Généralisations Quantitatives du Critére D'indépendance Linéaire De Nesterenko
aa r X i v : . [ m a t h . N T ] M a r GÉNÉRALISATIONS QUANTITATIVES DU CRITÈRED’INDÉPENDANCE LINÉAIRE DE NESTERENKO
A L’OCCASION DE LA CONFÉRENCE THUE 150 EN L’HONNEUR DU 150ÈMEANNIVERSAIRE D’AXEL THUE
SIMON DAUGUET
Résumé.
Dans cet article, on étend un critère d’indépendance linéaire dû à Fischler, quiest une généralisation quantitative du critère de Nesterenko, en affaiblissant fortement leshypothèses sur les diviseurs des coefficients des formes linéaires et en autorisant (dans unecertaine mesure) ces formes à ne plus tendre vers 0. Ce nouveau critère est ensuite formulédans un esprit plus à la Siegel en faisant intervenir une relation de récurrence vérifiée par lasuite de formes linéaires. On en démontre également une version plus générale, en termes decorps convexes et de réseaux de R n . Math. Subject Classification (2010) :
Introduction
En 2000, Rivoal [Riv00] et Ball-Rivoal [BR01] ont démontré qu’il existe une infinité d’entiersimpairs en lesquels la fonction zêta de Riemann prend des valeurs irrationnelles. à la suite de cethéorème, une recherche du prochain ζ (2 k +1) irrationnel après la constante d’Apéry ζ (3) a étélancée. Après un premier résultat de Rivoal [Riv02], Zudilin [Zud01] a démontré qu’au moins undes quatre nombres ζ (5) , ζ (7) , ζ (9) , ζ (11) est irrationnel. Il a également montré avec Fischler[FZ10] qu’il existe un entier impair j ≤ tel que , ζ (3) , ζ ( j ) sont linéairement indépendantssur Q (ce qui raffine des résultats antérieurs de Ball-Rivoal [BR01] et Zudilin [Zud02]).Dans les preuves de ces énoncés (et notamment du résultat de Rivoal et Ball-Rivoal), lecritère d’indépendance linéaire de Nesterenko [Nes85] joue un rôle déterminant. Date : 24 septembre 2018. héorème 1.1 (Critère d’indépendance linéaire de Nesterenko) : Soit ξ , . . . , ξ p − des réels, p ≥ . Soient < α < et β > . On considère p suitesd’entiers ( ℓ ,n ) n , . . . , ( ℓ p,n ) n telles que :(1) lim n →∞ (cid:12)(cid:12)P ri =1 ℓ i,n ξ i + ℓ p,n (cid:12)(cid:12) /n = α ,(2) pour tout i ∈ { , . . . , p } , lim sup n →∞ | ℓ i,n | /n ≤ β .Alors on a : dim Q Vect Q (1 , ξ , . . . , ξ p − ) ≥ − log α log β . Il fut généralisé à plusieurs reprises. Nesterenko lui-même [Nes12] en donne une version p -adique. Chantanasiri [Cha12] a donné une généralisation à C p . TÃűpfer [Töp94] a utiliséla méthode de Nesterenko pour développer un critère d’indépendance algébrique et l’utilise[Töp95] pour démontrer des résultats d’indépendance algébrique de valeurs de fonctions deMahler. Bedulev [Bed98] donne un critère pour des formes linéaires à coefficients dans un corpsde nombres.Dans [FZ10], Fischler et Zudilin ont généralisé le critère de Nesterenko pour exploiter laprésence de diviseurs des coefficients des formes linéaires. Fischler démontre aussi dans [Fis12]une version du critère de Nesterenko pour des formes linéaires oscillantes. Et dans [Fis13], ilen donne une version dans le cas d’une suite de formes linéaires petites en plusieurs vecteurs.Il démontre notamment le résultat suivant : héorème 1.2 (Fischler, 2011) : Soit ξ , . . . , ξ p − ∈ R avec p ≥ .Soit τ , . . . , τ p − > des réels deux à deux distincts et γ , . . . , γ p ≥ . Soit ( Q n ) n ∈ N unesuite strictement croissante d’entiers naturels telle que Q n +1 = Q o (1) n quand n → + ∞ . Pour tout n ∈ N et tout i ∈ { , . . . , p } , soit ℓ i,n ∈ Z et δ i,n un diviseurpositif de ℓ i,n tels que :(a) δ i,n divise δ i +1 ,n pour tous n ∈ N et tout i ∈ { , . . . , p − } .(b) δ j,n δ i,n divise δ j,n +1 δ i,n +1 pour tout n ∈ N et tout ≤ i < j ≤ p , avec δ ,n = 1 .(c) pour tout i ∈ { , . . . , p } , δ i,n = Q γ i + o (1) n .(d) | ℓ p,n ξ j − ℓ j,n | = Q − τ j + o (1) n pour tout j ∈ { , . . . , p − } .(e) max ≤ i ≤ p | ℓ i,n | ≤ Q o (1) n .Soient ε > , Q suffisamment grand par rapport à ε , et ( a , . . . , a p ) ∈ Q p \ { } tels quepour tout i ∈ { , . . . , p } , δ i, Φ( Q ) a i ∈ Z et pour tout i ∈ { , . . . , p − } , | a i | ≤ Q τ i − ε , où Φ( Q ) = max { k ∈ N , Q k ≤ Q } . Alors on a : | a ξ + · · · + a p − ξ p − + a p | > Q − − ε . En particulier, les nombres , ξ , . . . , ξ p − sont linéairement indépendants sur Q .Cet énoncé est le Corollary 3 de [Fis13] dans le cas où δ i,n = 1 pour tous i , n . Le casgénéral se déduit facilement du Theorem 3 de [Fis13] en prenant k + 1 = p , ω j = ϕ j = 0 , v i = (0 , . . . , , , , . . . , , − ξ i ) avec le 1 en i -ème position pour ≤ i ≤ p − et v p =( ξ , . . . , ξ p − , .Dans cet article, on généralise le théorème 1.2 en démontrant notamment le résultat suivant : Théorème 1.3 :
