x ) = 0 . Par le corollaire 1.6, S ( x ) est un K [End C ( x )] -module simple. Comme le monoïde End C ( x ) est fini, [54, thm 5.5]donne un idempotent e ∈ End C ( x ) tel que eS ( x ) e = 0 et tel que les éléments noninversibles du monoïde e End C ( x ) e opèrent par sur S ( x ) . Soit a l’image de e dans C (qui existe par hypothèse sur C ). On déduit que S ( a ) est un K [Aut C ( a )] -module simple et que S est isomorphe à l’image par Φ a de S ( a )( ≃ eS ( x )) .Il reste à voir que si a et b sont deux éléments non isomorphes de C , lesimages de Φ a et Φ b sont disjointes. Cela peut se déduire facilement des résultatsde [54, § 5.2], ou s’établir directement en observant que la formule donnant leprolongement intermédiaire T a montre que, si M est un K [Aut C ( a )] -module(non nécessairement simple), alors T a ( r ∗ a M )( x ) ne peut être non nul que si a estfacteur direct de x .La dichotomie entre simples polynomiaux et non polynomiaux se voit égale-ment au niveau des fonctions de dimension. Rappelons que si F est un foncteurde F df ( A, K ) , sa fonction de dimension est la fonction d F : N → N n dim K F ( A n ) . Une fonction f : N → N est dite polynomiale si elle est la restriction d’une fonc-tion f : Z → Z polynomiale au sens d’Eilenberg-Mac Lane rappelé au § 1.4. Demanière équivalente, f est un polynôme numérique, c’est-à-dire une combinaisonlinéaire à coefficients entiers de coefficients binomiaux n C kn (ou n (cid:0) nk (cid:1) ennotation anglo-saxonne). Le lemme suivant, bien connu, est conséquence directede la décomposition de F ( A n ) à l’aide des effets croisés (cf. la section 1.4). Lemme 6.12. Soit A un anneau et soit F un foncteur de F df ( A, K ) . Si F estpolynomial, alors d F est une fonction polynomiale de même degré que F , sinon d F croît plus vite que toute fonction polynomiale. A est un p -anneau fini semi-simple . Nous ver-rons, au corollaire 8.32, que ceci peut s’établir facilement à partir des résultatsde Kuhn [42]. Nous montrerons en fait pour les p -anneaux finis semi-simples uneversion plus précise de la conjecture (la conjecture 8.30). Conjecture 6.13. Soit A un p -anneau fini. On suppose car( K ) = p . Alors pourtout foncteur simple F de F ( A, K ) , il existe une fonction polynomiale f : Z → Z telle que ∀ n ∈ N d F ( n ) = f ( p n ) . Dans cette section, nous montrons comment étendre le champ d’applicationdes résultats de la section 5. Cela repose sur une étude fine des effets croisés(§ 7.1), qui nous permet (§ 7.2) d’affaiblir les hypothèses du corollaire 5.4 pourparvenir à la même conclusion — nous donnons aussi un énoncé pour un corpsde coefficients pas assez gros qui nous servira dans la section 8. Au § 7.3, nousaffaiblissons encore les hypothèses nécessaires lorsque la catégorie source est dela forme P ( A ) , où A est un anneau commutatif . Les § 7.4 et 7.5 sont dédiés àdes applications à connotations représentationniste et arithmétique. Soient D une catégorie abélienne et d ∈ N . On note Add d ( A , D ) la sous-catégorie pleine de Fct ( A d , D ) des foncteurs qui sont additifs par rapport àchacune des d variables et Σ Add d ( A , D ) la catégorie des objets de Add d ( A , D ) multi-symétriques au sens suivant.Plus précisément, pour un objet F de Add d ( A , D ) et σ ∈ S d , on pose ( F.σ )( a , . . . , a d ) := F ( a σ (1) , . . . , a σ ( d ) ) . Un objet de Σ Add d ( A , D ) est un objet F de Add d ( A , D ) muni d’isomorphismes ξ σ : F.σ ≃ F , pour tout σ ∈ S d , telsque pour tous σ, τ ∈ S d la composée suivante soit égale à ξ στ : F. ( στ ) = ( F.σ ) .τ ξ σ .τ −−−→ F.τ ξ τ −→ F . Les morphismes de Σ Add d ( A , D ) sont les morphismes des objets sous-jacentsde Add d ( A , D ) qui sont compatibles aux isomorphismes structuraux ξ σ . Ondispose d’une paire de foncteurs : O : Σ Add d ( A , D ) ⇆ Add d ( A , D ) : L où O désigne le foncteur d’oubli, et L envoie F sur l’objet L ( F ) = L τ ∈ S d F.τ muni de la structure symétrique donnée par les isomorphismes ξ σ : L ( F ) .σ = M τ ∈ S d F. ( τ σ ) ≃ −→ M τ ∈ S d F.τ = L ( F ) fournis par l’isomorphisme d’échange des facteurs induit par la bijection τ τ σ de l’ensemble d’indexation S d . Le lemme suivant est immédiat. 3. Nagpal a démontré [45, théorème 1.1], à l’aide de méthodes différentes, un résultatanalogue pour les foncteurs de type fini des espaces vectoriels de dimension finie sur un corpsfini avec injections vers les espaces vectoriels sur un corps d’une autre caractéristique. emme 7.1. Le foncteur L est adjoint des deux côtés au foncteur O . Le foncteur de d -ème effet croisé se restreint en un foncteur (toujours noté cr d ) P ol d ( A, D ) → Add d ( A , D ) , qui se relève à travers O en un foncteur quenous noterons Cr d : P ol d ( A, D ) cr d ) ) ❚❚❚❚❚❚❚❚❚❚❚❚❚❚❚ Cr d / / Σ Add d ( A , D ) O (cid:15) (cid:15) Add d ( A , D ) . Proposition 7.2 (Pirashvili, cf. [47]) . Soient D une catégorie abélienne et d ∈ N . Le foncteur Cr d : P ol d ( A , D ) → Σ Add d ( A , D ) est réflexif. Corollaire 7.3. Si F est un foncteur simple de Fct ( A , D ) , polynomial de degré d , alors Cr d ( F ) est un objet simple de Σ Add d ( A , D ) et le foncteur Cr d induitun isomorphisme de corps End( F ) ≃ End(Cr d ( F )) .Démonstration. L’objet Cr d ( F ) est non nul car O (Cr d ( F )) = cr d ( F ) = 0 . Lecorollaire découle donc directement des propositions 1.4 et 7.2.Les résultats de structure sur les foncteurs Cr d et O nous permettent d’obte-nir dans la proposition suivante des renseignements importants sur la structuredes foncteurs cr d ( F ) lorsque F est un foncteur simple. Proposition 7.4. Soit F un foncteur simple de Fct ( A , E ) , polynomial de degré d . 1. Le foncteur cr d ( F ) de Fct ( A d , E ) est semi-simple : il existe un foncteursimple S de Fct ( A d , E ) , un sous-ensemble E de S d , et un isomorphisme cr d ( F ) ≃ M σ ∈ E S.σ . 2. Il existe des entiers naturels n et m vérifiant < nm ≤ d ! de sorte quel’anneau End( cr d ( F )) soit isomorphe au produit d’anneaux de matrices M n (End( S )) m .3. Le morphisme d’anneaux End( F ) → End( cr d ( F )) induit par cr d fait de End( cr d ( F )) un End( F ) -espace vectoriel de dimension au plus d ! .Démonstration. Le foncteur O est adjoint à gauche au foncteur L , qui commuteaux colimites. Par conséquent, O préserve les objets de type fini. D’après lecorollaire 7.3, Cr d F est un simple de Σ Add d ( A , E ) , son image par O est doncnon nulle et de type fini, et possède donc un quotient simple T . Par adjonction ilexiste un morphisme non nul, donc injectif, Cr d F → L ( T ) . D’où un morphisme : cr d ( F ) = O (Cr d F ) ֒ → OL ( T ) = M τ ∈ S d T.τ. Les foncteurs T.τ sont des objets simples de Add d ( A , E ) , tout comme T ( − .τ définissant un automorphisme de la catégorie Add d ( A , E ) ). La première asser-tion en découle. En regroupant les termes isomorphes dans la décomposition de40 r d ( F ) on obtient un isomorphisme cr d ( F ) ≃ L mi =1 S ⊕ n .σ i pour des permuta-tions σ i convenables, de sorte que S.σ i et S.σ j ne soient jamais isomorphes pour i = j . Cela fournit la deuxième assertion. Pour la troisième assertion, on utiliseque Cr d ( F ) est simple d’après le corollaire 7.3, donc LO Cr d ( F ) ≃ Cr d ( F ) ⊕ d ! .Ainsi, le morphisme d’anneaux End( F ) ≃ End(Cr d ( F )) → End ( O Cr d ( F )) ≃ Hom(Cr d ( F ) , LO Cr d ( F )) fait de End ( O Cr d ( F )) = End ( cr d ( F )) un espace vectoriel de dimension au plus d ! sur End( F ) . Nous pouvons maintenant établir la généralisation suivante du corollaire 5.4,où P ( A ) est remplacée par une petite catégorie additive quelconque A . Théorème 7.5. Supposons que K est un corps de décomposition de A . Unfoncteur polynomial F de F df ( A ; K ) est simple si et seulement s’il est isomorpheà un produit tensoriel F ≃ π ∗ E ⊗ · · · ⊗ π ∗ n E n où n ∈ N , les π i sont des foncteurs additifs simples deux à deux non isomorphesde F df ( A ; K ) et les E i sont des foncteurs élémentaires non constants. (Le fonc-teur simple constant s’obtient comme un produit vide). De plus, l’entier n etles classes d’isomorphisme des E i et des π i sont uniques, à permutation desfacteurs près. Enfin les foncteurs polynomiaux simples de F df ( A ; K ) sont abso-lument simples.Démonstration. Le résultat est trivial pour les foncteurs de degré (ils sontconstants). Supposons F de degré d > . L’adjonction diagonale-effets croisés dela proposition 1.11 donne un morphisme non nul ∆ ∗ cr d ( F ) → F qui est un épi-morphisme par simplicité de S . D’après la proposition 7.4, cr d F est semi-simple.Comme K est un corps de décomposition de A , il découle des propositions 2.1et 2.6 que les facteurs directs de cr d ( F ) sont de la forme π ⊠ · · · ⊠ π d pour desfoncteurs π i absolument simples. Ainsi F est un quotient d’un produit tensoriel π ⊗ · · · ⊗ π d et le théorème 7.5 découle du théorème 5.3. Remarque . Dans l’énoncé précédent, on ne peut généralement pas s’affran-chir de l’hypothèse que K est un corps de décomposition de A , même si F est absolument simple. Considérons par exemple le foncteur quadratique F de F ( C , R ) associant à un C -espace vectoriel V le R -espace vectoriel des formeshermitiennes sur V ∗ . On vérifie facilement que F est absolument simple, maisil n’admet pas de décomposition à la Steinberg, car la catégorie Add ( P ( C ); R ) ,qui est C -linéaire, ne contient aucun foncteur absolument simple.Le théorème 7.5, le corollaire 3.7 et la proposition 2.3 entraînent aussitôt lerésultat suivant, dont nous ne connaissons pas de démonstration directe. Corollaire 7.7. Tout corps de décomposition de A qui contient toutes les ra-cines de l’unité est un corps de décomposition non additif de A . Si le corps K n’est pas assez gros, on a le résultat plus faible suivant.41 héorème 7.8. Soit F un foncteur polynomial simple de F df ( A ; K ) . Il existeune extension finie de corps commutatifs K ⊂ L telle que le foncteur F ⊗ K L de F ( A ; L ) possède une filtration finie dont les sous-quotients sont du type π ∗ E ⊗ · · · ⊗ π ∗ n E n où les π i sont des foncteurs additifs absolument simples de F df ( A ; L ) et les E i des foncteurs élémentaires non constants.Démonstration. Soit S un sous-foncteur simple de cr d ( F ) (cf. proposition 7.4),où d est le degré de F . Par la proposition 2.5, il existe une extension finie K ⊂ L telle que S ⊗ K L possède une filtration finie dont les sous-quotients sontabsolument simples (dans F ( A d ; L ) ).Comme cr d ( F ) est somme directe d’un nombre fini de foncteurs du type S.σ pour σ ∈ S d , et que le foncteur − ⊗ K L : F ( A ; K ) → F ( A ; L ) commute auxeffets croisés, on voit que tous les sous-quotients simples de cr d ( F ⊗ K L ) (dans Add d ( A ; L ) ) sont absolument simples. Le foncteur F ⊗ K L possède une filtrationfinie (de longueur bornée par le degré de L sur K ) dont les sous-quotients T i sont simples, polynomiaux, à valeurs de dimension finie. Par construction, lessous-quotients simples de cr d ( T i ) sont absolument simples dans Add d ( A ; L ) .On peut donc conclure que T i a la forme souhaitée en procédant comme dansla démonstration du théorème 7.5. Remarque . Si F est absolument simple, la proposition 7.4 montre qu’on peutchoisir L de degré au plus d ! sur K , où d est le degré de F . F ( A, K ) ( A commutatif ) La proposition 7.10 étend le champ d’application du théorème 7.5 à desfoncteurs dont on sait seulement qu’ils prennent une valeur de dimension finie. Proposition 7.10. Soient A un anneau commutatif et F un foncteur simplepolynomial de degré d de F ( A, K ) . Les assertions suivantes sont équivalentes.1. Le foncteur F est à valeurs de dimension finie.2. Le foncteur F prend une valeur de dimension finie non nulle.3. Le corps End( F ) est de dimension finie sur K .4. Le foncteur cr d ( F ) est à valeurs de dimension finie.Si on suppose de plus que A est un anneau de type fini, alors F vérifie automa-tiquement les assertions précédentes.Démonstration. La proposition 1.11 donne un morphisme ∆ ∗ cr d ( F ) → F nonnul, qui est un épimorphisme par simplicité de F . Ceci prouve l’implication 4 ⇒ ⇒ ⇒ ⇒ 4. La proposition 7.4 et l’hypothèse sur End( F ) donnent desextensions d’anneaux (non nécessairement commutatifs) de degrés finis K ⊂ End( F ) ⊂ End( cr d ( F )) ≃ M n (End( S )) m pour des entiers n, m > convenables (où S est un sous-foncteur simple de cr d F ). Ainsi, End( S ) est de degré fini sur K . Or S est un objet simple de Add d ( A, K ) ≃ ( A ⊗ d ⊗ K ) - Mod (où tous les produits tensoriels sont pris sur42 ), par une application itérée de la proposition 1.7. Comme l’anneau A ⊗ d ⊗ K est commutatif , un module simple sur celui-ci est un quotient qui est un corps commutatif L , et le corps des endomorphismes de ce module simple s’identifieà L . Par conséquent, le fait que End( S ) soit de degré fini sur K implique que S prend des valeurs de dimension finie. Comme cr d ( F ) est une somme directe finie de foncteurs du type S.