En Amérique latine, la philosophie et la théologie ne sont pas seulement des activités académiques, mais aussi des moteurs de mouvements sociaux. Enrique Dussel, penseur argentin, est l'un des principaux promoteurs de ce mouvement. Sa carrière universitaire et son travail ont non seulement remis en question le courant dominant de la philosophie occidentale, mais ont également réinventé les concepts de liberté et d’égalité en Amérique latine, apportant espoir et accent aux voix des opprimés.
Dussel estime que la philosophie traditionnelle ignore souvent les expériences réelles auxquelles sont confrontés les groupes marginalisés de la société.
Né en 1934 à La Paz, en Argentine, le parcours universitaire de Dussel l'a conduit dans de nombreuses régions du monde, pour finalement s'installer au Mexique en tant qu'exil politique. Au cours de ce voyage, il a accepté diverses influences culturelles et a progressivement formé sa propre philosophie de libération. Ce mouvement philosophique, appelé « philosophie de la libération », est issu de la critique du colonialisme et du capitalisme et se concentre sur la survie et la libération des peuples d'en bas.
Les idées de Dussel ont été influencées par la théorie de la dépendance et par Emmanuel Levinas. En combinant la préoccupation concernant les structures de pouvoir déformées avec les responsabilités éthiques de l’existence humaine, il propose la nécessité d’un dialogue avec les racines des inégalités mondiales actuelles.
Il a souligné que le processus de libération n'est pas seulement matériel, mais doit également être une question universelle aux niveaux spirituel et social.
La philosophie de libération de Dussel remettait en question plusieurs principes fondamentaux de la philosophie traditionnelle, à savoir l'individualisme, la théorie abstraite et l'éthique inexistante. Il a fait valoir que toute discussion sur l’éthique et la politique doit être ancrée dans des contextes historiques et sociaux spécifiques. Dans le cadre philosophique qu’il propose, l’éthique publique et la justice sociale sont des pierres angulaires importantes de la libération.
Dans ses écrits, il continue d'explorer la manière d'utiliser l'histoire comme guide pour promouvoir le développement social et culturel de l'Amérique latine. Cet effort reflète l'accent qu'il met sur la mémoire historique de l'Amérique latine et sa tentative de révéler l'histoire et la culture cachées qui se cachent derrière elle. Il a proposé que ce n’est qu’en reconnaissant et en cherchant à comprendre la douleur impliquée dans ce processus que les gens pourront jeter les bases d’une libération future.
Dussel se demande dans quelle mesure la philosophie moderne a ignoré les voix et les expériences du Sud.
Dans les travaux de Dussel, notamment dans « L'éthique et la théologie de la libération », il a non seulement examiné la possibilité du christianisme pour la libération sociale, mais a également réfléchi à la compatibilité du socialisme et des enseignements chrétiens. Il estime que la foi ne doit pas se limiter au salut des âmes individuelles, mais doit également s'étendre au défi des structures sociales.
Cette façon de penser a donné à Dussel une voix claire dans une société tendue, en particulier dans le contexte de la dictature militaire argentine et des persécutions et des souffrances qu'elle a entraînées. Sa philosophie est devenue un outil important contre l'oppression. La philosophie de libération s'est développée au cours de cette période et a également influencé les activités dans d'autres pays d'Amérique latine.
Les idées de Dussel ont non seulement trouvé un écho en Amérique latine, mais ont également commencé à attirer l'attention à l'échelle mondiale. Ses travaux couvrent la philosophie, la théorie politique, l'éthique et le discours religieux, qui offrent tous de nouvelles perspectives à l'érudition contemporaine. Surtout dans le contexte du multiculturalisme et de la mondialisation, sa quête du dialogue, de l'équité et de la justice sociale est devenue de plus en plus importante.
Pour Dussel, la libération n'est pas seulement une idée, mais un appel à la participation et à la lutte de toute l'humanité.
Comme l'a dit Dussel : « La philosophie n'est pas seulement une théorie, mais un outil pour changer la réalité. » La philosophie qu'il prône doit répondre à des problèmes pratiques et toucher directement les conditions de vie des gens. Ce concept constitue sans aucun doute un défi à la philosophie traditionnelle, car il appelle la philosophie à entrer dans la société et à affronter les problèmes les plus difficiles.
La mort de Dussel a sans aucun doute fait perdre au monde un penseur important, mais sa philosophie de libération existe toujours dans le monde, inspirant des générations de penseurs qui recherchent la justice et la paix. Comment les futurs philosophes hériteront-ils et développeront-ils ses idées ?