Soient ξ , . . . , ξ p − des réels. Soient τ , . . . , τ p − > − des réels 2 à 2 distincts et ( Q n ) n ∈ N une suite d’entiers strictement croissante telle que Q n +1 = Q o (1) n . Pour tout i ∈ { , . . . , p } et pour tout n ∈ N , soit δ i,n ∈ N ∗ tel que δ i,n | δ i,n +1 . Soient maintenant desentiers ℓ i,n pour i = 1 , . . . , p et pour tout n ∈ N , tels que :(i) ∀ i ∈ { , . . . , p } , δ i,n | ℓ i,n ;(ii) ∀ i ∈ { , . . . , p − } , | ℓ i,n − ℓ p,n ξ i | = Q − τ i + o (1) n ;(iii) | ℓ p,n | = Q o (1) n .Soient ε > , Q suffisamment grand par rapport à ε et ( a , . . . , a p ) ∈ Q p \ { } tel quepour tout i ∈ { , . . . , p } , δ i, Φ( Q ) a i ∈ Z et pour tout i ∈ { , . . . , p − } , | a i | ≤ Q τ i − ε , où Φ( Q ) = max { k ∈ N , Q k ≤ Q } . Alors on a : | a ξ + · · · + a p − ξ p − + a p | > Q − − ε . a différence majeure avec le théorème 1.2 de Fischler est certainement le fait qu’ici, les τ i peuvent être négatifs, tant qu’ils restent > − . Auparavant, les formes linéaires en et ξ i devaient tendre vers 0, alors que maintenant, elles peuvent tendre vers + ∞ . En revanche,on perd l’indépendance linéaire des ξ i qui provenait justement du fait d’avoir les τ i > .D’autre part, les conditions de divisibilité sur les diviseurs δ i,n ont été fortement affaiblies. Onne demande même plus de comportement asymptotique spécifique pour ces suites de diviseurs.En revanche, les comportements asymptotiques des suites de formes linéaires ont été renforcés :dans le théorème 1.2 de Fischler, on ne demande qu’une majoration alors que dans le théorème1.3 on exige que les coefficients soient exactement de taille Q o (1) n .Le théorème 1.3 est démontré au § 3 ci-dessous, comme cas particulier d’un résultat plusgénéral qui fait l’objet du § 2 et qui concerne une base et une suite de réseaux quelconques.Par ailleurs, dans le cas général comme dans le cas particulier, on démontre des variantes “à laSiegel” de ces critères. Enfin, au § 4, on étudie l’optimalité de ces critères et on démontre uneréciproque partielle.Ces critères ont été appliqués dans [DZ14], en collaboration avec Zudilin : en construisantdes approximations simultanées de ζ (2) et ζ (3) à l’aide d’outils hypergéométriques, ils per-mettent d’obtenir une mesure d’indépendance linéaire restreinte de 1, ζ (1) et ζ (3) (sachantque l’indépendance linéaire sur Q de ces trois nombres reste conjecturale).Certains détails supplémentaires pourront être obtenus dans la thèse de l’auteur [Dau14],notamment sur l’application des résultats montrés ici à des formes linéaires en 1, ζ (2) et ζ (3) .Pour le reste de cet article, p sera un entier ≥ .2. Critères quantitatifs généraux
Le théorème suivant généralise le théorème 1.3 de l’introduction (qui est obtenu dans le casparticulier où e i = (0 , . . . , , , , . . . , − ξ i ) avec le en i -ème position pour ≤ i ≤ p − et e p = ( ξ , . . . , ξ p − , , avec le réseau Λ n de la forme L pi =1 δ i,n Z ).On note ( R p ) ∗ le dual de R p , sur lequel on fixe une norme k . k . héorème 2.1 : Soit ( e , . . . , e p ) une base de R p .Soient τ , . . . , τ p − des réels > − et 2 à 2 distincts. Soit ( Q n ) n ∈ N une suite d’entiersstrictement croissante telle que Q n +1 = Q o (1) n . Soit (Λ n ) n ∈ N une suite de réseaux de ( R p ) ∗ telle que Λ n +1 ⊂ Λ n . On considère une suite ( L n ) n ∈ N de formes linéaires telle que(1) L n ∈ Λ n pour tout n ∈ N ,(2) | L n ( e i ) | = Q − τ i + o (1) n pour ≤ i ≤ p − ,(3) k L n k = Q o (1) n .Alors pour tout ε > et pour tout Q assez grand en termes de ε , on a Λ ⊥ Φ( Q ) ∩ C Q,ε = { } , où Φ( Q ) = max { k ∈ N , Q k ≤ Q } , Λ ⊥ n est le réseau dual de Λ n et C Q,ε = ( p X i =1 λ i e i , | λ i | < Q τ i − ε pour ≤ i ≤ p − et | λ p | < Q − − ε ) . Par définition, Λ ⊥ n est l’ensemble des vecteurs x ∈ R p tels que L ( x ) ∈ Z pour toute formelinéaire L ∈ Λ n (voir par exemple [Cas97] chapitre I.5 page 23). Dans le cas particulier de lasection 3 ci-dessous, Λ n = L pi =1 δ i,n Z est l’ensemble des formes linéaires L = ℓ X + · · · + ℓ p X p telles que δ i,n (cid:12)(cid:12) ℓ i pour tout ≤ i ≤ p . On voit alors que Λ ⊥ n est l’ensemble des ( x , . . . , x p ) ∈ Q p tels que δ i,n x i ∈ Z pour tout i ∈ { , . . . , p } .La preuve [Fis13] du théorème 1.2 repose sur le lemme suivant (Lemma 3 de [Fis13]) : Lemme 2.2 ( Fischler, 2011) : Soit M ∈ M p ( R ) une matrice carrée de taille p , dont les coefficients m i,j sont non nuls etvérifient | m i ′ ,j m i,j ′ | ≤ p + 1)! | m i,j m i ′ ,j ′ | pour tous i , j, i ′ , j ′ tels que i < i ′ et j < j ′ . (1)Alors M est inversible.Ce lemme est démontré et utilisé dans [Fis13] (avec une majoration des coeficients de M − qui est inutile ici) sous l’hypothèse que les coefficients m i,j sont strictement positifs. Mais lapreuve de [Fis13] fonctionne plus généralement dès que m i,j = 0 , car elle utilise seulement lesmajorations (1) sur les valeurs absolues des coefficients. Démonstration du théorème 2.1.