σ pour σ ∈ S d (proposition 7.4), on en déduitque cr d ( F ) prend également des valeurs de dimension finie, ce qui achève ladémonstration de 3 ⇒ 4. Finalement si A est de type fini, alors A ⊗ d ⊗ K est une K -algèbre commutative de type fini, donc tout module simple sur cette algèbreest de dimension finie. Ainsi cr d ( F ) est à valeurs de dimension finie, car c’estune somme directe de simples de Add d ( A, K ) ≃ ( A ⊗ d ⊗ K ) - Mod . Remarque . Le résultat tombe en défaut si l’on omet l’hypothèse de com-mutativité de A . En effet l’implication 3 ⇒ d = 1 , carun A op ⊗ Z K -bimodule simple peut être de dimension infinie sur K sans êtreabsolument simple (sur K ). Par exemple, si k est un corps de dimension infiniesur son centre K , le ( k, k ) -bimodule k est absolument simple mais de dimensioninfinie sur K . Remarque . Dans la démonstration de la proposition 7.10, le fait que lecorps des endomorphismes d’un foncteur simple de Add d ( A, K ) est commu-tatif joue un rôle important. On notera toutefois que le corps des endomor-phismes d’un foncteur simple polynomial de F df ( A, K ) (avec A et K commuta-tifs) n’est pas nécessairement commutatif. Donnons-en un exemple quadratiquedans F df ( C , R ) : on a un morphisme surjectif C ⊗ R C → C (donné par l’identitéet la conjugaison) de R [ S ] -algèbres, où l’action de S est donnée par l’échangedes facteurs à la source et la conjugaison au but. On en déduit un morphismesurjectif de R -algèbres de S R C (où C est vu comme R -algèbre) sur l’algèbretordue (relativement à l’action de conjugaison) du groupe S sur C . Or cette al-gèbre tordue est isomorphe à la R -algèbre H des quaternions. Cela montre qu’ilexiste un S R C -module simple dont le corps d’endomorphismes est H , d’où parprolongement intermédiaire un foncteur quadratique simple de F df ( C , R ) ayantla même propriété. Soit k un corps infini. On rappelle qu’une représentation V de dimension fi-nie du monoïde multiplicatif M n ( k ) est dite polynomiale si le morphisme d’ac-tion ρ : M n ( k ) → End k ( V ) est un polynôme des coefficients des matrices.Les restrictions des représentations polynomiales de M n ( k ) à GL n ( k ) sont les représentations polynomiales de GL n ( k ) . Cette notion de représentation poly-nomiale, dont l’idée remonte à la thèse de Schur, et dont l’ouvrage de Green [29]fait une étude systématique, a fait l’objet d’une littérature intensive. La défini-tion suivante donne une notion plus faible, mais plus souple, de représentation polynomiale à la Eilenberg-Mac Lane ( EML-polynomiale en abrégé). Définition 7.13. Soient A un anneau, k un anneau commutatif, n ∈ N et M une représentation k -linéaire du monoïde multiplicatif M n ( A ) . On dit que M est un représentation polynomiale à la Eilenberg-Mac Lane si le morphismede monoïdes multiplicatifs ρ : M n ( A ) → End k ( M ) donnant l’action est unefonction polynomiale au sens d’Eilenberg-Mac Lane, cf. section 1.4.43ne représentation de GL n ( A ) ou de SL n ( A ) est dite polynomiale à laEilenberg-Mac Lane si elle est restriction d’une représentation EML-polynomialede M n ( A ) .La polynomialité à la Eilenberg-Mac Lane de ρ ne fait intervenir que lastructure additive des anneaux M n ( A ) et End k ( V ) (la structure multiplicativene joue aucun rôle), tandis que le fait que ρ est une représentation signifie lacompatibilité à leur structure multiplicative (avec préservation de l’unité ; lastructure additive ne joue aucun rôle). La polynomialité à la Eilenberg-MacLane est donc une forme de propriété arithmétique des représentations. Exemple . On dispose des exemples élémentaires suivants.1. Si A est un anneau fini dont la caractéristique est une puissance de celle de k , toute représentation de M n ( A ) ou de GL n ( A ) est EML-polynomiale,d’après le théorème 6.1.2. Si A = k est un corps infini toute représentation polynomiale de M n ( A ) ou de GL n ( A ) au sens classique est EML-polynomiale.3. La notion de représentation EML-polynomiale est stable par restrictionle long d’un morphisme d’anneaux. (En effet, c’est la cas pour la notionde fonction polynomiale à la Eilenberg-Mac Lane).4. La notion de représentation EML-polynomiale est stable par produit ten-soriel. Les représentations EML-polynomiales de M n ( A ) sont stables parsous-quotient, car la fonction qu’induit sur un sous-quotient d’un groupeabélien une fonction polynomiale (de degré au plus d ) est polynomiale(de degré au plus d ). Notation 7.15. Si M est une représentation de M n ( B ) , GL n ( B ) ou SL n ( B ) ,on note M [ φ ] la représentation de M n ( A ) , GL n ( A ) ou SL n ( A ) obtenue parrestriction le long d’un morphisme d’anneaux φ : A → B .La proposition suivante donne le lien entre représentations EML-polynomialeset foncteurs polynomiaux. Notons P ol ( A, k ) la sous-catégorie pleine des fonc-teurs polynomiaux de F ( A, k ) , et k [ M n ( A )] −P ol la sous-catégorie pleine des k [ M n ( A )] -modules qui sont EML-polynomiaux. Proposition 7.16. Soit A un anneau et k un anneau commutatif. L’évaluationsur A n induit un foncteur plein et essentiellement surjectif : P ol ( A, k ) → k [ M n ( A )] −P ol . De plus, toute représentation EML-polynomiale simple est l’évaluation sur A n d’un foncteur polynomial simple uniquement déterminé à isomorphisme près.Démonstration. Le caractère plein du foncteur est donné par la proposition 1.4.Soit T : k [ M n ( A )] - Mod → F ( A, k ) le foncteur de prolongement intermédiaireassocié à l’évaluation sur A n . Alors pour tout module M , l’objet A n est unsupport et un cosupport du foncteur T ( M ) . La polynomialité de T ( M ) découlealors du lemme 3.13. L’essentielle surjectivité découle alors de l’isomorphisme T ( M )( A n ) ≃ M . Enfin, si M est simple, T ( M ) est l’unique simple dont l’éva-luation sur A n donne M d’après la proposition 1.4.44 emarque . Soit k un corps infini. Les représentations polynomiales de M n ( k ) au sens classique [29] s’obtiennent par évaluation sur k n des foncteurs strictement polynomiaux au sens de Friedlander et Suslin [25] (qui forment unesous-catégorie pleine de P ol ( k, k ) si k est un corps infini). Remarque . Bien que similaires et reliées par la proposition 7.16, les notionsde polynomialité pour les foncteurs et pour les représentations présentent des dif-férences significatives. Ainsi, à l’inverse des sous-catégories P ol n ( A , k ) qui sontépaisses dans F ( A , k ) (voir la section 1.4), une extension de deux représentationsEML-polynomiales de M n ( A ) n’est pas nécessairement EML-polynomiale.Ceci se voit déjà pour n = 1 , A = k = R . Soit R la représentation tau-tologique du monoïde multiplicatif M ( R ) . C’est une représentation qui estEML-polynomiale de degré . Pourtant, il existe une représentation V = ( R , ρ ) qui est une extension de R par elle-même et qui n’est pas EML-polynomiale. Ilsuffit de prendre ρ : M ( R ) → M ( R ) tel que ρ (0) = 0 et pour x = 0 , ρ ( x ) = (cid:18) x x. ln( | x | )0 x (cid:19) . Dans la suite de la section 7.4, nous considérons les représentations linéairessur un corps commutatif quelconque, qui est donc noté K selon les conventionsgénérales de l’article. Définition 7.19. Une représentation EML-polynomiale de M n ( K ) , de GL n ( K ) ,ou de SL n ( K ) , est dite élémentaire (non triviale) si elle est de la forme E ( K n ) pour un foncteur élémentaire E (non constant).Si K est infini, les représentations élémentaires de M n ( K ) sont polynomialesau sens classique. L’énoncé suivant peut donc être interprété comme un résul-tat de rigidité, qui permet d’exprimer des représentations polynomiales à laEilenberg-Mac Lane à partir de représentations polynomiales au sens classique. Théorème 7.20. Soient A un anneau commutatif, tel que K est un corps dedécomposition de P ( A ) . Soit M une représentation K -linéaire de dimensionfinie de M n ( A ) . On suppose que M est EML-polynomiale. Alors M est simplesi et seulement si elle peut s’écrire comme un produit tensoriel M ≃ M [ φ ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ φ m ] m où les M i sont des représentations élémentaires non triviales de M n ( K ) , etles φ i : A → K sont des morphismes d’anneaux deux à deux distincts. (Lareprésentation simple triviale s’obtient comme un produit vide). De plus, lesmorphismes φ i et les M i sont uniquement déterminés (à une permutation desindices près). Enfin, si M est simple, elle est absolument simple.Démonstration. D’après la proposition 7.16, la représentation M peut se releverde manière unique en un foncteur polynomial simple F . Ce dernier prend desvaleurs de dimensions finies dès que M est de dimension finie sur K d’après laproposition 7.10. Le théorème est alors une traduction directe du théorème dedécomposition tensorielle 7.5 dans F ( A, K ) via l’évaluation sur A n .En restreignant l’action de M n ( A ) au groupe GL n ( A ) on déduit du théo-rème 7.20 que toute représentation EML-polynomiale M de GL n ( A ) se décom-pose comme un produit tensoriel M ≃ M [ φ ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ φ m ] m . Exemple . Soit φ a : K [ X ] → K le morphisme de K -algèbres tel que φ a ( X ) = a . Les φ a induisent tous le même isomorphisme GL ( K [ X ]) → GL ( K ) , de sorteque si K est la représentation tautologique de GL ( K ) , les représentations EML-polynomiales simples K [ φ a ] sont toutes isomorphes.Ce genre de pathologie ne se produit pas pour SL n ( A ) , grâce à certainsrésultats de densité. Nous nous placerons dans la situation suivante. Situation 7.22. Soit A un anneau commutatif, K un corps commutatif, et f : A → K d un morphisme d’anneaux (pour la structure d’anneau produit sur K d ) dont les composantes sont les morphismes d’anneaux notés f i : A → K , ≤ i ≤ d . On suppose que l’une des deux hypothèses suivantes est vérifiée.(H1) Car( K ) = 0 .(H2) Car( K ) = p > , et pour tout couple i = j et tout t ∈ N on a φ t ◦ f i = f j ,où φ : K → K désigne le morphisme de Frobenius ( φ ( x ) = x p ).La proposition suivante est due à Borel et Tits [8, Prop 2.1]. Elle est aussiun corollaire du théorème 7.20 pour n = 1 (voir la remarque 7.30). Proposition 7.23. On se place dans la situation 7.22 et on suppose de plusque les ensembles f i ( A ) sont tous de cardinal infini. Soit P ∈ K [ X , . . . , X d ] .Si P ( f ( x ) , . . . , f d ( x )) = 0 pour tout x ∈ A , alors P = 0 . Corollaire 7.24. On se place dans la situation 7.22. La clôture de Zariski de f ( A ) dans K d est égale au produit des clôtures de Zariski des f i ( A ) dans K .Démonstration. Si tous les f i sont d’images infinies, le corollaire est juste unereformulation de la proposition 7.23. Sinon, quitte à permuter les coordonnées,on peut supposer que seules les e > premières coordonnées f i sont d’imagefinie. Les idéaux ker f i sont alors maximaux, et comme l’hypothèse (H2) estsatisfaite (l’hypothèse (H1) ne peut être satisfaite que si tous les f i sont d’imageinfinie), les ker f i sont deux à deux copremiers (pour ≤ i ≤ e ), de sorte quele morphisme d’anneaux φ : A → Q ≤ i ≤ e Im f i dont les composantes sont les f i est surjectif (lemme chinois). Ceci finit la preuve si d = e . On suppose donc parla suite < e < d .Soit I = ker φ , et soit I + = Z ⊕ I l’anneau obtenu en adjoignant formellementune unité à l’idéal I , et ι : I + → A le morphisme d’anneaux induit par l’inclusion I ⊂ A . On vérifie facilement que la propriété (P) suivante est satisfaite.(P) Si g, h : A → K sont deux morphismes d’anneaux distincts d’imagesinfinies, alors g ◦ ι et h ◦ ι sont également distincts et d’images infinies.Soit P ∈ K [ X , . . . , X d ] un polynôme s’annulant sur f ( A ) . Fixons x ∈ Im φ .Soit a ∈ A tel que φ ( a ) = x , notons ( x , . . . , x d ) = f ( a ) ∈ K d et Q x := ( X d − P ( x , . . . , x e , x e +1 + X e +1 , . . . , x d + X d ) ∈ K [ X e +1 , . . . , X d ] . Notons ψ : I + → K d − e le morphisme d’anneaux de coordonnées les f i ◦ ι , e
4. Borel et Tits énoncent la proposition 7.23 lorsque A est un corps infini, mais leur dé-monstration fonctionne pour un anneau quelconque. orollaire 7.25. On se place dans la situation 7.22. La clôture de Zariski del’image du morphisme de groupes SL n ( f ) : SL n ( A ) → SL n ( K d ) = SL n ( K ) d [ a k,ℓ ] ( [ f i ( a k,ℓ )] ) ≤ i ≤ d est égale au produit des groupes SL n ( f i ( A )) où f i ( A ) désigne la clôture de Za-riski dans K de l’image de f i .Démonstration. Pour tout anneau B commutatif et tout couple d’entier ( r, s ) tel que ≤ r = s ≤ n , on note e Br,s ( λ ) = 1 n + λe r,s ∈ SL n ( B ) où e r,s est lamatrice avec en position ( r, s ) et ailleurs. Soit L = Q ≤ i ≤ d f i ( A ) ⊂ K d .Les e Lr,s ( λ ) , λ ∈ L , ≤ r = s ≤ n , engendrent le sous-groupe SL n ( L ) de SL n ( K d ) = SL n ( K ) d . Pour démontrer le corollaire, il suffit donc de montrerque tout polynôme P défini sur l’espace vectoriel M n ( K ) d et s’annulant sur SL n ( f )( A ) , s’annule sur l’image de l’application e L : L N → SL n ( L ) ⊂ M n ( K d ) définie par : e L ( λ , . . . , λ N ) = Y ≤ k ≤ N e L ( i k ,j k ) ( λ k ) , et ceci pour tous les N > et tous les couples ( i k , j k ) . Mais on a un carrécommutatif (où e A est la « même » application que e L , définie sur A ) A Ne A (cid:15) (cid:15) f N / / L Ne L (cid:15) (cid:15) SL n ( A ) SL n ( f ) / / SL n ( L ) de sorte que si P s’annule sur l’image de SL n ( f ) , alors P ◦ e L s’annule surl’image de f N . Comme P ◦ e L est un polynôme, il s’annule sur L N d’après lecorollaire 7.24, donc P s’annule sur l’image de e L .Le théorème suivant généralise à un anneau quelconque (en ajoutant l’hy-pothèse de régularité « EML-polynomiale ») le cas spécial linéaire d’un résultatde Borel et Tits [8, Cor 10.4]. Théorème 7.26. Soient A un anneau commutatif, tel que K est un corps dedécomposition de P ( A ) . Soit M une représentation K -linéaire de dimensionfinie de SL n ( A ) . On suppose que M est EML-polynomiale. Alors M est simplesi et seulement si elle peut s’écrire comme un produit tensoriel M ≃ M [ φ ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ φ m ] m où les M i sont des représentations élémentaires non triviales de SL n ( K ) , et les φ i : A → K sont des morphismes d’anneaux. (La représentation simple triviales’obtient comme un produit vide). De plus, les morphismes φ i et les M i sontuniquement déterminés (à une permutation des indices près). Enfin, si M estsimple, elle est absolument simple.Démonstration. L’existence de la décomposition se déduit du théorème 7.20 parrestriction de M n ( A ) à SL n ( A ) . 47éciproquement, soit M = M [ φ ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ φ m ] m . Supposons tout d’abord car K = 0 . D’après la propriété de densité du corollaire 7.25, il suffit de montrerque M ⊗ · · · ⊗ M m est simple comme représentation de SL n ( K ) m . Pour cela,il suffit de montrer que chaque M k est absolument simple comme représenta-tion de SL n ( K ) , ce qui suit du fait qu’en caractéristique nulle, les foncteursélémentaires sont les foncteurs de Schur (proposition B.1), et induisent doncdes représentations simples de SL n ( K ) (voir par exemple [26, Chap. 6]). Si K est de caractéristique p > , on se réduit de même en utilisant le corollaire7.25 à démontrer que si F ⊂ K est un corps de cardinal supérieur à p r , alorstout produit tensoriel N [ φ ]0 ⊗ · · · ⊗ N [ φ r ] r − où les N i sont des représentationsélémentaires de SL n ( K ) , est encore simple après restriction à SL n ( F ) . Mais lesreprésentations élémentaires du groupe algébrique GL n,K sont des représenta-tions de plus haut poids p -restreints (cf proposition B.3), et donnent donc parrestriction des representations simples de SL n,K de plus haut poids p -restreints.L’absolue simplicité du produit tensoriel découle alors du théorème de Steinberg[55, Thm 7.4] [32, Thm 2.11] décrivant la restriction des représentations simplesdu groupe algébrique SL n,K aux groupes SL n ( F ) .Enfin, d’après le corollaire 7.25, si on considère deux produits tensoriels M = M [ f ]1 ⊗ · · · ⊗ M [ f d ] d et N = N [ f ]1 ⊗ · · · ⊗ N [ f d ] d où les M i , N i sont desreprésentations polynomiales au sens classique du groupe algébrique GL n,K ,alors la restriction le long de f = Q ≤ i ≤ d f i : A → L = Q ≤ i ≤ d f i ( A ) induit unisomorphisme Hom K [ SL n ( L )] ( M ⊗ · · · ⊗ M d , N ⊗ · · · ⊗ N d ) ≃ Hom K [ SL n ( A )] ( M, N ) . Si les M i et les N i sont de dimension finie, alors le terme de gauche est lui-même isomorphe au produit tensoriel des Hom K [ SL n ( f i ( A )] ( M i , N i ) . L’unicitéde la décomposition de M , et l’absolue simplicité de M en découlent. Remarque . Le recours au théorème de Steinberg [55, Thm 7.4] dans ladémonstration précédente n’est nécessaire que si des corps finis apparaissentcomme quotients de A . Dans le cas contraire, on peut remplacer l’utilisationde ce théorème par l’observation élémentaire que sur un corps infini, les repré-sentations (rationnelles) de SL n,K forment une sous-catégorie pleine stable parsous-quotient de K [ SL n ( K )] - Mod . Proposition 7.28. Soient A un anneau commutatif et ϕ : A → K une fonctionpolynomiale (au sens d’Eilenberg-Mac Lane) de degré d > et multiplicative ausens où ϕ ( xy ) = ϕ ( x ) ϕ ( y ) pour tous x , y ∈ A . Alors il existe une extension finiede corps commutatifs K ⊂ L de degré au plus d ! et des morphismes d’anneaux f i : A → L , pour ≤ i ≤ d , tels que ∀ x ∈ A ϕ ( x ) = d Y i =1 f i ( x ) . De plus, on dispose du résultat d’unicité suivant : si g , . . . , g r : A → L sontdes morphismes d’anneaux tels que ∀ x ∈ A ϕ ( x ) = r Y i =1 g i ( x ) , n a r = d et il existe une permutation σ ∈ S d telle que g i = f σ ( i ) pour tout i dans chacun des deux cas suivants :1. car( K ) = 0 ;2. car( K ) = p > et pour tout indice i , l’ensemble { j | g j = g i } est decardinal strictement inférieur à p .Démonstration. Le morphisme ϕ définit une représentation absolument simpleEML-polynomiale de dimension sur K du monoïde multiplicatif M ( A ) , notée K [ φ ] . Si K est un corps de décomposition de P ( A ) , alors d’après le théorème7.20, K [ φ ] se décompose comme un produit tensoriel M [ φ ]1 ⊗ . . . M [ φ n ] n , où les M i sont des représentations élémentaires de degrés d i et de dimension . Doncpour tout a ∈ A on a ϕ ( a ) = φ ( a ) d . . . φ n ( a ) d n avec d = P d i , d’où l’existence.Dans le cas où K n’est pas un corps de décomposition de P ( A ) , La démons-tration de l’existence de la décomposition est la même que dans le théorème 7.20(pour n = 1 ), en utilisant le théorème 7.8 (et de la proposition 7.4 pour la bornesur le degré — cf. remarque 7.9) au lieu du théorème 7.5 (noter qu’il n’y a pasbesoin de filtration car le foncteur considéré prend une valeur de dimension ).Pour établir le résultat d’unicité, quitte à plonger K dans sa clôture algé-brique, on peut supposer K algébriquement clos. Écrivons φ ( x ) = Q ri =1 g a i i oùles g i sont des morphismes d’anneaux A → K deux à deux distincts et a i ∈ N ∗ avec car( K ) = 0 , ou a i < car( K ) pour tout i . Cela implique que la puissance sy-métrique S a i (sur K ) est un endofoncteur élémentaire des K -espaces vectoriels,donc que S a i ( K ) est une représentation élémentaire de M ( K ) . Notre décompo-sition se traduit donc par un isomorphisme K [ ϕ ] ≃ S a ( K ) [ g ] ⊗ · · · ⊗ S a r ( K ) [ g r ] et l’unicité découle alors de l’unicité dans le théorème 7.20. Remarque . En caractéristique p > , la décomposition n’est pas nécessai-rement unique si l’on ne fait aucune hypothèse. Toutefois, si l’on impose que lenombre r de facteurs égale le degré d (c’est-à-dire P i a i = d avec les notationsci-dessus) de la fonction polynomiale ϕ , alors on a nécessairement unicité, carcela implique a i < p pour tout i — sinon, comme a pj est un morphisme d’an-neaux, la fonction ϕ serait de degré polynomial au plus ( P i a i )+1 − p < d . Ainsi,la propriété d’unicité de la proposition 7.28 implique celle de la proposition 5de l’introduction. Remarque . La proposition 7.23 de Borel-Tits peut être obtenue commeconséquence de l’unicité de la proposition 7.28 de la façon suivante. Soient f i : A → K des morphismes d’anneaux d’images infinies vérifiant les hypothèses(H1) ou (H2) de la situation 7.22. Si d = ( d , . . . , d n ) ∈ N n , on note ψ d ( a ) =( a ) = f ( a ) d . . . f n ( a ) ( d n ) . Alors les fonctions ψ d : A → K sont des caractèresdu monoïde multiplicatif A , qui sont deux à deux distincts d’après la proposi-tion 7.28 (si Car( K ) = p > , il faut écrire f i ( a ) di = Q ≤ i ≤ k ( φ k ◦ f i )( a ) α k ( d i ) ,où φ désigne le morphisme de Frobenius et les α k ( d i ) ∈ [0 , p − sont les chiffresde la décomposition p -adique de d i , pour pouvoir appliquer la proposition). Laproposition 7.23 découle alors de l’indépendance linéaire des caractères d’unmonoïde [10, Chap V,§6, cor 1].Dans ce qui suit, on reformule une partie des résultats de la proposition 7.28.Nous introduisons à cet effet quelques notations. Si A et B sont des anneaux,notons P ol µ ( A, B ) l’ensemble des applications f : A → B polynomiales (ausens d’Eilenberg-Mac Lane) qui préservent la multiplication ( f ( xy ) = f ( x ) f ( y ) x , y dans A ) et l’unité. La multiplication (point par point) fait de P ol µ ( A, B ) un sous-monoïde du monoïde multiplicatif sous-jacent à l’anneau P ol ( A, B ) . Si l’on suppose B commutatif, il est commutatif, de sorte que l’in-clusion dans P ol µ ( A, B ) de l’ensemble Ann ( A, B ) des morphismes d’anneauxde A dans B s’étend de façon unique en un morphisme de monoïdes commutatifs Φ A,B : N [ Ann ( A, B )] → P ol µ ( A, B ) , où N [ E ] désigne le monoïde commutatiflibre sur un ensemble E . L’énoncé suivant découle directement de la proposi-tion 7.28. Corollaire 7.31. Soit A un anneau commutatif.1. Si K est algébriquement clos, le morphisme de monoïdes Φ A,K est sur-jectif.2. Si K est de caractéristique nulle, alors Φ A,K est injectif.3. Si K est de caractéristique p > , notons Ann ( A, K ) le quotient de l’en-semble Ann ( A, K ) par la relation d’équivalence engendrée par f ∼ f p , etchoisissons une section à la projection de façon à voir Ann ( A, K ) commeun sous-ensemble de Ann ( A, K ) . Alors la restriction à N [ Ann ( A, K )] de Φ A,K est injective. Notons G ( K ) le monoïde des endomorphismes de corps de K (qui est ungroupe si K est algébriquement clos et de degré de transcendance fini sur sonsous-corps premier, ou de degré fini sur son sous-corps premier). Comme précé-demment, on dispose d’un morphisme d’anneaux χ K : Z [ G ( K )] → End( K × ) , etl’image du sous-semi-anneau N [ G ( K )] de Z [ G ( K )] est incluse dans l’ensembledes morphismes multiplicatifs K × → K × qui se prolongent en une fonctionpolynomiale K → K . Corollaire 7.32. 1. Si K est algébriquement clos, alors χ K ( N [ G ( K )]) estexactement l’ensemble des morphismes multiplicatifs K × → K × qui seprolongent en une fonction polynomiale K → K .2. Si K est de caractéristique nulle, alors χ K est injectif.3. Si K est de caractéristique p > , alors le noyau de χ K est l’idéal (bi-latère) de Z [ G ( K )] engendré par l’élément central φ − p , où φ ∈ G ( K ) désigne le morphisme de Frobenius. Un objet de F ( A ; K ) est dit de longueur finie s’il possède une filtration finiedont les sous-quotients sont simples. Sous de fortes hypothèses de noethéria-nité locale , on montre (très) facilement que les foncteurs de longueur finie de F ( A ; K ) possèdent de bonnes propriétés, en particulier : • si les catégories F ( A ; K ) et F ( A op ; K ) sont localement noethériennes,alors le produit tensoriel de deux foncteurs de longueur finie et à valeursde dimension finie est un foncteur de longueur finie (cf. proposition 8.37), 5. Nous renvoyons le lecteur à la section 8.2 pour des rappels détaillés sur les propriétésde finitude classiques des catégories. si la catégorie F ( A ; K ) est localement noethérienne, alors tout foncteurde longueur finie est pf ∞ , c’est-à-dire admet une résolution par des pro-jectifs de type fini (cf. lemme 8.11).Cependant, les catégories F ( A ; K ) sont rarement localement noethériennes.Ainsi, nous montrons dans la proposition 8.17 que si F ( A ; K ) est localementnoethérienne, alors les ensembles de morphismes de A sont nécessairement fi-nis. Afin de traiter les cas où les catégories F ( A ; K ) ne sont pas localementnoethériennes, nous introduisons les hypothèses suivantes. Notation 8.1. Soient A une petite catégorie additive, K un corps commutatifet k un anneau commutatif. Nous considérerons les hypothèses suivantes : • lnc ( A , K ) : pour tout idéal K -cotrivial I de A , la catégorie F ( A / I ; K ) est localement noethérienne. • lna ( A , k ) : la catégorie Add ( A ; k ) est localement noethérienne. • pfa ( A , K ) : tous les foncteurs simples à valeurs de dimension finie de lacatégorie Add ( A ; K ) sont de présentation finie dans Add ( A ; K ) . • tfa ( A , K ) : pour tout idéal K -cotrivial I et tout objet x de A , le foncteur I ( x, − ) est de type fini.S’il n’y a pas d’ambiguïté possible, il nous arrivera de noter simplement lnc au lieu de lnc ( A , K ) , et de même pour lna , pfa et tfa . Remarque . i) Les lettres ln (resp. pf , tf ) abrègent la propriété localementnoethérienne (resp. de présentation finie , de type fini ), et a (resp. c ) indiquequ’elle se rapporte aux foncteurs additifs (resp. aux idéaux K - cotriviaux ).ii) Pour l’hypothèse tfa ( A , K ) , il est équivalent de demander que I ( x, − ) soit de type fini dans F ( A ; Z ) ou dans Add ( A ; Z ) .iii) Les trois dernières hypothèses sont reliées par des implications évidentes lna ( A , K ) ⇒ pfa ( A , K ) et lna ( A , Z ) ⇒ tfa ( A , K ) .Nous donnons maintenant des exemples où les hypothèses de la notation 8.1sont vérifiées. Le premier montre que ces hypothèses sont plus faibles que lanoethérianité locale de F ( A , K ) , les suivants donnent des cas intéressants oùces hypothèses sont vérifiées sans que F ( A , K ) soit localement noethérienne. Exemple . Si la catégorie F ( A ; K ) est localement noethérienne, alors leshypothèses lnc ( A , K ) , lna ( A , Z ) , lna ( A , K ) , pfa ( A , K ) et tfa ( A , K ) sontsatisfaites. (Ce résultat sera démontré dans la proposition 8.16). Exemple . Soient A un anneau, A = P ( A ) , K un corps commutatif, et k unanneau commutatif. • L’hypothèse lnc ( P ( A ) , K ) est vérifiée. En effet, comme les idéaux K -cotriviaux de P ( A ) proviennent d’idéaux bilatères à quotient fini de A , ilsuffit de vérifier que F ( A, K ) est localement noethérienne pour tout an-neau fini A . Ce profond résultat de finitude a été démontré par Putman-Sam [50, théorème C] (voir aussi Sam-Snowden [51, corollaire 8.3.3]). • L’hypothèse lna ( P ( A ) , k ) est vérifiée si et seulement si A op ⊗ Z k estun anneau noethérien à gauche. En effet, la proposition 1.7 fournit uneéquivalence de catégories Add ( P ( A ) , k ) ≃ ( A op ⊗ Z k ) - Mod .En revanche, la noethérianité locale de F ( A, K ) peut tomber en défaut, parexemple si A n’est pas un anneau fini, d’après la proposition 8.17. Exemple . Soient K un corps commutatif, A une K -algèbre de dimensionfinie, et A = A - mod la catégorie des modules à gauche finis sur A .51 Les hypothèses lnc ( A - mod , K ) et tfa ( A - mod , K ) sont vérifiées. Eneffet, ceci se déduit facilement du fait que le seul ideal K -cotrivial de A - mod est la catégorie A - mod toute entière. • L’hypothèse pfa ( A - mod , K ) est vérifiée. Ceci est un résultat d’Auslan-der [3, corollaire 3.4 ou théorème 3.5].En revanche, si A a un type de représentation infini, Auslander a montré [3,théorème 3.12 ou 3.13] que l’hypothèse lna ( A - mod , K ) n’est pas vérifiée. Ainsi F ( A - mod , K ) n’est pas localement noethérienne d’après l’exemple 8.3. Exemple . Soient K un corps commutatif, et A une petite catégorie additivequi n’a pas d’autre idéal K -cotrivial que A (par exemple A est une catégorie F -linéaire, où F est un corps infini, ou le corps premier de K ). Alors les propriétés lnc ( A , K ) et tfa ( A , K ) sont vérifiées.En utilisant nos théorèmes de décomposition tensorielle 3.4 et 7.5, nous par-venons à établir des propriétés des foncteurs de longueur finie (en ajoutantl’hypothèse qu’ils prennent des valeurs de dimension finie) sous les hypothèsesde la notation 8.1. Les résultats principaux sont les suivants. Théorème 8.7. Si les hypothèses lnc ( A , K ) et lnc ( A op , K ) sont vérifiées,alors la classe des foncteurs de longueur finie de F df ( A ; K ) est stable par produittensoriel. Le théorème 8.7 s’applique en particulier à A = P ( A ) , où A est un anneauarbitraire, d’après l’exemple 8.4.Le théorème suivant concerne la propriété de présentation finie (une formefaible de la propriété pf ∞ ). La troisième assertion du théorème 8.8 est uneréciproque partielle de la deuxième assertion, qui montre que les hypothèses lnc , pfa et tfa ne sont pas loin d’être les hypothèses optimales pour obtenirque tous les foncteurs de longueur finie et à valeurs de dimension finie sont deprésentation finie. Théorème 8.8. 1. La propriété pfa est vérifiée si et seulement si tous lesfoncteurs polynomiaux de longueur finie et à valeurs de dimension finiede F ( A ; K ) sont de présentation finie.2. Si les propriétés lnc , pfa et tfa sont vérifiées alors tous les foncteursde longueur finie et à valeurs de dimension finie de F ( A ; K ) sont deprésentation finie.3. Si A = P ( A ) pour un anneau A , et si tous les foncteurs de longueur finieet à valeurs de dimension finie de F ( A ; K ) sont de présentation finie,alors les propriétés lnc , pfa et tfa sont vérifiées. Le théorème 8.9 ci-dessous s’applique en particulier à A = P ( A ) , si A estun anneau commutatif de type fini, ou plus généralement si les anneaux A op et A op ⊗ Z K sont noethériens à gauche, d’après l’exemple 8.4. Nous ne connaissonspas de démonstration directe de ce résultat, même lorsque A = P ( Z ) . Théorème 8.9. Si les hypothèses lnc ( A , K ) , lna ( A , Z ) et lna ( A , K ) sontvérifiées, alors tous les foncteurs de longueur finie et à valeurs de dimensionfinie de F ( A ; K ) sont pf ∞ . 