Tout d’abord, notons ||| . ||| la norme sur ( R p ) ∗ subordonnéeà la norme N sur R p définie par N ( µ e + · · · + µ p e p ) = max ≤ i ≤ p | µ i | . Pour tout n ∈ N , ilexiste x = µ e + · · · + µ p e p tel que N ( x ) = 1 et ||| L n ||| = | L n ( x ) | ≤ p X i =1 | µ i L n ( e i ) | ≤ | L n ( e p ) | + p − X i =1 Q − τ i + o (1) n . omme τ i > − pour tout ≤ i ≤ p − , l’hypothèse (3) montre (puisque toutes les normessont équivalentes sur ( R p ) ∗ ) que | L n ( e p ) | ≥ Q o (1) n . Comme l’inégalité dans l’autre sensdécoule immédiatement de l’hypothèse (3), on a égalité.Soit ε > et Q suffisamment grand par rapport à ε . Soit ε > tel que (cid:26) τ i (cid:0) − (1 + ε ) p − (cid:1) < ε pour tout i ∈ { , . . . , p − } ( ε + 1) p − − < ε . (2)On remarque que seuls les i ∈ { , . . . , p − } tels que τ i < fournissent une contrainte sur ε .On définit ϕ : N ∗ → N ∗ par ϕ ( n ) − Q ε n ) = max { k ∈ N , Q k ≤ Q ε n } . On endéduit ϕ ( n ) ≥ n + 1 , d’où lim n →∞ ϕ ( n ) = + ∞ . Ainsi, Q ϕ ( n ) = Q o (1) ϕ ( n ) − . Mais d’autre part,la définition de ϕ nous donne Q ϕ ( n ) = Q ε + o (1) n , de sorte que Q ϕ i ( n ) = Q ε + o (1) ϕ i − ( n ) = Q (1+ ε ) i + o (1) n , où ϕ i est la i -ème itérée de ϕ ( i.e. , ϕ i = ϕ ◦ · · · ◦ ϕ | {z } i fois ), avec ϕ ( n ) = n et ϕ ( n ) = ϕ ( n ) .On choisit maintenant n = Φ( Q ) . Par définition de Φ( Q ) , on a donc Q n ≤ Q < Q n +1 ≤ Q ϕ ( n ) . On remarque alors que n −−−−→ Q →∞ + ∞ et donc o (1) est une suite tendant vers 0 quand n ou Q tendent vers + ∞ indifféremment. On pourra donc utiliser o (1) −−−−→ Q →∞ ou o (1) −−−→ n →∞ sans distinction ; on notera simplement o (1) . De plus, l’encadrement précédent nous donne aussi Q n = Q o (1) .En posant M n = ( L ϕ i − ( n ) ( e j )) ≤ i,j ≤ p ∈ M p ( R ) , on a (cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12) L ϕ i ′− ( n ) ( e j ) L ϕ i − ( n ) ( e j ′ ) L ϕ i − ( n ) ( e j ) L ϕ i ′− ( n ) ( e j ′ ) (cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12) = Q − ( τ i ′ − τ i )((1+ ε ) j ′ − (1+ ε ) j )+ o (1) n , et donc le lemme 2.2 s’applique pour n suffisamment grand. Ainsi, la matrice M n est inversibleet les formes linéaires L n , . . . , L ϕ p − ( n ) sont linéairement indépendantes.On considère P ∈ C Q,ε ∩ Λ ⊥ n non nul. Si Q est assez grand, L n , . . . , L ϕ p − ( n ) sont linéairementindépendants et forment donc une base de l’espace dual de R p : il existe k ∈ { , . . . , p − } tel que L ϕ k ( n ) ( P ) = 0 .Par hypothèse sur la suite de réseaux, on a Λ ⊥ n ⊂ Λ ⊥ ϕ k ( n ) . Donc, par définition du réseaudual, L ϕ k ( n ) ( P ) ∈ Z \ { } .Mais en notant P = P pi =1 λ i e i comme dans la définition de C Q,ε , on a : L ϕ k ( n ) ( P ) | ≤ p X i =1 | λ i || L ϕ k ( n ) ( e i ) | = p − X i =1 Q τ i − ε (cid:16) Q (1+ ε ) k + o (1) n (cid:17) − τ i + o (1) + Q − − ε (cid:16) Q (1+ ε ) k + o (1) n (cid:17) o (1) ≤ p − X i =1 Q τ i (1 − (1+ ε ) k ) − ε/ + Q (1+ ε ) k − − ε/ . Mais par le choix (2) de ε , chacun des exposants est < . Donc, en prenant Q assez grand,on aura | L ϕ k ( n ) ( P ) | < , ce qui aboutit à une contradiction. (cid:3) Le critère d’indépendance linéaire de Nesterenko [Nes85] admet un analogue “à la Siegel”dont la preuve repose simplement sur un calcul de déterminant (voir par exemple la proposition1 de [Fis13] ou la proposition 4.1 de Marcovecchio [Mar06]). Dans le cas dual où on part d’ap-proximations simultanées de ξ , . . . , ξ p − , on peut de même obtenir un analogue du théorème1.2 ; il s’agit (en l’absence de diviseurs) d’un cas particulier de la proposition 1 de [Fis13].Pour exploiter la présence de diviseurs δ i,n , on peut appliquer le résultat suivant “à la Siegel”,dans lequel les conditions sur les tailles des objets sont affaiblies. Le théorème nécessite encontrepartie une quantité de formes linéaires consécutives et linéairement indépendantes ainsiqu’une relation de récurrence vérifiée par la suite de formes linéaires. En effet, Siegel a étéle premier à comprendre dans son article [Sie29] que l’on pouvait démontrer l’indépendancelinéaire de nombres ξ , . . . , ξ p − en construisant un système de formes linéaires linéairementindépendantes à coefficients entiers, petites en ( ξ , . . . , ξ p − ) .