52a suite de la section 8 est organisée de la façon suivante. Dans la section8.2, nous rappelons des définitions et des énoncés classiques sur les propriétésde finitude des catégories.Les sections 8.3 et 8.4 sont ensuite consacrées à la discussion de divers liensentre les propriétés lna , lnc , pfa et tfa , ainsi que les propriétés de nothéria-nité locale et de finitude locale de F ( A ; K ) . Nous en profitons pour démontrer(et placer dans une perspective plus large) un résultat qui n’est pas annoncéci-dessus : la conjecture 6.13 sur les fonctions de dimensions, lorsque A est un p -anneau fini semi-simple.Enfin, les sections 8.5 et 8.6 sont consacrées à la démonstration des troisthéorèmes principaux énoncés ci-dessus. Hormis pour une partie de la démons-tration du théorème 8.8, on n’y utilise pas les résultats des sections 8.3 et 8.6.Le lecteur souhaitant accéder directement aux démonstrations des théorèmes8.7 et 8.9 peut donc sauter la lecture des sections 8.3 et 8.4. Objets noethériens, artinniens et finis. Un objet d’une catégorie de Gro-thendieck E est noethérien (resp. artinien ) si toute famille de sous-objets possèdeun élément maximal (resp. minimal) pour l’inclusion. La classe des objets noe-thériens (resp. artiniens) de E est stable par somme directe finie, sous-quotientet extensions. Un objet de E est noethérien (resp. artinien) si et seulement sitous ses sous-objets (resp. tous ses quotients) sont de type fini (resp. de typecofini). Un objet de E est de longueur finie (on dira souvent simplement fini dans la suite) si et seulement s’il est noethérien et artinien. De manière équiva-lente, un objet est fini si et seulement s’il possède une filtration finie dont lessous-quotients sont simples.La catégorie E est dite localement noethérienne (resp. localement finie , loca-lement artinienne , localement de type fini ) si elle est engendrée par ses objetsnoethériens (resp. finis, artiniens, de type fini). Par exemple, si A est un an-neau, la catégorie des A -modules à gauche est localement noethérienne (resp.localement finie, ou localement artinienne) si et seulement si A est noethérien(resp. artinien) à gauche. La propriété pf n .Définition 8.10. Soit n ∈ N ∪ {∞} . Un objet X de E est dit de n -présentationfinie ou, en abrégé, pf n , si pour tout foncteur Φ d’une petite catégorie filtrante I vers E , le morphisme canonique colim I Ext i E ( X, − ) ◦ Φ → Ext i E ( X, colim I Φ) est bijectif pour i < n et est injectif pour i = n (si n < ∞ ).Par définition, les objets pf sont les objets de type fini. Pour n > , ilsuffit d’exiger que les morphismes canoniques soient bijectifs pour i < n , ce quiimplique l’injectivité pour i = n par des arguments formels. En particulier, lesobjets pf sont les objets de présentation finie.Lorsque la catégorie E est engendrée par des objets projectifs de type fini(comme c’est le cas pour F ( C ; k ) si C est une petite catégorie et k est un anneau),53n objet X est pf n si et seulement s’il existe une suite exacte · · · → P i → P i − → · · · → P → P → X → où les P i sont projectifs de type fini pour i ≤ n . Le lemme suivant est classique. Lemme 8.11. Si E est une catégorie de Grothendieck localement noethérienne,alors tous les objets de type fini (en particulier les objets finis) sont pf ∞ . Le produit tensoriel de deux objets projectifs du type P t A est encore dumême type, ce dont on déduit que le produit tensoriel de deux foncteurs pf n de F ( A ; K ) est encore pf n . Changement de base. Les lemmes classiques suivants permettent de rame-ner l’étude des propriétés de finitude dans des catégories de foncteurs du type F ( C ; K ) ou Add ( A ; K ) , au cas où le corps K est assez gros. Lemme 8.12. Soient C une petite catégorie, K ⊂ L une extension de corpscommutatifs et F un foncteur de F ( C ; K ) .1. Si F est un foncteur de longueur finie de F df ( C ; K ) , alors F ⊗ L est delongueur finie dans F df ( C ; L ) .2. Si F ⊗ L est fini (resp. noethérien, artinien) dans F ( C ; L ) , alors il en estde même pour F dans F ( C ; K ) .3. Soit n ∈ N ∪ {∞} . Le foncteur F est pf n dans F ( C ; K ) si et seulementsi F ⊗ L est pf n dans F ( C ; L ) .Démonstration. Notons α : F ( C ; K ) → F ( C ; L ) le foncteur de post-compositionpar le foncteur d’extension des scalaires − ⊗ L : K - Mod → L - Mod . Comme α est un foncteur exact, il suffit de montrer la première assertion lorsque F est simple , auquel cas End ( F ) est un corps (non nécessairement commutatif)qui est une K -algèbre de dimension finie , disons d , puisque F est à valeurs dedimension finie. On voit alors, en utilisant des arguments déjà employés dans lasection 2, que α ( F ) est fini, de longueur majorée par d : si T est un quotient de α ( F ) , l’image G de T par le foncteur d’oubli β : F ( C ; L ) → F ( C ; K ) est semi-simple isotypique de type F (comme celle de α ( F ) ). Il s’ensuit que le foncteur F ( C ; L )( α ( F ) , − ) ≃ F ( C ; K )( F, − ) ◦ β : F ( C ; L ) → L - Mod a une restriction àla sous-catégorie pleine des sous-quotients de sommes directes finies de copies de F qui est exacte et fidèle. Comme l’image de F par ce foncteur est L ⊗ End( F ) ,qui est de longueur finie d dans la catégorie des L -espaces vectoriels, on obtientbien le résultat souhaité.Comme le foncteur α est exact et fidèle, il induit une fonction strictementcroissante entre ensembles de sous-objets ordonnés par inclusion, ce qui établitla deuxième assertion. Du fait que α commute également aux colimites, on endéduit aussi que F est de type fini si c’est le cas de α ( F ) .Par ailleurs, α préserve les foncteurs projectifs de type fini (et est exact), desorte que, si F est pf n , alors α ( F ) est pf n .La réciproque se montre par récurrence sur n : le cas n = 0 est traité ci-dessus, et le cas général provient de ce que si F est de type fini, on peut trouverune suite exacte courte → G → P → F → avec P projectif de type fini, desorte que F est pf n si et seulement si G est pf n − . L’application du foncteurexact α à cette suite et l’hypothèse de récurrence permettent de conclure.54 emarque . On notera que la petite catégorie source C peut être quelconque(ce qui n’est pas le cas si l’on recherche un bon comportement de la propriété pf n relativement au produit tensoriel, par exemple), et que l’extension de corps K ⊂ L n’a pas besoin d’être finie. Si l’on suppose de plus l’extension finie, onpeut s’affranchir de l’hypothèse de valeurs de dimension finie dans la premièreassertion.La démonstration du résultat suivant est laissée au lecteur. Lemme 8.14. Soient K ⊂ L une extension finie de corps commutatifs et n ∈ N ∪ {∞} . Notons Φ : Add ( A ; L ) → Add ( A ; K ) le foncteur de restriction desscalaires au but.1. Le foncteur Φ préserve les foncteurs de longueur finie et les foncteurs àvaleurs de dimension finie.2. Un foncteur F de Add ( A ; L ) est pf n si et seulement si Φ( F ) est pf n .Remarque . Les lemmes 8.12 et 8.14 sont susceptibles de généralisationsdans lesquelles la catégorie F ( C ; K ) (resp. Add ( A ; K ) ) est remplacée par unecatégorie de Grothendieck K -linéaire E et F ( C ; L ) (resp. Add ( A ; L ) ) par E L (cf.remarque 2.11). On notera de plus que toute catégorie F ( C ; K ) est équivalenteà une catégorie du type Add ( A ; K ) (considérer la catégorie préadditive Z [ C ] etprendre pour A la catégorie additive associée). K -cotriviaux Dans cette sous-section, on discute des propriétés lnc , lna , pfa et tfa .On montre d’abord que ces propriétés sont plus faibles que la noethérianité de F ( A ; K ) . Puis on étudie les relations entre lnc et la propriété suivante : • lfc ( A , K ) : pour tout idéal K -cotrivial I ⊳ A , la catégorie F ( A / I ; K ) est localement finie.Nous discutons ensuite de l’optimalité des hypothèses du théorème 8.8. La pro-priété lfc joue un rôle clé dans la discussion de la nécessité de tfa pour obtenirdes résultats sur les présentations finies dans F ( A ; K ) . Conséquences de la noethérianité locale de F ( A ; K ) . La propositionsuivante montre que si F ( A ; K ) est localement noethérienne, alors lnc ( A ; K ) , lna ( A , Z ) , et lna ( A ; K ) (et donc pfa ( A ; K ) et tfa ( A ; K ) ) sont vérifiées. Proposition 8.16. Soit A une petite catégorie additive et E une catégorie deGrothendieck non nulle. Supposons que Fct ( A , E ) est localement noethérienne(resp. localement finie). Alors les categories suivantes sont également localementnoethériennes (resp. localement finies) : (i) les catégories Fct ( A / I , E ) pour toutidéal I ⊳ A , (ii) la catégorie Add ( A , E ) , et (iii) la catégorie Add ( A , Z ) .Démonstration. Pour (i) et (ii), la propriété de noethérianité locale provient dufait que les catégories en question s’identifient à des sous-catégories pleines de Fct ( A , E ) . Pour (iii), on utilise que la catégorie E est nécessairement localementnoethérienne (considérer les foncteurs constants), il existe donc un objet noethé-rien non nul M dans E . Le foncteur M [ A ( x, − )] est alors de type fini pour toutobjet x de A , donc noethérien. Cela implique que le foncteur additif A ( x, − ) est noethérien, car M [ − ] définit un foncteur Add ( A ; Z ) → Fct ( A , E ) qui induit55es fonctions strictement croissantes entre ensembles de sous-foncteurs ordonnéspar inclusion. Le cas localement fini se démontre de la même façon.La proposition suivante montre que la noethérianité locale de F ( A ; K ) estun phénomène relativement exceptionnel. Proposition 8.17. Si la catégorie F ( A ; K ) est localement noethérienne, alorstous les ensembles de morphismes de A sont finis.Démonstration. Comme A ( x, y ) ⊂ A ( x ⊕ y, x ⊕ y ) , il suffit de montrer que pourtout objet x de A , l’anneau End A ( x ) est fini.Si A est un anneau, on note A µ le monoïde multiplicatif sous-jacent. Pourtout n ≥ , on a un isomorphisme d’anneaux End A ( x ⊕ n ) ≃ M n (End A ( x )) .Le foncteur F ( A ; K ) → K [ M n (End A ( x )) µ ] - Mod induit par l’évaluation sur x ⊕ n est réflexif d’après la proposition 1.5. La noetherianité locale de F ( A ; K ) implique donc la noethérianité locale de K [ M n (End A ( x )) µ ] - Mod . La finitudede End A ( x ) découle alors du lemme 8.18 ci-dessous. Lemme 8.18. Soient A et k des anneaux, avec k non nul, et n ≥ un entier.Notons M n ( A ) µ le monoïde multiplicatif des matrices carrées de taille n à co-efficients dans A . Si l’anneau k [ M n ( A ) µ ] est noethérien à gauche, alors A estfini.Démonstration. L’anneau B := M n ( A ) est noethérien (à gauche). En effet, ondéfinit une fonction strictement croissante de l’ensemble des idéaux à gauche de B dans l’ensemble des idéaux à gauche de k [ B µ ] en envoyant un idéal I de B sur le noyau de la projection k [ B ] ։ k [ B/I ] .Comme B est noethérien, le produit de deux éléments de B n’est inversibleque si les éléments sont inversibles. On dispose donc d’un morphisme surjectifd’anneaux k [ B µ ] ։ k [ GL n ( A )] (envoyant les matrices non inversibles sur ).Ainsi k [ GL n ( A )] est noethérien.Pour montrer que A est fini, on va utiliser la propriété (P) suivante (qui seprouve en utilisant l’extension des scalaires de k [ H ] à k [ G ] , et le fait que k [ G ] est un k [ H ] -module fidèlement plat) :(P) Soit H un sous-groupe d’un groupe G . Si k [ G ] est noethérien, alors k [ H ] est noethérien.Comme le groupe additif A add sous-jacent à A se plonge dans GL n ( A ) , la pro-priété (P) implique que k [ A add ] est noethérien, donc que le groupe abélien A add est de type fini. Si le groupe A add n’était pas fini, le morphisme canonique Z → A serait injectif, d’où une injection GL ( Z ) → GL n ( A ) , et pour tout sous-groupe H de GL n ( Z ) , k [ H ] serait noethérien d’après (P). Mais il est classiqueque GL ( Z ) contient un groupe libre à deux générateurs, donc un groupe librede rang infini, dont la k -algèbre n’est pas noethérienne. On en conclut que A add doit être fini. Propriétés lnc et lfc . L’implication lfc ( A ; K ) ⇒ lnc ( A ; K ) est évi-dente. La proposition 8.20 ci-dessous étudie les conditions d’une réciproque. Lemme 8.19. On suppose que, pour tous objets x et y de A , le groupe abélien A ( x, y ) est fini et que A ( x, y ) ⊗ Z K est nul. . Si K contient les racines de l’unité, alors on dispose d’un isomorphisme K [ A ( x, − )] ≃ K A ( x, − ) ♯ dans F ( A ; K ) pour tout objet x de A , où ( − ) ♯ =Hom Z ( − , Q / Z ) désigne la dualité des groupes abéliens finis.2. Si la catégorie Add ( A ; Z ) est localement artinienne, alors le foncteur K [ A ( x, − )] de F ( A ; K ) est de type cofini pour tout objet x de A .Démonstration. Si K contient les racines de l’unité et que V est un groupeabélien fini tel que V ⊗ Z K = 0 , alors V ♯ est naturellement isomorphe au groupeabélien des morphismes de V vers le groupe multiplicatif K × . De plus, K [ V ] estune K -algèbre semi-simple naturellement isomorphe à l’algèbre produit K V ♯ .Cela fournit la première assertion.Commençons par montrer la deuxième assertion lorsque K contient les ra-cines de l’unité : si Add ( A ; Z ) est localement artinienne, alors le foncteur additifde type fini A ( x, − ) est artinien pour tout x ∈ Ob A . Il s’ensuit que son dual A ( x, − ) ♯ est un foncteur noethérien, donc de type fini, de Add ( A op ; Z ) , c’est-à-dire qu’il est isomorphe à un quotient d’un foncteur du type A ( − , t ) . Il s’ensuitque K A ( x, − ) ♯ est isomorphe à un sous-foncteur de K A ( − ,t ) (dans F ( A ; K ) ), etest donc de type cofini.Traitons maintenant le cas général : soit K ⊂ L une extension de corpscommutatifs, où L contient les racines de l’unité. Le foncteur L [ A ( x, − )] est detype cofini dans F ( A ; L ) , donc à co-support fini. Il s’ensuit qu’il est égalementà co-support fini dans F ( A ; K ) , donc son sous-foncteur K [ A ( x, − )] possède lamême propriété. Comme un foncteur à co-support fini et à valeurs de dimensionfinie est de type cofini, cela achève la démonstration. Proposition 8.20. On suppose que, pour tous objets x et y de A , le groupeabélien A ( x, y ) est fini et que A ( x, y ) ⊗ Z K est nul. On suppose également queles catégories F ( A ; K ) et F ( A op ; K ) sont localement noethériennes. Il y a alorséquivalence entre les assertions suivantes.1. La catégorie F ( A ; K ) est localement finie.2. La catégorie Add ( A ; Z ) est localement finie.3. La catégorie Add ( A ; Z ) est localement artinienne.Démonstration. ⇒ ⇒ ⇒ 1. Soit x un objet de A . Le foncteur de type fini P x A de F ( A ; K ) est noethérien puisque cette catégorie est localement noethérienne. Lelemme 8.19 montre par ailleurs qu’il est de type cofini. Comme il est à valeursde dimension finie, cela signifie que son dual K A ( x, − ) est de type fini dans lacatégorie localement noethérienne F ( A op ; K ) , donc noethérien. En reprenant ledual on en déduit que P x A est artinien. Par conséquent, les générateurs P x A de F ( A ; K ) sont finis et cette catégorie est localement finie. Optimalité des hypothèses du théorème 8.7. La nécessité de pfa pourobtenir des présentations finies des foncteurs finis à valeurs de dimension finiede F ( A ; K ) est facile à comprendre, et expliquée dans le lemme suivant. Lemme 8.21. Si tous les simples polynomiaux finis à valeurs de dimensionfinie de F ( A ; K ) sont de présentation finie, alors pfa ( A ; K ) est satisfaite. émonstration. Comme la sous-catégorie Add ( A ; K ) de F ( A ; K ) est pleine etstable par colimites, un objet de Add ( A ; K ) de présentation finie dans F ( A ; K ) est automatiquement de présentation finie dans Add ( A ; K ) .Le rôle de tfa est plus délicat à comprendre. Le corollaire 8.25 ci-dessousmontre que si lnc est satisfaite, alors tfa est bien nécessaire pour obtenir desprésentations finies des foncteurs finis à valeurs de dimension finie de F ( A ; K ) .Dans les énoncés suivants, on note Ab = Z - Mod . Lemme 8.22. Soient k un anneau, A, B : A → Ab des foncteurs additifs.Le morphisme canonique de k -modules (où le premier Hom est pris dans lacatégorie Add ( A ; Z ) et le deuxième dans la catégorie F ( A ; k ) ) ϕ A,B : k [Hom( A, B )] → Hom( k [ A ] , k [ B ]) est injectif. Il est bijectif si A est de type fini.Démonstration. Si A est un foncteur représentable A ( t, − ) , le lemme de Yonedaentraîne que ϕ A,B est un isomorphisme. Supposons maintenant que A est unesomme directe L i ∈ I A ( t i , − ) de tels foncteurs. On a donc Hom( A, B ) ≃ Q i ∈ I B ( t i ) .Soit x = 0 un élément de k [Hom( A, B )] ≃ k [ Q i ∈ I B ( t i )] : x peut s’écrire comme P mn =1 λ n [ ξ n ] où m ∈ N ∗ , λ n ∈ k \ { } et les ξ n sont des éléments deux àdeux distincts de Q i ∈ I B ( t i ) . Il existe donc une partie finie J de I telle que lesprojections des ξ n dans Q i ∈ J B ( t i ) soient deux à deux distinctes. Ainsi, l’imagede x dans k [Hom( A ′ , B )] , où A ′ := L i ∈ J A ( t i , − ) ≃ A ( L i ∈ J t i , − ) , par l’applicationinduite par l’inclusion A ′ ֒ → A est non nulle. Comme ϕ A ′ ,B est injective d’aprèsce qui précède, la naturalité en A de ϕ A,B implique que l’image de x par ϕ A,B est non nulle : ϕ A,B est donc injective.On en déduit l’injectivité de ϕ A,B pour tout foncteur additif A en écrivant A comme quotient d’une somme directe de foncteurs additifs représentables eten utilisant la préservation des monomorphismes par le foncteur k [ − ] .Par ailleurs, toute suite exacte Z q −→ Y p −→ X → (resp. → X → Y → Z )de groupes abéliens induit une suite exacte naturelle de k -modules k [ Y ⊕ Z ] β −→ k [ Y ] α −→ k [ X ] → (resp. → k [ X ] → k [ Y ] → k [ Z ] )où β ([( y, z )]) = [ y + q ( z )] − [ y ] et α ([ y ]) = [ p ( y )] (l’autre cas est analogue).Si A est de type fini, on peut trouver une suite exacte de Add ( A ; Z ) du type Q → P → A → , où P est représentable. On déduit de ce qui précède et de lanaturalité de ϕ un diagramme commutatif aux lignes exactes / / k [Hom( A, B )] / / ϕ A,B (cid:15) (cid:15) k [Hom( P, B )] / / ϕ P,B (cid:15) (cid:15) k [Hom( P ⊕ Q, B )] ϕ P ⊕ Q,B (cid:15) (cid:15) / / Hom( k [ A ] , k [ B ]) / / Hom( k [ P ] , k [ B ]) / / Hom( k [ P ⊕ Q ] , k [ B ]) . D’après le début de la démonstration, ϕ P,B est bijectif et ϕ P ⊕ Q,B est injectif,ce qui implique que ϕ A,B est bijectif, comme souhaité.58 emme 8.23. Soient k un anneau non nul et A : A → Ab un foncteur additif.Si le foncteur k [ A ] de F ( A ; k ) est de type fini (resp. de présentation finie),alors le foncteur A est de type fini (resp. de présentation finie) dans la catégorie Add ( A ; Z ) .Démonstration. Que k [ A ] de type fini entraîne A de type fini résulte (cf. démons-tration de la proposition 8.16) de ce que k [ − ] induit une fonction strictementcroissante entre ensembles ordonnés de sous-foncteurs.Supposons maintenant k [ A ] de présentation finie. Comme le foncteur k [ − ] : Ab → k - Mod commute aux colimites filtrantes, il en est de même pour le fonc-teur Hom( k [ A ] , − ) ◦ k [ − ] : Add ( A ; Z ) → F ( A ; k ) . Mais k [ A ] , donc A , est detype fini, d’après ce qu’on a vu plus haut. Par conséquent, le lemme 8.22 montreque Hom( k [ A ] , − ) ◦ k [ − ] ≃ k [ − ] ◦ Hom( A, − ) . Comme le foncteur k [ − ] commuteaux colimites filtrantes et reflète les isomorphismes (car k = 0 ), la commuta-tion de cette composée aux colimites filtrantes entraîne la même propriété pour Hom( A, − ) , c’est-à-dire que A est de présentation finie. Proposition 8.24. Soit I ⊳ A un idéal K -cotrivial. Supposons que la catégorie F ( A / I ; K ) est localement finie. Si tous les foncteurs du type π ∗I ( S ) sont deprésentation finie dans F ( A ; K ) , où S est un foncteur simple de F ( A / I ; K ) ,alors le foncteur I ( x, − ) : A → Ab est de type fini pour tout objet x de A .Démonstration. Comme la classe des foncteurs de présentation finie est stablepar extensions, l’hypothèse implique que π ∗I ( F ) est un foncteur de présentationfinie de F ( A ; K ) pour tout foncteur fini F de F ( A / I ; K ) . Comme cette dernièrecatégorie est supposée localement finie, pour tout x ∈ Ob A , le foncteur de typefini P x A / I est fini, de sorte que π ∗I ( P x A / I ) = K [ A ( x, − ) / I ( x, − )] est de présenta-tion finie dans F ( A ; K ) . Le lemme 8.23 montre alors que A ( x, − ) / I ( x, − ) est deprésentation finie dans Add ( A ; Z ) , c’est-à-dire que I ( x, − ) est de type fini. Corollaire 8.25. Supposons lnc ( A ; K ) vérifiée. Si tous les foncteurs simplesà valeurs de dimension finie de F ( A ; K ) (ou seulement ceux factorisant parla réduction modulo un idéal K -cotrivial) sont de présentation finie, alors lapropriété tfa ( A ; K ) est vérifiée. F ( A, K ) D’après les travaux de Putman-Sam-Snowden, les catégories F ( A, K ) sontlocalement noethériennes pour tout anneau fini A , voir [50, théorème C] et [51,corollaire 8.3.3]. En revanche, ces catégories ne sont pas toujours localementfinies : il est classique que F ( F , F ) , où F est un corps fini, est de dimensionde Krull infinie (cela découle par exemple des travaux de Powell [49]). L’énoncésuivant donne une condition pour la finitude locale. Proposition 8.26. Soit A un anneau fini tel que A ⊗ Z K = 0 . La catégorie F ( A, K ) est localement finie.Démonstration. Les catégories F ( A, K ) et F ( A op , K ) sont localement noethé-riennes, d’après les travaux de Putman-Sam-Snowden. De plus, Add ( P ( A ); Z ) est équivalente (proposition 1.7) à A op - Mod , qui est localement finie puisque A est un anneau fini. La conclusion résulte donc de la proposition 8.20.59a proposition 8.26 peut se reformuler de la manière suivante en termes dela propriété lfc introduite à la section 8.3. Corollaire 8.27. La propriété lfc ( P ( A ); K ) est vérifiée pour tout anneau A . Comme conséquence de cet énoncé, nous pouvons produire des exemples defoncteurs simples qui ne sont pas de présentation finie. Exemple . Soient k un corps fini de caractéristique différente de celle de K , A un anneau depolynômes en une infinité de variables sur k et I l’idéal d’augmentation de A .Alors I est un idéal K -cotrivial de A , qui n’est pas de type fini. Les corollaires8.27 et 8.25 montrent donc qu’il existe un foncteur simple à valeurs de dimensionfinie de F ( A, K ) , qui se factorise par la réduction modulo I , qui n’est pas deprésentation finie.Dans la suite de cette section, nous nous intéressons à deux résultats autourde la proposition 8.26. Ces résultats sont d’un intérêt propre, mais ne sont pasutilisés pour la démonstration des théorèmes 8.7, 8.8 et 8.9. Nous allons toutd’abord pouvoir préciser la conjecture 6.13, et en démontrer un cas particulier(au corollaire 8.32). Nous étudierons ensuite à la proposition 8.33 une variantede la proposition 8.26, valable pour tout anneau A . Retour sur la conjecture 6.13 sur les fonctions de dimension. Com-mençons par introduire, dans un cadre général, quelques notations (dont nousnous servirons également, dans un autre contexte, dans l’appendice A). Si A est un anneau, E un objet de P ( A ) et M une représentation de Aut A ( E ) dedimension finie sur K , définissons un foncteur de F ( A, K ) Q M := K [Inj A ( E, − )] ⊗ K [Aut A ( E )] M (12)où Inj A ( E, V ) désigne l’ensemble des monomorphismes A -linéaires scindés E → V (on fait de K [Inj A ( E, − )] un foncteur de F ( A, K ) quotient de P E P ( A ) en tuant,dans P E P ( A ) ( V ) = K [Hom A ( E, V )] , les morphismes E → V qui ne sont pas desmonomorphismes scindés). Cette construction a été introduite et étudiée (dansle cas où A = K est un corps fini) par Powell [49]. Lemme 8.29. Soit A un anneau fini tel que A ⊗ Z K = 0 . Alors pour toutereprésentation M de dimension finie de Aut A ( E ) , le foncteur Q M est fini.Démonstration. Le foncteur Q M est de type fini, puisque c’est un quotient d’unesomme directe finie de copies de P E P ( A ) . Il est fini car F ( A ; K ) est localementfinie d’après la proposition 8.26.Le lemme 8.29 nous permet de formuler la conjecture suivante. Conjecture 8.30. Sous les hypothèses du lemme 8.29, les classes des foncteurs Q M , lorsque M parcourt les représentations simples sur K des différents groupesd’automorphismes d’objets de P ( A ) , engendrent le groupe de Grothendieck desobjets finis de F ( A, K ) . Proposition 8.31. La conjecture 8.30 implique la conjecture 6.13. émonstration. Soit A un p -anneau fini, où p est un nombre premier différent dela caractéristique de K . Il suffit de démontrer que, si M est une représentationde dimension finie sur K de Aut A ( E ) , pour un objet E de P ( A ) , la fonctionde dimension d Q M peut s’exprimer sous la forme n f ( p n ) où f est unefonction polynomiale. Pour tout objet V de P ( A ) , le Aut A ( E ) -ensemble à droite Inj A ( E, V ) est libre , de sorte que d Q M ( n ) = | Inj A ( E, A n ) || Aut A ( E ) | . dim K ( M ) où | T | désigne le cardinal d’un ensemble fini T . Il suffit donc de montrer que lafonction n 7→ | Inj A ( E, A n ) | est de la forme précédente.Notons J le radical de Jacobson de A . La réduction modulo J induit, pourtout A -module à gauche V , une surjection Hom A ( E, V ) → Hom A/J ( E/J.V, V /J.V ) dont chaque fibre est équipotente à Hom A ( E, J.V ) ; de plus, un élément de Hom A ( E, V ) appartient à Inj A ( E, V ) si et seulement si son image appartient à Inj A/J ( E/J.V, V /J.V ) . Il s’en suit que ∀ n ∈ N | Inj A ( E, A n ) | = | Inj A/J ( E/J.E, ( A/J ) n ) | . | Hom A ( E, J ) | n ; comme Hom A ( E, J ) est un p -groupe abélien fini, il suffit donc de vérifier que lafonction n 7→ | Inj A/J ( E/J.E, ( A/J ) n ) | est du type n f ( p n ) pour une fonctionpolynomiale f . Mais le théorème de structure des anneaux artiniens montre que A/J est isomorphe à un produit d’anneaux de matrices sur des corps finis decaractéristique p , de sorte que le comptage classique des injections linéaires entredeux espaces vectoriels finis permet de conclure. Corollaire 8.32. La conjecture 6.13 est vraie pour un p -anneau fini semi-simple A (où p = car( K ) ).Démonstration. Si A est un corps , les résultats de Kuhn [42] montrent que les Q M , où M parcourt Irr( K [ GL n ( A )] - Mod ) (pour tout n ∈ N ) sont exactement(à isomorphisme près) les foncteurs simples de F ( A, K ) , de sorte que les conjec-tures 8.30 et donc 6.13, par la proposition 8.31, sont vérifiées. Par équivalencede Morita, cela s’étend au cas où A est un anneau de matrices sur un corps finide caractéristique p . Dans le cas général, A est isomorphe à un produit fini detels anneaux, et les conjectures restent valables grâce aux résultats de la sec-tion 2 (le corollaire 2.8 suffit si K contient toutes les racines de l’unité, et unargument de changement de base au but tel que la proposition 2.5 permet des’y ramener). Finitude locale de F df ( A, K ) . La proposition suivante propose une variantede la proposition 8.26 applicable aux anneaux infinis, qui remplace F ( A ; K ) par F df ( A, K ) . (Notons que si A est infini, F ( A ; K ) n’est jamais localement finie,d’après la proposition 8.17). Proposition 8.33. Soit A un anneau. On suppose le corps K de caractéristique . Alors la catégorie abélienne F df ( A, K ) est localement finie.Démonstration. Il suffit de montrer qu’un foncteur F de type fini de F df ( A, K ) est fini. En appliquant le lemme 3.10 et en raisonnant comme au début de ladémonstration du théorème 3.4, on voit qu’il existe un idéal K -cotrivial I ⊳ A F est isomorphe au tiré en arrière d’un bifoncteur B de F ( A/I × A, K ) par le morphisme d’anneaux canonique A → A/I × A , où B est tel que, pourtous objets V, M, N de P ( A ) , la fonction Hom A ( M, N ) → Hom K ( B ( V, M ) , B ( V, N )) est polynomiale. Mais comme K est de caractéristique nulle, toute fonctionpolynomiale f entre des K -espaces vectoriels se décompose de façon unique ensomme presque nulle sur d ∈ N de fonctions polynomiales f d homogènes dedegré d au sens où elles sont de degré au plus d et vérifient f d ( λ.x ) = λ d f d ( x ) pour tout λ ∈ Q (on ne l’exige pas pour chaque λ ∈ K !). Il s’ensuit que B se décompose en somme directe sur d ∈ N de bifoncteurs B d tels que chaqueapplication Hom A ( M, N ) → Hom K ( B d ( V, M ) , B d ( V, N )) soit polynomiale homogène de degré d . En conséquence, via l’équivalence decatégories canonique F ( A/I × A, K ) ≃ Fct ( P ( A/I ) , F ( A, K )) , B d appartientà la sous-catégorie Fct ( P ( A/I ) , P ol dfd ( A, K )) , où P ol dfd ( A, K ) désigne la sous-catégorie pleine de F df ( A, K ) des foncteurs polynomiaux de degré au plus d . Lefoncteur B d est à support fini dans F ( A/I × A, K ) (car F est à support fini),donc a fortiori dans Fct ( P ( A/I ) , F ( A, K )) et dans la sous-catégorie épaisse Fct ( P ( A/I ) , P ol dfd ( A, K )) . Il en résulte que la post-composition de B d par lefoncteur ev d : P ol dfd ( A, K ) → K - Mod F F ( A d ) est à support fini dans F ( A/I, K ) . Comme elle est également à valeurs de dimen-sion finie, elle est de type fini, donc finie par la proposition 8.26. Or le foncteur ev d est exact et fidèle , il en est donc de même pour la post-composition par cefoncteur, de sorte qu’on en déduit que B d est fini, ce qui achève la démonstra-tion.Si K est de caractéristique non nulle, l’absence de scindement par le degré desfoncteurs polynomiaux rend la situation beaucoup plus délicate, et les foncteursà valeurs de dimension finie ne sont généralement pas localement finis (voir lestravaux de Powell [49]). Nous conjecturons alors les résultats suivants : Conjecture 8.34. Supposons que K est de caractéristique p > . Soit A unanneau.1. La catégorie F df ( A, K ) est localement noethérienne.2. Si A ne possède aucun idéal bilatère I tel que A/I soit un p -anneau fini,alors la catégorie F df ( A, K ) est localement finie. Lorsque A ⊗ Z K = 0 , la conjecture est vérifiée. En effet, il n’y a alors pas defoncteur polynomial non constant dans F ( A, K ) (proposition 1.10) de sorte que,raisonnant comme au début de la démonstration de la proposition 8.33, on voitque tout foncteur de type fini de F df ( A, K ) se factorise par la réduction moduloun certain idéal K -cotrivial de A , ce qui permet de conclure en appliquant laproposition 8.26. 