1. On pourra trouver deux versions résumées de cet article dans [FN98] Chapitre 2, Âğ1, pages 81-82 etChapitre 5, Âğ2, pages 215-216. héorème 2.3 : Soit ( e , . . . , e p ) une base de R p .Soient τ , . . . , τ p − des réels > − et ( Q n ) n ∈ N une suite d’entiers strictement croissantetelle que Q n +1 = Q o (1) n . Soit (Λ n ) n ∈ N une suite de réseaux de ( R p ) ∗ telle que Λ n +1 ⊂ Λ n .On considère une suite ( L n ) n ∈ N de formes linéaires telle que(i) pour tout n ∈ N , L n ∈ Λ n ;(ii) | L n ( e i ) | ≤ Q − τ i + o (1) n pour ≤ i ≤ p − ;(iii) k L n k ≤ Q o (1) n ;(iv) la suite de formes linéaires vérifie une relation de récurrence : il existe n ≥ tel quepour tout n ≥ n , il existe des nombres réels α ( n ) , . . . , α p − ( n ) tels que L n + p = P p − i =0 α i ( n ) L n + i avec α ( n ) = 0 .On suppose enfin qu’il existe n ≥ n tel que L n , . . . , L n + p − soient linéairement indé-pendantes.Alors pour tout ε > , pour tout Q assez grand en termes de ε , on a Λ ⊥ Φ( Q ) ∩ C Q,ε = { } , où Φ( Q ) = max { k ∈ N , Q k ≤ Q } et C Q,ε = ( p X i =1 λ i e i , | λ i | ≤ Q τ i − ε pour ≤ i ≤ p − , et | λ p | ≤ Q − − ε ) . Notons qu’à la place de la relation de récurrence et de l’existence de p formes linéairesconsécutives linéairement indépendantes, on peut supposer que parmi k formes linéaires consé-cutives L n , . . . , L n + k − , il y en a toujours p qui sont linéairement indépendantes (où k ≥ p est un entier fixé). En effet, on peut alors noter ϕ l’extraction telle que ϕ ( n + 1) =min (cid:8) m > ϕ ( n ) , L m / ∈ Vect ( L ϕ ( n − p +2) , . . . , L ϕ ( n ) ) (cid:9) , et on a ϕ ( n + 1) − ϕ ( n ) ≤ k − qui estune constante, de sorte que Q ϕ ( n +1) = Q o (1) ϕ ( n ) . Comme L ϕ ( n ) , . . . , L ϕ ( n + p − est une base de ( R p ) ∗ , on peut écrire L ϕ ( n + p ) = P p − j =0 α j ( n ) L ϕ ( n + j ) et on a nécessairement α ( n ) = 0 , carsinon L ϕ ( n + p ) ∈ Vect ( L ϕ ( n +1) , . . . , L ϕ ( n + p − ) ce qui n’est pas possible par choix de ϕ . Et lethéorème s’applique donc à la suite extraite grÃćce à ϕ .Quand on suppose qu’il y a une relation de récurrence, son ordre doit être nécessairement ≥ p car l’hypothèse de p formes linéaires linéairement indépendantes est primordiale. Cettehypothèse nous permet d’assurer que L n + k ( P ) n’est pas nulle pour un certain k ∈ { , . . . , p − } dès que P = , point essentiel de la preuve. Démonstration.
Comme au début de la preuve de la proposition 2.1, on remarque que | L n ( e p ) | ≤ Q o (1) n .La matrice ∆ n = L n ( e ) . . . L n + p − ( e ) ... . . . ... L n ( e p ) . . . L n + p − ( e p ) st de déterminant non nul pour n = n . D’autre part, on remarque querg (∆ n +1 ) = rg (∆ n ) car α ( n ) = 0 donc pour tout n ≥ n , rg (∆ n ) = rg (∆ n ) = p . Donc toutes les matrices ∆ n sont de déterminant non nul.De même que dans la démonstration du théorème 2.1, on a n −−−−−→ Q → + ∞ + ∞ si n = Φ( Q ) ,de sorte que Q n = Q o (1) et les suites o (1) sont des suites tendant vers 0 quand n ou Q tendent vers + ∞ indifféremment.Soit ε > et Q assez grand en termes de ε pour avoir n = Φ( Q ) ≥ n , n . Soit P ∈ Λ ⊥ Φ( Q ) ∩ C Q,ε \ { } . Comme det(∆ n ) = 0 , on sait que toute combinaison linéaire non trivialedes lignes de la matrice ∆ n est non nulle. En particulier, il existe k ∈ { , . . . , p − } tel que L n + k ( P ) = 0 . En outre, L n + k ( P ) ∈ Z car P ∈ Λ ⊥ n ⊂ Λ ⊥ n + k .La fin de la preuve est alors identique à celle du théorème 2.1. (cid:3) Applications à une base particulière de R p et à des réseaux particuliers Dans toute cette section, on se place dans le cadre particulier d’une base de la forme e i = (0 , . . . , , , , . . . , , − ξ i ) avec le 1 en i -ème position pour ≤ i ≤ p − et e p =( ξ , . . . , ξ p − , et de réseaux Λ n = L pi =1 δ i,n Z . Ce cas particulier a déjà été mentionné audébut de la section 2.Le théorème 1.3 de l’introduction est en fait un corollaire du théorème 2.1 (voir la démons-tration ci-dessous). Son intérêt est qu’il est plus conforme à ce qu’on a en pratique.Il raffine le théorème 1.2 de [Fis13] cité dans l’introduction : la principale nouveauté est queles formes linéaires ℓ i,n − ξ i ℓ p,n ne tendent plus forcément vers 0, puisque les τ i peuvent êtrenégatifs. Par ailleurs, les contraintes sur les diviseurs δ i,n sont affaiblies. La seule contrepartieest qu’on demande aux coefficients ℓ i,n d’être, en valeur absolue, égaux à Q o (1) n (il suffit defaire cette hypothèse pour i = p , puisque τ i > − pour tout i ≤ p − ). En pratique, celane pose pas de problème (quitte à diminuer Q n si nécessaire, ce qui améliore la conclusion duthéorème), puisqu’on a | ℓ p,n | < | ℓ p,n +1 | = | ℓ p,n | o (1) dans les applications.Pour démontrer le théorème 1.2, Fischler combine le lemme 2.2 (avec p − au lieu de p )avec le premier théorème de Minkowski sur les corps convexes. Pour démontrer le théorème 1.3,on applique ce lemme à une matrice