6. Cette propriété classique résulte de ce que F ( A d ) = 0 entraîne cr d ( F )( A, . . . , A ) = 0 ,donc cr d ( F ) = 0 si F est polynomial de degré au plus d (car cr d ( F ) est alors additif parrapport à chaque variable), c’est-à-dire que F est en fait de degré strictement inférieur à d , cequi permet de conclure par récurrence. .5 Produit tensoriel de foncteurs de longueur finie Dans ce paragraphe, nous allons démontrer le théorème 8.7. On commencepar traiter du cas de foncteurs polynomiaux . Proposition 8.35. Le produit tensoriel de deux foncteurs polynomiaux de lon-gueur finie et à valeurs de dimension finie de F ( A ; K ) est de longueur finie.Démonstration. Supposons d’abord K algébriquement clos. Il suffit de montrerque le produit tensoriel de deux foncteurs simples polynomiaux à valeurs dedimension finie de F ( A ; K ) est de longueur finie. Cela découle du théorème 7.5et de la dernière assertion de la proposition B.2.Le cas général se ramène au cas précédent par changement de base au but,en appliquant les deux premières assertions du lemme 8.12 à l’extension decorps K ⊂ ¯ K , où ¯ K désigne une clôture algébrique de K (ou en utilisant lethéorème 7.8). Remarque . Il n’est pas vrai qu’un produit tensoriel de foncteurs polyno-miaux finis, même additifs , reste toujours fini, car ce n’est déjà pas le cas pourun produit tensoriel (sur K ) de modules finis (sur une K -algèbre) : prenant K = Q , la catégorie Add ( P ( ¯ Q ); Q ) est équivalente à la catégorie des ¯ Q -espacesvectoriels (proposition 1.7), or le produit tensoriel sur Q de deux copies de ¯ Q estun ¯ Q -espace vectoriel de dimension infinie, il n’est donc pas de longueur finie. Proposition 8.37. Si les catégories F ( A ; K ) et F ( A op ; K ) sont localementnoethériennes, alors le produit tensoriel de deux foncteurs de longueur finie età valeurs de dimension finie de F ( A ; K ) est de longueur finie.Démonstration. Comme A est additive, on a des isomorphismes P a A ⊗ P b A ≃ P a ⊕ b A , qui montrent que le produit tensoriel de deux foncteurs de type fini de F ( A ; K ) reste de type fini. Comme F ( A ; K ) est localement noethérienne, il ya équivalence entre noethérianité et type-finitude dans cette catégorie, de sortequ’un produit tensoriel de foncteurs noethériens y est également noethérien.Un foncteur de F df ( A ; K ) est artinien si et seulement si son dual, c’est-à-dire sa post-composition par le foncteur de dualité des K -espaces vectoriels, estun foncteur noethérien de F df ( A op ; K ) . Par conséquent, en appliquant ce quiprécède à la catégorie additive A op , on voit que le produit tensoriel de deuxfoncteurs artiniens est artinien dans F df ( A ; K ) .La conclusion s’obtient du fait que les foncteurs finis sont exactement lesfoncteurs à la fois artiniens et noethériens. Démonstration du théorème 8.7. Supposons d’abord que le corps K contienttoutes les racines de l’unité. Il suffit de démontrer que le produit tensoriel dedeux foncteurs simples à valeurs de dimension finie est de longueur finie. Lecorollaire 3.7 permet de se ramener à démontrer deux cas distincts : (i) le cas oùles deux foncteurs simples sont polynomiaux, et (ii) le cas où les deux foncteurssimples factorisent par un même idéal K -cotrivial I . Le cas (i) est démontrédans la proposition 8.35. D’autre part, comme F ( A / I ; K ) s’identifie (via la res-triction le long de π I : A → A / I ) à une sous-catégorie de F ( A ; K ) stable parsous-quotient, on voit qu’un foncteur F est fini dans F ( A / I ; K ) si et seulementsi π ∗I ( F ) est fini dans F ( A ; K ) . Le cas (ii) se déduit donc de la proposition 8.37.63i K est un corps commutatif quelconque, le théorème 8.7 s’obtient par unargument de changement de base, en utilisant es deux premières assertions dulemme 8.12 comme à la fin de la démonstration de la proposition 8.35. Dans cette section, on établit les théorèmes 8.8 et 8.9. Ces deux énoncésvont être obtenus comme conséquence des théorèmes 8.44 et 8.45, qui sont desrésultats plus généraux sur les objets pf n . Lemme 8.38. Soient A : A → Ab un foncteur additif, k un anneau et n ∈ N ∪{∞} . Supposons que A est pf n dans la catégorie Add ( A ; Z ) . Alors le foncteur k [ A ] est pf n dans F ( A ; k ) .Démonstration. Cela découle de ce que, si P • est une résolution simpliciale de A par des foncteurs projectifs de type fini (jusqu’en degré n ) de Add ( A ; Z ) ,alors k [ P • ] est une résolution simpliciale de k [ A ] par des foncteurs projectifs detype fini (jusqu’en degré n ) de F ( A ; k ) .Il en résulte : Proposition 8.39. Soient Φ : A → B un foncteur additif entre petites catégo-ries additives, k un anneau et n ∈ N ∪ {∞} . Supposons que, pour tout objet b de B , le foncteur Φ ∗ B ( b, − ) est pf n dans la catégorie Add ( A ; Z ) . Alors le foncteur Φ ∗ : F ( B ; k ) → F ( A ; k ) préserve les objets pf n . Proposition 8.40. Soient n ∈ N ∪ {∞} , F un foncteur pf n de F ( A ; K ) et E un endofoncteur élémentaire des K -espaces vectoriels. Alors E ◦ F est unfoncteur pf n de F ( A ; K ) .Démonstration. Un argument de résolution simpliciale (cf. démonstration dulemme 8.38) montre qu’il suffit de démontrer que E ◦ P t A est pf n pour toutobjet t de A . Un argument de changement de base immédiat permet de seramener au cas où K est un corps premier. On montre alors par récurrence surl’entier d que, si X est un endofoncteur polynomial fini de degré d des K -espacesvectoriels, alors X ◦ P t A est toujours pf n . C’est évident pour d ≤ ; on supposedonc d > et l’assertion vérifiée pour des foncteurs de degré < d .Soient M le K [ S d ] -module fini cr d ( X )( K, . . . , K ) et R ∗ → M une résolutionde M par des K [ S d ] -modules libres finis. Considérons le complexe ( P t A ) ⊗ d ⊗ S d R ∗ de F ( A ; K ) : tous ses termes sont projectifs de type fini, et son homologie est Tor S d ∗ ( T d , M ) ◦ P t A , elle est donc du type Y ◦ P t A pour un foncteur polynomial fini Y de degré < d en degré strictement positif, tandis que son homologie en degrénul possède un morphisme vers F ◦ P t A dont noyau et conoyau sont égalementdu type Y ◦ P t A avec Y polynomial fini de degré < d . L’hypothèse de récurrenceet un argument standard de suite spectrale permettent de conclure.La propriété classique suivante, indépendante du reste de l’article, nous seranécessaire pour déduire de nos théorèmes à la Steinberg une généralisation duthéorème 8.8 à la propriété pf n , pour n ∈ N ∪ {∞} (théorèmes 8.44 et 8.45 ci-après). Pour la démonstration du seul théorème 8.8, un argument élémentairede présentation du foncteur de linéarisation suffit.64 roposition 8.41 (Eilenberg-Mac Lane, Dold-Puppe...) . Il existe un complexede chaînes Q ∗ de foncteurs Ab → K - Mod possédant les propriétés suivantes.(1) Pour tout n ∈ N , Q n est un facteur direct du foncteur V K [ V n ] .(2) L’homologie de Q ∗ en degré nul est isomorphe à V V ⊗ Z K .(3) Si K est de caractéristique nulle, l’homologie de Q ∗ est nulle en degrésstrictement positifs.(4) Si K est de caractéristique p > , pour tout n > , l’homologie de Q ∗ endegré n est isomorphe à une somme directe finie de copies des foncteurs V V ⊗ Z K et V p V ⊗ Z K , où p V := Hom Z ( Z /p, V ) .Démonstration. La construction cubique de Mac Lane [21, § 12] (on pourra aussiconsulter la présentation plus récente de Johnson-McCarthy [35, § 6]) fournit lecomplexe désiré. En effet ce complexe, évalué sur V , calcule l’homologie stableà coefficients dans K des espaces d’Eilenberg-Mac Lane associés à V , de sorteque (2) et (3) sont clairs ; (1) résulte de la définition explicite du complexe.Pour la dernière assertion, on peut supposer K = Z /p et s’appuyer sur lathéorie des foncteurs dérivés non additifs de Dold-Puppe [18] : l’homologie de Q ∗ est isomorphe aux foncteurs dérivés stables à la Dold-Puppe du foncteur K [ − ] ,mais aussi, d’après [18, Satz V Sym Z ( V ) ⊗ Z K ≃ Sym K ( V ⊗ Z K ) (où Sym désigne le foncteur puissance symétrique). En chaquedegré homologique, le dérivé stable à la Dold-Puppe du foncteur Sym Z /p est unesomme directe finie de copies de l’identité des Z /p -espaces vectoriels (cf. [18,§ 10] et [35, Theorem − ⊗ Z Z /p : Ab → Z /p - Mod estadditif, exact à droite et a pour unique foncteur dérivé à gauche en degré nonnul celui de degré , V p V , on en déduit par une suite exacte de Künneth quel’homologie de Q ∗ en chaque degré est une extension d’une somme directe finiede copies de V p V := Hom( Z /p, V ) par une somme directe finie de copiesde V V ⊗ Z Z /p , qui sont projectifs dans la catégorie des foncteurs additifs Ab → Z /p - Mod , de sorte que l’extension est nécessairement triviale, ce quiachève la démonstration. Corollaire 8.42. Soit n ∈ N ∪ {∞} . Alors l’inclusion Add ( A ; K ) ֒ → F ( A ; K ) préserve les objets pf n si l’une des trois conditions suivantes est réalisée.1. n = 1 .2. La caractéristique de K est nulle.3. La caractéristique de K est p > et, pour tout objet a de A , le foncteur p A ( a, − ) est pf n − dans la catégorie Add ( A ; Z /p ) .Démonstration. Il suffit de montrer que pour tout objet x de A , A ( x, − ) ⊗ Z K est pf n dans F ( A ; K ) . Si n = 1 , cela résulte de la suite exacte usuelle : P a ⊕ a A → P a A → A ( a, − ) ⊗ Z K → . Si K est de caractéristique nulle, alors Q ∗ ◦ A ( x, − ) est une résolution dufoncteur A ( x, − ) ⊗ Z K par des projectifs de type fini.Supposons maintenant car( K ) = p > et que p A ( a, − ) est pf n − dans Add ( A ; Z /p ) pour tout a ∈ Ob A . Cela implique que l’homologie de Q ∗ ◦A ( x, − ) est en chaque degré un objet pf n − de Add ( A ; K ) . On montre alors par récur-rence sur i ≤ n que A ( x, − ) ⊗ Z K est pf i , pour tout x ∈ Ob A . Pour i = 0 65l n’y a rien à faire. Si cette propriété vaut à l’ordre i − , elle implique quel’inclusion Add ( A ; K ) ֒ → F ( A ; K ) préserve les objets pf i − et montre doncque l’homologie de Q ∗ ◦ A ( x, − ) est, en chaque degré non nul, un foncteur pf i − dans F ( A ; K ) . Comme les termes de ce complexe sont projectifs de type fini, unargument standard de suite spectrale (ou de décalage) permet d’en déduire queson homologie en degré nul, c’est-à-dire A ( x, − ) ⊗ Z K , est pf i , d’où la conclu-sion. Remarque . La troisième condition du corollaire 8.42 est en particulier vé-rifiée dans les cas suivants :1. lorsque la catégorie Add ( A ; Z /p ) est localement noethérienne,2. lorsque la catégorie A possède des conoyaux (car p A ( a, − ) est alors iso-morphe au foncteur A ( a/p, − ) , où a/p désigne le conoyau de l’endomor-phisme de multiplication par p dans a ).Les travaux d’Auslander [3] donnent de nombreux exemples de petites catégoriesabéliennes D telles que Add ( D ; Z /p ) n’est pas localement noethérienne (parexemple D = A - mod , où A est une Z /p -algèbre finie de type de représentationinfini), qui entrent donc dans le deuxième cas mais pas dans le premier. Théorème 8.44. Soit n ∈ N ∪ {∞} . On suppose que tous les objets simples àvaleurs de dimension finie de Add ( A ; K ) sont pf n . On suppose également quel’une des trois conditions suivantes est satisfaite :1. n = 1 .2. La caractéristique de K est nulle.3. La caractéristique de K est p > et, pour tout objet a de A , le foncteur p A ( a, − ) est pf n − dans la catégorie Add ( A ; Z /p ) .Alors tous les foncteurs polynomiaux de longueur finie et à valeurs de dimensionfinie de F ( A ; K ) sont pf n .Démonstration. Si K ⊂ L est une extension finie de corps commutatifs, tousles objets simples à valeurs de dimension finie de Add ( A ; L ) sont pf n , grâceau lemme 8.14. Par conséquent, le théorème 7.8 et la stabilité de la classe desfoncteurs pf n par extensions et par produits tensoriels montrent qu’il suffitde vérifier la propriété pour les produits tensoriels de foncteurs du type E ◦ A , où A est un foncteur additif simple à valeurs de dimension finie et E unfoncteur élémentaire. La conclusion découle donc de la proposition 8.40 et ducorollaire 8.42. Théorème 8.45. Faisons les mêmes hypothèses qu’au théorème 8.44 et suppo-sons de plus que, pour tout idéal K -cotrivial I ⊳ A , les deux hypothèses suivantessont simultannément vérifiées :1. les foncteurs simples de F ( A / I ; K ) sont pf n ;2. pour chaque objet x de A , le foncteur I ( x, − ) est pf n − dans Add ( A ; Z ) .Alors tous les foncteurs de longueur finie et à valeurs de dimension finie de F ( A ; K ) sont pf n .Démonstration. La deuxième hypothèse revient à dire que tous les foncteurs A ( x, − ) / I ( x, − ) sont pf n dans Add ( A ; Z ) . Par conséquent, la proposition 8.3966t la première hypothèse montrent que tout foncteur simple de F ( A ; K ) qui sefactorise par le foncteur canonique A → A / I est pf n .Il en résulte, par le théorème 8.44, que le produit tensoriel dans F ( A ; K ) entre un foncteur simple polynomial à valeurs de dimension finie et un foncteursimple se factorisant par A → A / I est pf n . Par le théorème 3.4 (et les résultatsde la section 2), on en déduit que tout foncteur absolument simple et à valeurs dedimension finie de F ( A ; K ) est pf n . Le cas général se ramène au cas absolumentsimple par extension des scalaires au but (cf. proposition 2.5 et lemme 8.12). Démonstration des théorèmes 8.8 et 8.9. Le sens direct de la première asser-tion du théorème 8.8 est le théorème 8.44 pour n = 1 , la réciproque est lelemme 8.21. La deuxième assertion est le théorème 8.45 pour n = 1 . La troi-sième assertion du théorème 8.8 est donnée par les corollaires 8.25 et 8.27.Le théorème 8.9 découle quant-à-lui du théorème 8.45 pour n = ∞ . A Foncteurs simples ne prenant pas des valeursde dimension finie A.1 Foncteurs simples prenant une valeur non nulle dedimension finie On rappelle (corollaire 1.6) que, si F est un foncteur simple de F ( A ; K ) et t est un objet de A tel que F ( t ) soit non nul, alors F est isomorphe au prolonge-ment intermédiaire associé au foncteur d’évaluation en t du K [End( t )] -module F ( t ) . Cela permet théoriquement de disposer d’un contrôle sur les foncteurssimples de F ( A ; K ) qui prennent une valeur non nulle de dimension finie, àpartir des représentations simples de dimension finie sur K des monoïdes mul-tiplicatifs d’endomorphismes des objets de A .La propriété suivante, qui constitue un corollaire des résultats de la section 7,montre que, dans de nombreux cas, les foncteurs simples avec une valeur nonnulle de dimension finie prennent toutes leurs valeurs de dimension finie si etseulement s’ils sont polynomiaux. Proposition A.1. Soient A un anneau commutatif, n ∈ N et M une repré-sentation simple de dimension finie sur K du monoïde M n ( A ) . On supposeque A ne possède pas d’autre idéal K -cotrivial que A (par exemple, que A estun corps infini). Notons S M le foncteur simple de F ( A, K ) obtenu en appli-quant à M le prolongement intermédiaire associé au foncteur réflexif F ( A, K ) → K [ M n ( A )] - Mod d’évaluation en A n (cf. propositions 1.4 et 1.5).Les assertions suivantes sont équivalentes. (a) Le foncteur S M est polynomial. (b) Le foncteur S M est à valeurs de dimension finie. (c) La représentation M de M n ( A ) est polynomiale à la Eilenberg-Mac Lane.Démonstration. La proposition 1.4 montre que S M ( A n ) ≃ M comme K [ M n ( A )] -modules. Il en résulte en particulier que (a) entraîne (c). La proposition 7.10permet également d’en déduire que (a) implique (b).Le lemme 3.13 montre que (c) entraîne (a) (en effet, A n constitue un sup-port et un co-support de S M ). L’implication (b) ⇒ (a) provient quant à elle ducorollaire 3.5. 67 onvention : dans toute la suite de cet appendice, k désigne un corpscommutatif infini. Nous nous concentrerons sur la catégorie F ( k, K ) , où adviennent déjà denombreux phénomènes intéressants.Pour n > , il est facile de construire des représentations simples de M n ( k ) de dimension finie sur K qui ne sont pas polynomiales. Pour n = 1 , tout mor-phisme de groupes k × → K × dont le prolongement par zéro fournit une fonctionnon polynomiale k → K en donne un cas. Exemple A.2 . Prenons k = K = Q . Les seuls foncteurs simples non constantsde F df ( Q , Q ) non nuls sur Q sont les puissances symétriques S d pour d ∈ N ∗ .Ils sont associés aux endomorphismes x x d du groupe Q × . Mais ce groupepossède de nombreux autres endomorphismes, comme x x d pour d ≤ — etencore bien d’autres puisque ce groupe abélien, isomorphe à Z / ⊕ Z ⊕ N , a unanneau d’endomorphismes qui a la puissance du continu !En fait, on peut souvent décrire de façon assez explicite les foncteurs simplesobtenus par ce procédé, à l’aide des foncteurs Q M construits en (12) (page 60).Tout d’abord, si M est une représentation de dimension finie m sur K dugroupe GL n ( k ) , nous noterons encore M , par abus, la représentation du monoïde M n ( k ) obtenue en prolongeant l’action de GL n ( k ) par aux matrices singulièresde M n ( k ) , et désignerons par ϕ : M n ( k ) → M m ( K ) la fonction multiplicativecorrespondante obtenue en choisissant une K -base de M . Comme dans la pro-position A.1, S M désigne le foncteur de F ( k, K ) associé à M par prolongementintermédiaire ; c’est naturellement un quotient de Q M , et S M est simple si M est une représentation simple de GL n ( k ) . Proposition A.3. Soient n, m ∈ N ∗ , M une représentation simple de dimen-sion finie m sur K de GL n ( k ) , ϕ : M n ( k ) → M m ( K ) le morphisme associécomme ci-dessus et ϕ , . . . , ϕ m : M n ( k ) → K m les colonnes de ϕ . Le fonc-teur Q M est simple (et donc isomorphe à S M ) si et seulement si la condi-tion suivante est vérifiée : la famille des translatées ( τ a ( ϕ i )) ≤ i ≤ m,a ∈M n ( k ) (où τ a ( ψ )( x ) := ψ ( a + x ) ) est libre dans le K -espace vectoriel K M n ( k ) . (Sous les hypothèses de la proposition, l’espace vectoriel S M ( k i ) est donc dedimension finie non nulle si et seulement si i = n .) Démonstration. Explicitement, S M est l’image du morphisme Q M → M Hom k ( V,k n ) donné sur l’espace vectoriel V par K [Inj k ( k n , V )] ⊗ K [ GL n ( k )] M → M Hom k ( V,k n ) ([ f ] ⊗ ξ ) ( g ϕ ( g.f ) .