carrée de taille p (en utilisant notamment l’hypothèse (iii))et on obtient ainsi p vecteurs linéairement indépendants qui fournissent des approximationssimultanées de ξ , . . . , ξ p − par des nombres rationnels ayant le même dénominateur. Celapermet de conclure la preuve par un argument à la Siegel, sans utiliser la géométrie des nombres.On évite ainsi les hypothèses sur les diviseurs, présentes dans le théorème 1.2, et on a pas besoinde supposer τ , . . . , τ p − > .Une preuve directe du théorème 1.3 figure dans le paragraphe 4 de [Dau14]. Dans cet article,on déduit ce résultat du théorème 2.1 démontré au § 2.On remarque aussi que sous l’hypothèse supplémentaire δ i,n = Q γ i + o (1) n (hypothèse qui serautile au § 4), on a nécessairement a i = 0 pour tous les i tels que τ i + γ i < . Le lecteurobtiendra plus de détails dans la démonstration de la propositions 4.2. utre les formes linéaires qui peuvent tendrent vers + ∞ au lieu de seulement 0, les différencesentre le théorème 1.3 et le théorème 1.2 sont les suivantes :– Dans le théorème 1.3, on ne démontre plus que , ξ , . . . , ξ p − sont linéairement indépen-dants sur Q . C’est une contrepartie de la remarque précédente selon laquelle les formeslinéaires ne tendent pas forcément vers 0. La conclusion du théorème 1.3 n’est donc quequantitative.– Si δ i,n = Q γ i + o (1) n quand n → + ∞ avec ≤ i ≤ p − et γ i ≥ tel que τ i ≤ − γ i ,alors l’entier δ i, Φ( Q ) a i est majoré par Q − ε + o (1) , donc a i = 0 dès que Q est assez grand.Dans ce cas, le théorème 1.3 ne concerne pas vraiment ξ i . Lorsque γ i = 0 pour tout i (notamment si δ i,n = 1 ), la situation est identique à celle du théorème 1.2 : la conclusionconcerne uniquement les ξ i tels que τ i > .– La condition (a) du théorème 1.2 sur les diviseurs a disparu et la condition (b) sur ladivisibilité des quotients successifs a été restreinte à i = 0 .– La condition asymptotique (c) sur les suites de diviseurs ( δ i,n ) n ≥ a disparu. En revanche,la condition (e) sur la taille des coefficients de la suite des formes linéaires a été renforcée :dans le théorème 1.2, seule l’inégalité max ≤ i ≤ p | ℓ i,n | ≤ Q o (1) n lorsque n → + ∞ estexigée. Mais dans le théorème 1.3, on exige que la taille soit exactement de Q o (1) n . End’autres termes, on change cette hypothèse en la condition plus forte | ℓ p,n | = Q o (1) n quand n → + ∞ . Cette condition est cruciale dans la preuve et elle est souvent vérifiée enpratique. Démonstration du théorème 1.3.
Comme indiqué dans le début de cette partie, on pose e i = (0 , . . . , , , , . . . , , − ξ i ) avec le 1 en i -ème position, pour ≤ i ≤ p − , et e p =( ξ , . . . , ξ p − , ; alors ( e , . . . , e p ) forme une base de R p .On pose maintenant ε ′ = ε/ et Q ′ = p − X i =1 ξ i ! Q ε ! ε ′ . (3) Q ′ peut donc être pris aussi grand que nécessaire par rapport à ε ′ , en choisissant Q assez grand.On pose, pour tout n ∈ N , Λ n = L pi =1 δ i,n Z . La relation δ i,n (cid:12)(cid:12) δ i,n +1 nous donne Λ n +1 ⊂ Λ n .On pose aussi L n = ( ℓ i,n , . . . , ℓ p,n ) . On a donc L n ∈ Λ n pour tout n ∈ N . On a également,pour tout i ∈ { , . . . , p − } et tout n ∈ N , | L n ( e i ) | = | ℓ i,n − ℓ p,n ξ i | = Q − τ i + o (1) n . L’inégalitétriangulaire | ℓ i,n | ≤ | ℓ i,n − ξ i ℓ p,n | + | ξ i || ℓ p,n | nous donne | ℓ i,n | ≤ Q o (1) n pour tout i ∈{ , . . . , p − } car τ i > − de sorte que k L n k ∞ ≤ Q o (1) n , où k x k ∞ = max ≤ i ≤ p | x i | .Finalement, on obtient grÃćce à l’hypothèse (iii), puisque toutes les normes sont équivalentessur ( R p ) ∗ , k L n k = Q o (1) n .On peut donc appliquer le théorème 2.1 pour obtenir, si Q est assez grand, Λ ⊥ Φ( Q ′ ) ∩ C Q ′ ,ε ′ = { } . (4)On prend ( a , . . . , a p ) ∈ Λ ⊥ Φ( Q ) non nul, avec | a i | ≤ Q τ i − ε pour ≤ i ≤ p − et | a ξ + · · · + a p − ξ p − + a p | < Q − − ε . On va montrer qu’on aboutit à une contradiction. n pose, pour i ∈ { , . . . , p − } , λ i = a i − ξ i P p − k =1 a k ξ k + a p P p − k =1 ξ k et u = P ≤ k ≤ p − a k ξ k + a p P ≤ k ≤ p − ξ k . On obtient alors les relations suivantes pour i ∈ { , . . . , p − } : a i = λ i + uξ i et a p = u − P ≤ i ≤ p − λ i ξ i . On pose P = λ e + · · · + λ p − e p − + ue p , si bien que P = ( a , . . . , a p − , a p ) ∈ Λ ⊥ Φ( Q ) \ { } par construction.On a les majorations suivantes : | u | ≤
11 + P ≤ i ≤ p − ξ i Q − − ε = Q ′− − ε ′ et, pour i ∈ { , . . . , p − } : | λ i | ≤ Q τ i − ε + | ξ i | P p − k =1 ξ k Q − − ε ≤ | ξ i | P p − k =1 ξ k ! Q τ i − ε car τ i > − ≤ p − X k =1 ξ k ! τi − ε/ ε Q τ i − ε si Q est assez grand = p − X k =1 ξ k ! Q ε ! τi − ε/ ε = Q ′ ε ′ ε ( τ i − ε ) ≤ Q ′ τ i − ε ′ par définition de Q ′ et car ε ′ ε = ε ′ ε ′ < et ε/ ε ′ .Finalement, on a P = P ≤ i ≤ p − λ i e i + ue p = dans Λ ⊥ Φ( Q ) avec | λ i | ≤ Q ′ τ i − ε ′ et | u | ≤ Q ′− − ε ′ . Et comme ε ε ′ > , on a Q ′ = (cid:16) P p − i =1 ξ i (cid:17) ε ′ Q ε ε ′ > Q si Q est assezgrand. Donc, Φ( Q ′ ) ≥ Φ( Q ) , et pour tout i ∈ { , . . . , p − } , δ i, Φ( Q ) divise δ i, Φ( Q ′ ) . Ainsi Λ ⊥ Φ( Q ) ⊂ Λ ⊥ Φ( Q ′ ) d’où P ∈ Λ ⊥ Φ( Q ′ ) et on a une contradiction avec (4). (cid:3) En fait, l’implication démontrée ci-dessus entre la conclusion du théorème 2.1 et celle duthéorème 1.3 est une équivalence. Le lecteur pourra trouver la preuve précise de cette équiva-lence dans la thèse de l’auteur [Dau14] (proposition 6.3 au paragraphe 6.2).Comme dans la section 2, on donne ici une version du théorème 1.3 plus “à la Siegel” dansle cadre particulier de cette section. héorème 3.1 : Soient ξ , . . . , ξ p − des réels quelconques, et τ , . . . , τ p − des réels > − . Soit ( Q n ) n ≥ une suite strictement croissante d’entiers positifs telle que Q n +1 = Q o (1) n . On supposeégalement que pour tout n ∈ N et pour tout i ∈ { , . . . , p } , il existe δ i,n ∈ N ∗ et ℓ i,n ∈ Z tels que δ i,n divise δ i,n +1 et :(i) ∀ i ∈ { , . . . , p } , δ i,n | ℓ i,n ;(ii) ∀ i ∈ { , . . . , p − } , | ℓ i,n − ξ i ℓ p,n | ≤ Q − τ i + o (1) n ;(iii) | ℓ p,n | ≤ Q o (1) n ;(iv) il existe un entier n tel que, pour tout n ≥ n , il existe des réels α ( n ) , α ( n ) , . . . , α p − ( n ) avec α ( n ) = 0 , tels que pour tout i ∈ { , . . . , p } onait : ℓ i,n + p = p − X j =0 α j ( n ) ℓ i,n + j . On suppose enfin que si l’on note ∆ n la matrice suivante de taille p × p : ∆ n = ℓ ,n · · · ℓ ,n + p − ... . . . ... ℓ p,n · · · ℓ p,n + p − , il existe un certain n ≥ n tel que det(∆ n ) = 0 .Soit ε > , Q > suffisamment grand en fonction de ε et soit ( a , . . . , a p ) ∈ Q p \ { } ,tel que δ i, Φ( Q ) a i ∈ Z pour ≤ i ≤ p et | a i | ≤ Q τ i − ε pour ≤ i ≤ p − , où Φ( Q ) =max { m ∈ N , Q m ≤ Q } . Alors on a | a ξ i + · · · + a p − ξ p − + a p | ≥ Q − − ε . De même que pour le théorème 2.3, il suffirait que parmi k formes linéaires consécutives L n , . . . , L n + k − avec L n = ( ℓ ,n , . . . , ℓ p,n ) , il y en ait toujours p qui soient linéairement indé-pendantes (où k ≥ p est un entier fixé).La conclusion de ce critère “à la Siegel” est la même que celle du théorème 1.3 (qui estdavantage dans l’esprit du critère de Nesterenko). Les différences entre ces deux énoncés sontles suivantes :– Dans tout critère à la Siegel, on a besoin d’une hypothèse assurant l’indépendance linéairede p formes linéaires. Dans le théorème 3.1, cette hypothèse prend la forme d’un détermi-nant non nul (celui de ∆ n , avec une valeur fixée de n ) et d’une relation de récurrence.L’absence de cette hypothèse est un des intérêts des critères à la Nesterenko.– Les formes linéaires ℓ i,n − ℓ p,n ξ i ne doivent pas être trop petites dans le théorème 1.3 :on a besoin d’une estimation exacte et pas seulement d’une majoration de | ℓ i,n − ℓ p,n ξ i | .C’est l’une des différences majeures entre les critères à la Nesterenko et ceux à la Siegel ;lorsqu’on ne fait aucune hypothèse d’indépendance sur les formes linéaires, une minorationde | ℓ i,n − ℓ p,n ξ i | s’avère toujours nécessaire (voir cependant la proposition 1 de [FZ10]),alors qu’elle est inutile dans les critères à la Siegel comme le théorème 3.1. Une majoration | ℓ p,n | ≤ Q o (1) n est suffisante dans le théorème 3.1 alors qu’une égalité estrequise dans le théorème 1.3. Cette différence est plutôt inhabituelle, car une majorationà cet endroit suffit généralement, même dans les critères de type Nesterenko. Démonstration.
De même que pour la démonstration du théorème 1.3, on pose e i = (0 , . . . , , , , . . . , , − ξ i ) pour ≤ i ≤ p − et e p = ( ξ , . . . , ξ p − , . On pose Λ n = L pi =1 δ i,n Z et L n = ( ℓ ,n , . . . , ℓ p,n ) . On a donc L n ∈ Λ n , Λ n +1 ⊂ Λ n , | L n ( e i ) | ≤ Q − τ i + o (1) n et l’inégalité triangulaire nous donne k L n k ≤ Q o (1) n . La récurrence sur les ℓ i,n , pour tout i ∈ { , . . . , p } , nous fournit la même récurrence pour la suite de formes linéaires L n . Et l’hy-pothèse sur la matrice ∆ n donne exactement l’indépendance linéaire de L n , . . . , L n + p − .On pose ε ′ = ε/ et Q ′ comme dans (3) de la démonstration du théorème 1.3. On peutdonc appliquer le théorème 2.3 et on obtient Λ ⊥ Φ( Q ′ ) ∩ C Q ′ ,ε ′ = { } . La fin de la démonstration est alors similaire à celle du théorème 1.3. (cid:3) Optimalité
Dans cette section, on se place encore dans le cadre particulier qui a fait l’objet de l’étudedu § 3.On vérifie que les conclusions des théorèmes 1.3 et 3.1 sont optimales en construisant uneréciproque à ces énoncés. Il ne s’agit cependant pas de réciproques au sens propre du terme,car les formes linéaires qu’on va construire (en supposant fausses les conclusions des critères,c’est-à-dire les mesures d’indépendance linéaire restreintes) ne satisferont pas ( a priori ) à toutesles hypothèses de ces critères.Dans le cas le plus simple où on considère un seul nombre et pas de diviseurs, le critère deNesterenko se réduit au lemme classique suivant.