ξ ) . Comme GL n ( k ) opère librement sur Inj k ( k n , V ) et que les orbites sont clas-sifiées par les sous-espaces de dimension n de V via l’image d’une telle injection,les éléments non nuls de Q M ( V ) sont exactement les images par la projectioncanonique des éléments P ri =1 [ f i ] ⊗ ξ i de K [Inj k ( k n , V )] ⊗ M , où r ∈ N ∗ , les ξ i sont des éléments non nuls de M , les E i := Im f i sont des sous-espaces vecto-riels deux à deux distincs de V et de dimension n . Comme k est infini, et qu’uneréunion finie de sous-espaces stricts d’un k -espace vectoriel en est donc toujoursun sous-ensemble strict, il existe une application linéaire V → k n telle que lescomposées E i ֒ → V → k n soient des isomorphismes pour tout i ∈ { , . . . , r } . Parconséquent, quitte à modifier les f i (et les ξ i ) par l’action d’éléments de GL n ( k ) ,68n peut supposer que V est de la forme k n ⊕ E et que la première composante k n → k n des f i est l’identité ; nous noterons g i : k n → E leur deuxième compo-sante. Les g i sont donc deux à deux distincts. L’annulation de P ri =1 [ f i ] ⊗ ξ i dans M Hom k ( V,k n ) signifie que, pour toute application linéaire g : V = k n ⊕ E → k n ,dont nous noterons u : k n → k n et v : E → k n les composantes, on a r X i =1 ϕ ( u + vg i ) .ξ i = 0 dans M . Utilisant encore qu’une réunion finie de sous-espaces stricts d’un k -espace vectoriel en est un sous-ensemble strict, on voit que le fait que les g i soient deux à deux distincts entraîne qu’il existe v ∈ Hom k ( E, k n ) tel que les vg i soient deux à deux distincts.Autrement dit, la projection Q M ։ S M est un isomorphisme si et seulements’il existe r ∈ N ∗ , des éléments deux à deux distincts a , . . . , a r de M n ( k ) etdes éléments non nuls ξ , . . . , ξ r de M ≃ K m tels que r X i =1 τ a i ( ϕ ) .ξ i = 0 ce qui termine la démonstration. Exemple A.4 . La représentation triviale de GL n ( k ) dans K correspond à lafonction ϕ : M n ( k ) → K qui vaut sur GL n ( k ) et sur les matrices sin-gulières. Celle-ci vérifie la condition d’indépendance linéaire des translatées re-quise dans l’énoncé précédent. Supposons en effet qu’on dispose d’une relation P ri =1 τ a i ( ϕ ) = 0 avec les a i ∈ M n ( k ) deux à deux distincts. Comme k est infini,on peut trouver x ∈ M n ( k ) telle que toutes les matrices a i + x soient inversibles,d’où P ri =1 λ i = 0 . On peut également trouver, pour tout indice j , x ∈ M n ( k ) telle que a i + x soit inversible si et seulement i = j , ce qui fournit la relation P i = j λ i = 0 et donc λ j = 0 pour tout j . Le foncteur simple qu’on en déduitest donné sur les objets par V K [ G r n ( V )] , où G r n ( V ) désigne l’ensemble dessous-espaces de dimension n de V ; ce foncteur envoie une flèche f : V → W surl’application linéaire envoyant [ E ] , pour E ∈ G r n ( V ) , sur [ f ( E )] si f ( E ) est dedimension n , et sur sinon.Si k est un corps fini , le foncteur K [ G r n ] est encore simple si K est decaractéristique différente de celle de k , mais la démonstration précédente nes’applique plus. La simplicité se déduit des résultats de Kuhn [42] (reposantsur le travail de Kovács [36] sur les représentations des monoïdes multiplicatifs M n ( k ) ) déjà invoqués au corollaire 8.32. En revanche, si k est fini et de mêmecaractéristique que K , alors K [ G r n ] n’est jamais simple si n > — on peutmême montrer qu’il est de dimension de Krull au moins n (et conjecturalement,de dimension de Krull exactement n — cf. [49, 14]). Exemple A.5 . Prenons K = k et considérons l’endomorphisme x x d de k × , où d est un entier strictement négatif. Son prolongement par fournitun morphisme multiplicatif f : k → k qui vérifie la condition d’indépendancelinéaire de la proposition A.3 par un argument de fractions rationnelles immédiat(on rappelle que k est un corps commutatif infini ).Pour k = K = R , des arguments d’analyse élémentaires montrent que leprolongement par à R de tout endomorphisme continu f du groupe topologique69 × vérifie également cette condition, hormis si ce prolongement est polynomial,c’est-à-dire si f est de la forme x x d avec d ∈ N ∗ . Remarque A.6 . Nous ignorons s’il existe un morphisme de monoïdes M n ( k ) →M m ( K ) fournissant une représentation simple non EML-polynomiale de M n ( k ) et ne vérifiant pas la condition de la proposition A.3, même en nous restreignantà n = m = 1 . Remarque A.7 . Le cas n = m = 1 est sans doute le plus important dans lesconstructions précédentes, en vertu des résultats de Steinberg [56] et de Bass-Milnor-Serre [4] (déjà mentionnés dans la section 3) dont notre théorème 3.4s’inspire. Ainsi, pour k = Q , toute représentation complexe de dimension fi-nie de SL n ( Q ) est polynomiale, où n ∈ N est arbitraire, ce qui entraîne quetoute représentation simple de dimension finie de GL n ( Q ) s’exprime comme leproduit tensoriel entre une représentation polynomiale et une représentationse factorisant par le déterminant, donc provenant d’un morphisme de groupes Q × → C × : ce sont ces morphismes qui font apparaître une « partie non polyno-miale », donnant lieu à des foncteurs dont les valeurs ne sont pas de dimensionfinie. A.2 Foncteurs simples qui ne prennent aucune valeur dedimension finie non nulle Il paraît très difficile de donner des résultats généraux sur les foncteurssimples dont aucune valeur non nulle n’est de dimension finie. Il est toutefoisfacile de voir qu’il en existe souvent beaucoup, dès lors que les ensembles demorphismes dans la catégorie source ne sont pas trop petits. L’énoncé suivanten donne une illustration. Proposition A.8. Soient A un anneau commutatif ou noethérien de caracté-ristique nulle et M un A -module projectif de type fini dont A est facteur direct.Il existe un foncteur simple S de F ( A, K ) tel que, pour tout objet V de P ( A ) :1. dim K S ( V ) = ∞ si M est facteur direct de V ;2. S ( V ) = 0 sinon.Démonstration. Comme A est facteur direct de M , le groupe G := Aut P ( A ) ( M ) contient GL ( A ) , qui contient GL ( Z ) (car A est de caractéristique ), et doncun groupe libre non abélien H . D’après Formanek [22, théorème 5], il existeun K [ H ] -module simple et fidèle, donc de dimension infinie sur K , ce qui en-traîne l’existence d’un K [ G ] -module T simple et de dimension infinie. Comme A est commutatif ou noethérien, on peut prolonger l’action de G par auxendomorphismes non inversibles de M (obtenant une représentation simple dedimension infinie de ce monoïde) et obtenir par prolongement intermédiaireun foncteur simple S de F ( A, K ) tel que S ( M ) ≃ T comme K [End P ( A ) ( M )] -modules. Si M est facteur direct de V , alors S ( M ) est facteur direct de S ( V ) ,qui est donc de dimension infinie. Si M n’est pas facteur direct de V , le fait queles endomorphismes non inversibles de M opèrent par sur T et l’expressiondu prolongement intermédiaire entraînent que S ( M ) est nul. Remarque A.9 . La conclusion de la proposition vaut également dans d’autrescas, par exemple si A est la clôture algébrique d’un corps fini et que K est decaractéristique nulle (voir la remarque A.11 ci-dessous).70 .3 Notion intrinsèque : endofinitude (centrale) Afin de montrer que la notion, pour un foncteur simple, de prendre desvaleurs de dimension finie, est un cas particulier naturel d’une notion intrinsèquebeaucoup plus générale dans les catégories abéliennes, nous commençons parrappeler la notion classique suivante d’ endofinitude , qui remonte à Crawley-Boevey [12] (pour les catégories de modules au moins). Par souci de simplicité,nous nous contentons de l’introduire pour des objets simples. Proposition et définition A.10. Supposons que la catégorie E est localementde type fini. Soit S un objet simple de E . Notons Add( S ) la sous-catégorie pleinede E des objets semi-simples isotypiques de type S . Les propriétés suivantes sontéquivalentes :1. Add( S ) est stable par produits ;2. tout produit de copies de S est semi-simple ;3. si X est un objet de type fini de E , alors dim End( S ) E ( X, S ) < ∞ ;4. les objets X tels que dim End( S ) E ( X, S ) < ∞ engendrent la catégorieabélienne E .Lorsqu’elles sont vérifiées, on dit que S est endofini . (Des généralisations et variantes beaucoup plus élaborées de cet énoncé setrouvent dans Krause [37, § 6.3 et 6.4].) Démonstration. ⇒ ⇒ X un objet de type fini de E , considérons la flèche X → S E ( X,S ) ≃ −→ S ⊕ E composée du morphisme tautologique et d’un isomorphisme donné, pour unensemble E convenable, par l’hypothèse 2 (le socle d’un produit de copies de S est une toujours une somme directe de copies de S , donc 2 implique qu’unproduit de copies de S est une somme directe de copies de S ). Le foncteur E ( X, − ) commute aux sommes directes, puisque X est de type fini, donc il existeun nombre fini de morphismes f , . . . , f n : X → S tels que notre morphisme sefactorise en la composée de X → S n de composantes les f i et une inclusion S n → S ⊕ E . Il s’ensuit que tout élément de E ( X, S ) est combinaison linéaire àcoefficients dans le corps End E ( S ) des f i , comme souhaité.3 ⇒ E est localement finie.4 ⇒ X d’un produit S E de copies de S tel que dim End( S ) E ( X, S ) < ∞ appartient à Add( S ) , puisque tout objet de cettecatégorie est sous-objet d’un produit de copies de S et que cette sous-catégorieest stable par sous-objet. Soit ( f , . . . , f n ) une base de E ( X, S ) sur End( S ) :tout morphisme X → S , donc tout morphisme X → S E , se factorise par lemorphisme X → S ⊕ n qu’elle détermine. Par conséquent, X est isomorphe à unsous-objet de S ⊕ n , d’où le résultat. Remarque A.11 . Plusieurs caractérisations partielles des groupes dont toutes lesreprésentations irréductibles sont endofinies sont disponibles dans la littérature,comme l’article de Snider [53]. On déduit par exemple du théorème 1 (et dulemme 1) de celui-ci que, si k est une clôture algébrique de Z /p (où p est unnombre premier) et n ≥ un entier, alors GL n ( k ) possède une représentation71rréductible non endofinie sur K , au moins si ce corps est de caractéristiquenulle (en effet, le sous-groupe de GL ( k ) constitué des matrices triangulairessupérieures, au sens large, est résoluble mais ne possède aucun sous-groupeabélien d’indice fini).Soit A est anneau. On rappelle (cf. remarque 2.11) que les objets de E munisd’une action de A forment une catégorie de Grothendieck E A . Elle est localementde type fini si c’est le cas de E . Si M est un objet de E , l’action canonique deson anneau d’endomorphismes fait de M un objet noté f M de E End( M ) . Commele foncteur d’oubli E End( M ) → E est exact et fidèle, si M est simple, il en est demême pour f M . Proposition et définition A.12. Supposons E localement de type fini. Soit M un objet simple de E . Les assertions suivantes sont équivalentes :1. l’objet simple f M de E End( M ) est endofini ;2. dim Z (End( M )) E ( X, M ) < ∞ pour tout objet X de type fini de E , où Z (End( M )) désigne le centre du corps End( M ) .Lorsqu’elles sont vérifiées, on dit que M est un objet centralement endofini de E . Un tel objet est endofini.Démonstration. Cela provient des deux observations suivantes : (i) l’anneau desendomorphismes de f M s’identifie à Z (End( M )) et (ii) l’adjoint à gauche aufoncteur d’oubli E End( M ) → E envoie les objets de type fini de E sur une classede générateurs de type fini de E End( M ) .Plusieurs auteurs, dont Wehrfritz [63], se sont intéressés (avec une termino-logie légèrement différente) aux groupes dont toutes les représentations irréduc-tibles sont centralement endofinies.Soient C une petite catégorie et R un anneau. La catégorie F ( C ; R ) est unecatégorie de Grothendieck localement de type fini. Si A est un anneau, on dis-pose d’une équivalence de catégories canonique F ( C ; R ) A ≃ F ( C ; R ⊗ Z A ) (cf.remarque 2.11). Proposition A.13. Soient C une petite catégorie, R un anneau et F un fonc-teur simple de F ( C ; R ) .1. Le foncteur F est endofini si et seulement si F ( x ) est un espace vectorielde dimension finie sur le corps End( F ) pour tout objet x de C , i.e. si F est à valeurs de dimension finie vu comme foncteur de F ( C ; End( F )) .Si R est commutatif, F est nécessairement simple vu comme foncteur de F ( C ; End( F )) .2. Supposons R commutatif. Alors F est centralement endofini si et seule-ment si F ( x ) est un espace vectoriel de dimension finie sur le corps com-mutatif Z (End( F )) pour tout objet x de C , i.e. si F est à valeurs dedimension finie vu comme foncteur (simple) de F ( C ; Z (End( F ))) . Ainsi, la notion d’endofinitude centrale est exactement celle qui permet,dans les catégories du type F ( C ; R ) avec R commutatif, de ramener l’étude desfoncteurs simples à celle de foncteurs simples à valeurs de dimension finie surun corps commutatif. 