Lemme 4.1 :
Soit ξ ∈ R \ Q , et α, β ∈ R tels que < α < et β > . Supposons qu’il existe des suitesd’entiers ( u n ) n ≥ et ( v n ) n ≥ tels que lim n → + ∞ | u n ξ − v n | /n = α et lim sup n → + ∞ | u n | /n ≤ β . Alors µ ( ξ ) ≤ − log β log α .Dans ce cas particulier, Fischler et Rivoal ont quasiment démontré [FR10] la réciproque,au sens propre du terme, de ce résultat. Ils obtiennent même des suites ( u n ) n ≥ et ( v n ) n ≥ satisfaisant à des estimations asymptotiques plus précises que celles des hypothèses du lemme4.1. Le seul défaut de leur énoncé pour que ce soit véritablement une réciproque, est l’inégalitéstricte µ ( ξ ) < − log β log α dans l’hypothèse, au lieu de l’inégalité au sens large. Dans [Fis09],Fischler établit également une réciproque presque complète pour l’exposant d’approximation ationnelle restreinte µ ψ qui inclut des diviseurs. Ici encore, la réciproque construite n’est pascomplète car l’inégalité large du résultat est prise au sens strict dans la réciproque.Mais ces deux exemples de réciproques de critères “à la Nesterenko” ne concernent qu’uneseule variable : les formes linéaires construites sont des formes linéaires en 1 et ξ seulement.Or, nous avons besoin de formes en plusieurs variables , ξ , . . . , ξ p − . L’article [FHKL13] deFischler, Hussain, Kristensen et Levesley contient une réciproque au critère de Nesterenko àplusieurs variables, valable presque partout au sens de la mesure de Lebesgue. Ce résultatfournit une sorte de réciproque (valable presque partout) aux théorèmes 1.3 et 3.1 lorsque Λ n est le réseau des formes linéaires à coefficients entiers. Toujours dans la direction de formeslinéaires en plusieurs variables, Chantanasiri démontre également (§ 3 de [Cha12]) une sorte deréciproque sous une hypothèse très forte (une mesure d’indépendance linéaire). Plus de détailsà ce sujet peuvent être trouvés dans le paragraphe 2.4 de [Dau14].On adopte ici la même approche en essayant d’établir une sorte de réciproque aux théorèmes1.3 et 3.1. On montre que sous la condition de l’existence de p -uplets a = ( a , . . . , a p ) ∈ Λ ⊥ Φ( Q ) \ { } avec | a i | ≤ Q τ i − ε et | a ξ + · · · + a p − ξ p − + a p | < Q − − ε pour un ε > donné et une infinité de Q (ce qui est presque le contraire de la conclusion des théorèmes 1.3et 3.1), on peut construire des entiers ℓ i,n non tous nuls tels que | ℓ i,n − ξ i ℓ p,n | ≤ Q − τ i + o (1) n et | ℓ p,n | ≤ Q o (1) n pour n assez grand (voir la proposition 4.3 ci-dessous).On commence par montrer que les hypothèses du théorème 1.3 ne sont pas trop fortes et qu’ilest possible de construire, pour des réels ξ , . . . , ξ p − donnés, des formes linéaires satisfaisantà la plupart des conditions du théorème 1.3. Puis, on se pose la même question vis à visdes a i . En effet, chacun des énoncés des parties précédentes affirme qu’une forme linéaire en , ξ , . . . , ξ p − , à coefficients entiers pas trop gros et suffisamment divisibles, ne peut être troppetite. On démontre dans la proposition 4.2 ci-dessous que cette conclusion n’est pas triviale,c’est-à-dire que (pour certaines valeurs des paramètres) une telle forme linéaire peut être trèspetite. roposition 4.2 : Soient ξ , . . . , ξ p − des réels quelconques et τ , . . . , τ p − des réels > − .On prend pour tout i ∈ { , . . . , p } , et tout n ∈ N , δ i,n ∈ N ∗ avec δ i,n | δ i,n +1 . On note Λ n = δ ,n Z ⊕· · ·⊕ δ p,n Z le réseau qu’ils définissent. On considère aussi ( Q n ) n ∈ N une suite d’entiersstrictement croissante avec Q n +1 = Q o (1) n . On suppose que pour tout i ∈ { , . . . , p } , ilexiste γ i ∈ R tel que δ i,n = Q γ i + o (1) n . On note Φ( Q ) = max { k ∈ N , Q k ≤ Q } . Alors : • Si γ p + X ≤ i ≤ p − τ i + γ i ≥ τ i + γ i ≤ , (5)alors il existe, à partir d’un certain rang, ( ℓ ,n , . . . , ℓ p,n ) ∈ Λ n \{ } tel que | ℓ p,n ξ i − ℓ i,n | ≤ Q − τ i + o (1) n pour i ∈ { , . . . , p − } et | ℓ p,n | ≤ Q o (1) n . • Si γ p + X ≤ i ≤ p − τ i + γ i ≥ τ i + γ i > , (6)alors, pour tout ε > , tout Q suffisamment grand par rapport à ε , il existe ( a , . . . , a p ) ∈ Λ ⊥ Φ( Q ) \ { } avec | a i | ≤ Q τ i − ε pour i ∈ { , . . . , p − } et | a ξ + · · · + a p − ξ p − + a p | ≤ Q − − ε .Remarquons que γ i ≥ et que de plus, si a i = 0 et Q est suffisamment grand, on a forcément Q − γ i − εn ≤ δ i,n ≤ | a i | ≤ Q τ i − εn avec n = Φ( Q ) , de sorte que γ i + τ i ≥ . Ainsi, γ i + τ i < impose a i = 0 , ce qui motive le second point de la proposition. Démonstration.