72 émonstration. La première assertion résulte de la considération des généra-teurs projectifs de type fini P x C de F ( C ; R ) .Si R est commutatif, alors F ( C ; R ) est R -linéaire, et End( F ) est une R -algèbre ; e F appartient à l’image essentielle du foncteur F ( C ; End( F )) → F ( C ; R ⊗ Z End( F )) de post-composition par la restriction le long du morphisme d’anneaux R ⊗ Z End( F ) → End( F ) donné par la structure de R -algèbre de End( F ) . Cefoncteur est pleinement fidèle et cette image essentielle est stable par sous-objet.Ainsi, si F est simple, e F peut être vu comme un objet simple de F ( C ; End( F )) decorps d’endomorphismes Z (End( F )) . Le reste de la proposition en découle. A.4 Produits infinis de foncteurs simples Si S est un objet simple non endofini d’une catégorie de Grothendieck lo-calement de type fini, un produit infini de copies de S peut avoir de nombreuxsous-quotients simples non isomorphes à S . En voici une illustration élémentairedans une catégorie de foncteurs dont les simples à valeurs de dimension finie sontdécrits par nos résultats. Exemple A.14 . Soit n ≥ un entier. Toute droite D ∈ P n − ( k ) du k -espacevectoriel k n (on rappelle que k est un corps commutatif infini) fournit un mor-phisme K [Hom k ( k n , − )] → K [Hom k ( D, − )] dans F ( k, K ) , qui induit un mor-phisme K [(Hom k ( k n , − ) \ { } ) /k × ] → K [ P ] ; de plus, le morphisme K [(Hom k ( k n , − ) \ { } ) /k × ] → K [ P ] P n − ( k ) qu’on en déduit est injectif . En effet, un élément non nul de K [(Hom k ( k n , V ) \{ } ) /k × ] (où V est un k -espace vectoriel de dimension finie sur k ) s’écrit x = P ri =1 λ i [ f i ] , où r ∈ N ∗ , λ i ∈ K × et les f i : k n → V sont des applications linéairesdeux à deux non proportionnelles. Par conséquent, pour i = j , l’ensemble { D ∈ P n − ( k ) | f i ( D ) = f j ( D ) } est un ouvert dense de P n − ( k ) pour la topologiede Zariski, de même que { D ∈ P n − ( k ) | f i ( D ) = 0 } . Par conséquent, on peuttrouver une droite D de k n telle que les f i ( D ) soient des droites deux à deuxdistinctes de V , ce qui montre que l’image de x par notre application est nonnulle.Le foncteur K [(Hom k ( k n , − ) \ { } ) /k × ] se surjecte sur K [ G r n ] , qui est doncun sous-quotient d’un produit de copies de K [ P ] = K [ G r ] . Or on a vu dansl’exemple A.4 que tous les foncteurs K [ G r n ] sont simples, et ils sont manifeste-ment deux à deux non isomorphes.D’autres exemples contre-intuitifs par rapport à la situation qui advientquand on ne se considère que des foncteurs à valeurs de dimension finie pro-viennent de la considération de produits infinis de foncteurs simples deux àdeux non isomorphes . Remarquons déjà que, si ( S i ) i ∈ E une famille infinie d’ob-jets simples deux à deux non isomorphes de la catégorie de Grothendieck E ,l’objet Q i ∈ E S i de E est semi-simple si et seulement s’il coïncide avec son sous-objet L i ∈ E S i (qui constitue toujours son socle). Pour E = F ( C ; K ) , où C est unepetite catégorie, si l’on suppose que les S i sont à valeurs de dimension finie,cette condition équivaut à dire que L i ∈ E S i (ou Q i ∈ E S i ) est à valeurs de dimensionfinie. 73orsque cette condition n’est pas satisfaite, l’objet Q i ∈ E S i peut avoir de nom-breux sous-quotients simples qui ne sont isomorphes à aucun des S i . En voiciune illustration. Exemple A.15 . Dans F ( Q , Q ) , le foncteur projectif P Q = Q [ − ] a pour plusgrand quotient polynomial de degré au plus n la somme directe sur les entiers ≤ i ≤ n des foncteurs S i ( i -ème puissance symétrique sur Q ). Chaque foncteur S i est simple. De plus, le morphisme P Q → Q i ∈ N S i qu’on en déduit est injectif,car l’idéal d’augmentation de l’algèbre sur un corps de caractéristique nulled’un groupe abélien sans torsion est résiduellement nilpotent. Mais P Q a pleinde quotients simples non polynomiaux : on dispose d’une injection de l’ensemble(infini non dénombrable) des endomorphismes de Q × dont l’extension par à Q n’est pas une fonction polynomiale dans l’ensemble de ces quotients — cf.exemple A.2. Remarque A.16 . La catégorie F ( Q , Q ) est engendrée par les foncteurs projectifs P Q n ≃ ( P Q ) ⊗ n pour n ∈ N , qui s’injectent grâce à l’exemple précédent dans unproduit dénombrable de foncteurs polynomiaux finis et à valeurs de dimensionfinie. On en déduit en particulier que la plus petite sous-catégorie bilocalisante (c’est-à-dire épaisse et stable par limites) de F ( Q , Q ) engendrée par F df ( Q , Q ) ,ou par les foncteurs polynomiaux, est F ( Q , Q ) . A contrario, la sous-catégorielocalisante de F ( Q , Q ) engendrée par F df ( Q , Q ) , ou par les foncteurs polyno-miaux, est exactement la catégorie des foncteurs analytiques (c’est-à-dire descolimites de foncteurs polynomiaux) de F ( Q , Q ) , qui est classiquement équiva-lente à Q n ∈ N Q [ S n ] - Mod .Dans d’autres catégories de foncteurs, comme F ( k, K ) , avec car( k ) = car( K ) ,il n’y a aucun foncteur polynomial non constant, de sorte que le corollaire 3.5montre que la sous-catégorie bilocalisante de F ( k, K ) engendrée par F df ( k, K ) est réduite, comme la sous-catégorie bilocalisante engendrée par les foncteurspolynomiaux, aux foncteurs constants. B Foncteurs élémentaires Cet appendice regroupe les principales propriétés des foncteurs élémentaires.Certaines sont établies dans la section 5, nous les complétons avec des énoncésbasiques provenant de la théorie des représentations des groupes algébriques etdes foncteurs associés (les foncteurs strictement polynomiaux [25]).Soit K un corps commutatif quelconque. On rappelle qu’un foncteur E : P ( K ) → K - Mod est dit élémentaire s’il existe un entier d ≥ et un K [ S d ] -module simple M tel que E soit isomorphe à l’image de la transformation na-turelle N donnée par la norme : ( T d ⊗ M ) S d N −→ ( T d ⊗ M ) S d , où un élément σ ∈ S d agit via la transformation naturelle donnée par les en-domorphismes K -linéaires de T d ( V ) ⊗ M = V ⊗ d ⊗ M qui envoient les éléments v ⊗ · · · ⊗ v d ⊗ m sur les éléments v σ − (1) ⊗ · · · ⊗ v σ − ( d ) ⊗ σm . Nous avonsdémontré les faits suivants au lemme 5.9.1. Les foncteurs élémentaires sont absolument simples.74. Pour tout d ≥ , les classes d’isomorphisme de foncteurs élémentairesde degré d sont en bijection avec les classes d’isomorphisme de K [ S d ] -modules simples.3. Les foncteurs élémentaires sont les quotients simples des T d , d ≥ .Nous donnons maintenant une description plus précise des foncteurs élémen-taires. Si K est de caractéristique nulle la norme est un isomorphisme, si bienque les foncteurs élémentaires de degré d sont isomorphes aux ( T d ⊗ M ) S d pourles K [ S d ] -modules simples M . Ces derniers peuvent se décrire en termes de sy-métriseurs de Young [26, Chap. 4.2] et les foncteurs élémentaires sont donc lesfoncteurs de Schur classiques [26, Chap. 6.1]. On a ainsi le résultat suivant. Proposition B.1. On suppose que K est de caractéristique nulle.1. Les foncteurs de Schur S λ , pour λ une partition, forment un ensemblede représentants des classes d’isomorphisme de foncteurs élémentaires.2. Si λ = ( λ , . . . , λ n ) est une partition avec λ n = 0 , alors S λ ( V ) = 0 si etseulement si dim V ≥ n .3. Le produit tensoriel de deux foncteurs de Schur se décompose comme unesomme directe finie de foncteurs de Schur. Supposons maintenant que K est de caractéristique p > . Nous relions lesfoncteurs élémentaires aux foncteurs de Schur d’Akin, Buchsbaum et Weyman[1]. Pour toute partition λ de d , soit e λ la partition conjuguée et soit S λ l’imagede la transformation naturelle Λ e λ ֒ → T d ≃ −→ T d ։ S λ où l’isomorphisme est la permutation des facteurs de T d qui envoie v ⊗ · · · ⊗ v d sur v σ − (1) ⊗· · ·⊗ v σ − ( d ) , où σ ( i ) est le i -ème terme dans la lecture en colonne dutableau de forme λ rempli en ligne par les nombres entiers , ,. . ., d . (Le foncteurde Schur S λ est noté L e λ dans [1]). On rappelle qu’une partition λ = ( λ , . . . , λ n ) est p -restreinte si λ n < p et λ i − λ i +1 < p pour ≤ i < n . Proposition B.2. On suppose que K est de caractéristique p > .1. Pour toute partition p -restreinte λ , le foncteur S λ a un socle simple L λ .Les foncteurs L λ indexés par les partitions p -restreintes λ forment unefamille de représentants des classes d’isomorphisme de foncteurs élémen-taires.2. Si λ = ( λ , . . . , λ n ) est une partition p -restreinte avec λ n = 0 , alors L λ ( V ) = 0 si et seulement si dim V ≥ n .3. Le produit tensoriel de deux foncteurs élémentaires est de longueur finiedans F ( K, K ) .Démonstration. L’énoncé de la proposition est bien connu dans la catégorie P K des foncteurs strictement polynomiaux de Friedlander et Suslin [25]. Plusprécisément, la catégorie P K peut être décrite en termes d’algèbres de Schur[25, Thm 3.2], c’est donc une catégorie de plus haut poids. Les foncteurs deSchur S λ sont les objets costandard [59, Remark 6.1], ils ont un socle simple L λ , et les L λ forment un ensemble de représentants des simples de P K . Unthéorème classique de Clausen et James [11, 34] (voir aussi [60, App. B] pour une75émonstration fonctorielle) implique que les foncteurs L λ apparaissant commesous-foncteurs des T d , ou dualement comme quotients des T d , sont ceux indexéspar les partitions p -restreintes. Ceci prouve le premier point. Pour le deuxièmepoint, on a L λ ( V ) ⊂ S λ ( V ) = 0 si dim V < n car S λ ( V ) est un quotient de Λ e λ ( V ) qui est alors nul. Réciproquement, L λ est un sous-foncteur de S λ , doncpar dualité un quotient de Γ λ . Si dim V ≥ n , on a donc L λ ( V ) = 0 d’après [25,Cor. 2.12]. Enfin le troisième point est une conséquence de [25, Thm 3.2].Nous montrons que l’énoncé dans P K implique la proposition B.2. Il y aun foncteur d’oubli U : P K → F ( K, K ) fidèle et exact. Si K est infini , cefoncteur d’oubli identifie P K avec la sous-catégorie pleine de F ( K, K ) dont lesobjets sont les foncteurs qu’on peut écrire comme des sous-quotients de sommesdirectes finies de foncteurs T d , en particulier l’image de U est stable par sous-quotients et U préserve les simples. L’énoncé de la proposition B.2 découle doncformellement de l’énoncé dans P K . Supposons K fini . Un argument classique depolynomialité (cf [38, Thm 4.14] ou [47]) montre que U préserve les foncteurs delongueur finie, d’où le troisème point. La définition des foncteurs élémentairesmontre qu’ils admettent une structure de foncteur strictement polynomial etqu’ils sont des sous-foncteurs strictement polynomiaux de T d . Pour démontrerles deux premiers points, il reste donc à vérifier que les S λ indexés par despartitions p -restreintes ont un socle simple dans F ( K, K ) . Comme T d est injectifdans P K , le monomorphisme L λ ֒ → T d s’étend en un monomorphisme S λ ֒ → T d .Le socle de S λ dans F ( K, K ) n’est donc constitué que de sous-foncteurs simplesde T d . Pour démontrer que le socle est simple, il suffit donc de montrer que pourtoute partition p -restreinte µ de l’entier d , les espaces vectoriels P K ( L µ , S λ ) et F ( K, K )( L µ , S λ ) ont même dimension. Pour cela on considère le diagrammecommutatif dont les lignes sont exactes et dont les injections verticales sontinduites par le foncteur d’oubli : / / P K ( L µ , S λ ) / / (cid:127) _ (1) (cid:15) (cid:15) P K ( L µ , T d ) / / (cid:127) _ (2) (cid:15) (cid:15) P K ( L µ , T d / S λ ) (cid:127) _ (cid:15) (cid:15) / / F ( K, K )( L µ , S λ ) / / F ( K, K )( L µ , T d ) / / F ( K, K )( L µ , T d / S λ ) Le morphisme (2) est un isomorphisme car sa source et son but ont mêmedimension, égale à la dimension de cr d ( L µ )( K, . . . , K ) , par la proposition 1.11.Le morphisme (1) est donc un isomorphisme, ce qui achève la démonstration.Revenons au cas général où K est un corps commutatif quelconque. Si K estde caractéristique nulle, on note L λ := S λ , pour toute partition λ . Si K est decaractéristique p > , les L λ sont définis, seulement pour λ p -restreinte, dans laproposition B.2. Dans tous les cas, la formule définissant les foncteurs L λ (oubien celle définissant les foncteurs élémentaires) montre que les L λ ( K n ) sontdes représentations polynomiales du groupe algébrique GL n,K (nous utilisonsune notation légèrement différente pour distinguer le groupe algébrique de songroupe des K -points, le groupe abstrait GL n ( K ) ). Les représentations polyno-miales (ou plus généralement rationnelles) du groupe algébrique GL n,K sontclassifiées par la théorie des plus hauts poids (voir par exemple [32, Sections2.1 et 2.2]). Plus précisément, toute représentation rationnelle V de GL n,K admet une base ( v , . . . , v N ) , telle que l’action du groupe D n,K des matricesdiagonales sur un élément de cette base est donnée par une formule du type76 iag( x , . . . , x n ) · v i = x λ . . . x λ n n v i , pour un certain uplet λ = ( λ , . . . , λ n ) ∈ Z n .Les uplets λ apparaissant ainsi ne dépendent pas du choix de la base, ce sontles poids de la représentation V . Si V est simple, il existe un poids λ de V maximal pour l’ordre lexicographique, qu’on appelle le plus haut poids de V , etqui caractérise V à isomorphisme près. Proposition B.3. Soit λ une partition telle que L λ ( K n ) = 0 . Alors c’est unereprésentation simple du groupe algébrique GL n,K , de plus haut poids λ .Démonstration. La base de l’espace vectoriel S λ ( K n ) [1, Thm II.2.16] montreque c’est une représentation de plus haut poids λ . Comme L λ ⊂ S λ ou pardualité L λ est un quotient de Γ λ , [25, Cor 2.12] montre que λ est un poids de L λ ( K n ) . Ainsi L λ ( K n ) est une représentation de plus haut poids λ . Il resteà montrer qu’elle est simple. Comme L λ est auto-dual (cf. par exemple [60,section 2.2]), la représentation L λ ( K n ) est auto-duale (pour la dualité uti-lisant la transposition de GL n,K ). Pour montrer que L λ ( K n ) est simple, ilsuffit donc de montrer que End GL n,K ( L λ ( K n )) est de dimension (inférieureou égale à) sur K . Mais cet espace vectoriel est un sous-espace vectoriel Hom GL n,K (Γ λ ( K n ) , L λ ( K n )) . D’après [58, Lm 6.6] ce dernier est isomorphe à P K (Γ λ , L λ ) , qui est de dimension sur K d’après [25, Cor. 2.12]. La simplicitéde L λ ( K n ) en découle. Proposition B.4. Soit λ = ( λ , . . . , λ n ) une partition telle que λ n = 0 . Si µ = ( λ − , . . . , λ n − on a des isomorphismes de K [ M n ( K )] -modules L λ ( K n ) ≃ L µ ( K n ) ⊗ det , L λ ( K n ) ≃ L λ ( K n ) ⊗ δ , où δ désigne le K [ M n ( K )] -module K sur lequel les matrices inversibles (resp.singulières) opèrent par l’identité (resp. par ).Démonstration. Les représentations L λ ( K n ) et L µ ( K n ) ⊗ det sont deux repré-sentations simples de même plus haut poids de GL n,K , elles sont donc iso-morphes. Par Zariski-densité, elle sont isomorphes comme représentations dumonoïde algébrique M n , donc comme représentations du monoïde des K -points M n ( K ) , ce qui donne le premier isomorphisme. Pour le deuxième isomorphisme,il suffit de remarquer que det ⊗ δ = det . Références [1] Kaan Akin, David A. Buchsbaum, and Jerzy Weyman. Schur functors andSchur complexes. Adv. in Math. , 44(3) :207–278, 1982.[2] Maurice Auslander. Functors and morphisms determined by objects. pages1–244. Lecture Notes in Pure Appl. Math., Vol. 37, 1978.[3] Maurice Auslander. A functorial approach to representation theory. In Representations of algebras (Puebla, 1980) , volume 944 of Lecture Notes inMath. , pages 105–179. Springer, Berlin-New York, 1982.[4] H. Bass, J. Milnor, and J.-P. Serre. Solution of the congruence subgroupproblem for SL n ( n ≥ and Sp n ( n ≥ . Inst. Hautes Études Sci. Publ.Math. , (33) :59–137, 1967.[5] Stanislaw Betley. Stable K -theory of finite fields. K -Theory , 17(2) :103–111, 1999. 776] A. A. Be˘ılinson, J. Bernstein, and P. Deligne. Faisceaux pervers. In Ana-lysis and topology on singular spaces, I (Luminy, 1981) , volume 100 of Astérisque , pages 5–171. Soc. Math. 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