On note J = n j ∈ { , . . . , p − } , τ j + γ j ≥ o et α = p − | J | ∈ { , . . . , p } .On a donc | J | = p − α . On considère aussi le réseau Λ ′ n = L j ∈ J ∪{ p } δ j,n Z ⊂ R J ∪{ p } qui estde déterminant δ p,n Q j ∈ J δ j,n = Q γ p + P j ∈ J γ j + o (1) n .Commençons par démontrer le premier point.On considère K n = n x ∈ R J ∪{ p } , | x p ξ j − x j | ≤ Q − τ j + o (1) n , j ∈ J, et | x p | ≤ Q o (1) n o . C’estun compact convexe, symétrique, centré en l’origine et de volume p − α +1 Q − P j ∈ J τ j + o (1) n . Maisl’hypothèse (6) signifie − X j ∈ J τ j ≥ γ p + X j ∈ J γ j , ce qui donne : Q − P j ∈ J τ j + o (1) n ≥ Q γ p + P j ∈ J γ j + o (1) n . Le théorème de Minkowski assure l’existence de ℓ j,n , pour j ∈ J , et ℓ p,n tels que | ℓ p,n ξ j − ℓ j,n | ≤ Q − τ j + o (1) n pour tout j ∈ J et | ℓ p,n | ≤ Q o (1) n .On choisit maintenant la suite o (1) comme étant une suite ( ε n ) strictement positive telleque ε n log Q n quand n → + ∞ et on prend un j / ∈ J . Alors, puisque τ j + γ j < , on a Q τ j − ε n n δ j,n + Q − ε n n ≤ Q τ j + γ j n + Q − ε n n < pour tout n assez grand. Ainsi, Q − τ j + ε n n − Q − τ j − ε n n >δ j,n dès que n est assez grand, et donc l’intervalle h − ℓ p,n ξ j − Q − τ j + ε n n , − ℓ p,n ξ j − Q − τ j − ε n n i ontient forcément un multiple ℓ j,n de δ j,n . Et ℓ j,n vérifie donc | ℓ j,n − ξ j ℓ p,n | ≤ Q − τ j + ε n n , ce quifinit la preuve du premier point.Montrons maintenant le deuxième point de la proposition.On introduit ε > tel que γ p + X ≤ i ≤ p − τ i + γ i ≥ τ i + γ i > p − α + 2) ε . On considère le compact K Q = a ∈ R J ∪{ p } , ∀ j ∈ J, | a j | ≤ Q τ j − ε et (cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12)X j ∈ J a j ξ j + a p (cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12)(cid:12) ≤ Q − − ε .K Q est un compact convexe, symétrique, centré en l’origine, de volume p − α +1 Q P j ∈ J τ j − − ( p − α +1) ε . Λ ′⊥ n , le réseau dual de Λ ′ n , est de déterminant inverse de celui de Λ ′ n , c’est-à-dire Q j ∈ J ∪{ p } δ j,n = Q − γ p − P j ∈ J γ j + o (1) n = Q − γ p − P j ∈ J γ j + o (1) ≤ Q − γ p − P j ∈ J γ j + ε , grÃćce à la définition de Φ( Q ) , aucomportement asymptotique de la suite ( Q n ) n ∈ N et en prenant Q suffisamment grand.On a alors, pour Q assez grand, Q P j ∈ J τ j − − ( p − α +1) ε > Q − γ p − P j ∈ J γ j + ε > det(Λ ′⊥ Φ( Q ) ) . Donc Vol ( K Q ) > p − α +1 det(Λ ′⊥ Φ( Q ) ) et le théorème de Minkowski assure l’existence d’un ( a j ) j ∈ J ∪{ p } ∈ K Q ∩ Λ ′⊥ Φ( Q ) non nul. On pose a j = 0 pour j J ∪ { p } , ce qui termine ladémonstration. (cid:3) Le deuxième point de la proposition précédente permet donc de construire une forme linéaireen , ξ , . . . , ξ p − qui contredit les conclusions des théorèmes 1.3 et 3.1 de la section 3. Ainsi,les conclusions de ces théorèmes impliquent que l’hypothèse (6) faite dans le second point dela proposition 4.2 est fausse. On peut alors appliquer le premier point et construire des ℓ i,n quivérifient une partie des hypothèses des théorèmes 1.3 et 3.1. Par conséquent, la combinaisondes deux points de la proposition 4.2 ci-dessus permet d’établir une sorte de réciproque auxthéorèmes 1.3 et 3.1. Proposition 4.3 :
Soit ξ , . . . , ξ p − des réels quelconques et τ i , . . . , τ p − des réels > − . Soit ( Q n ) n unesuite d’entiers strictement croissante telle que Q n +1 = Q o (1) n . Soit p suites d’entiers ( δ i,n ) n telles que pour tout i ∈ { , . . . , p } , tout n ∈ N , δ i,n (cid:12)(cid:12) δ i,n +1 et il existe γ i ∈ R telque δ i,n = Q γ i + o (1) n .Supposons qu’il existe ε > et une infinité de Q tels que pour tout ( a , . . . , a p ) ∈ Q p \ { } tel que ( δ , Φ( Q ) a , . . . , δ p, Φ( Q ) a p ) ∈ Z p avec | a i | ≤ Q τ i − ε pour ≤ i ≤ p − , on ait | a ξ + · · · + a p − ξ p − + a p | > Q − − ε .Alors pour tout n assez grand, il existe ℓ i,n ∈ δ i,n Z pour i ∈ { , . . . , p } , non tous nuls, telsque pour ≤ i ≤ p − , | ℓ i,n − ξ i ℓ p,n | ≤ Q − τ i + o (1) n et | ℓ p,n | ≤ Q o (1) n . a double absence de relation de récurrence et d’indépendance linéaire entre des rangs suc-cessifs des formes linéaires construites fait que ce n’est pas exacteme,t la réciproque du critèreà la Siegel du théorème 3.1. Ce n’est pas une réciproque exacte du critère à la Nesterenko duthéorème 1.3, les estimations sur les tailles des formes linéaires et de leurs coefficients sontexactes, alors que nous ne sommes en mesure ici d’obtenir que des majorations. Références [Bed98] Egor V.
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