La médiation comme voie d’accès aux droits et aux services en santé des populations vulnérables. Le cas de la Case de santé et de l’Atelier santé ville des quartiers Nord de Toulouse

Abstract

L’action publique de lutte contre les inegalites sociales de sante erige la mediation en reponse innovante aux defis que posent leur reduction [1] et, plus largement, l’accompagnement vers l’autonomie des populations les plus vulnerables. Participant des nouveaux modes de gouvernement des societes contemporaines [2] , la mediation en sante est un processus temporaire de «\xa0l’aller vers\xa0» et du «\xa0faire avec\xa0» visant une plus grande equite en sante. Elle designe une fonction d’interface, assuree en proximite, poursuivant un double objectif\xa0: d’une part, favoriser l’acces aux soins, aux droits et a la prevention des populations vulnerables en accroissant leurs capacites d’agir\xa0; d’autre part, sensibiliser les acteurs du systeme de sante aux obstacles qu’elles rencontrent. Prenant appui sur les differentes conceptions de l’innovation sociale elargie aux dimensions non technologiques, nous la definissons comme une reponse creative a des besoins sociaux non satisfaits. Issue d’initiatives locales, ascendantes et non gouvernementales, elle releve d’une triple dimension sociale, societale et organisationnelle, se fonde sur une demarche d’experimentations collectives, inclusives et participatives et poursuit une visee de changements dans les rapports sociaux et les arrangements institutionnels. Pour en attester, nous focalisons notre attention sur deux dispositifs toulousains mettant en œuvre des modalites singulieres de mediation\xa0: –\xa0laureate de l’appel d’offres du Ministere au titre des «\xa0projets pilotes d’accompagnement a l’autonomie en sante\xa0» (2017–2021), la Case de sante repose sur une organisation originale associant un centre de sante communautaire de premier recours et un pole d’acces aux droits\xa0; –\xa0volet sanitaire de la politique de la Ville, l’Atelier sante ville des quartiers Nord est anime par une approche sociale, preventive et territorialisee des inegalites de sante traitees selon une demarche de projets participatifs. Des recherches collaboratives menees sur ces deux dispositifs alimentent notre communication. Empruntant a une methodologie socio-ethnographique, nous avons realise une revue de la litterature, des etudes documentaires, des observations participantes, des focus-group et des entretiens individuels avec des acteurs diversement impliques nous permettant d’apprehender les conditions sociales d’une mediation en sante effective. Nous constatons que, si la mediation en sante constitue un instrument de modernisation des politiques publiques, son developpement se heurte a de nombreux obstacles lies au defaut d’intersectorialite entre les mondes de la sante et du travail social. Nous avancons toutefois que les deux dispositifs etudies contribuent a construire les conditions favorables a des innovations sociales susceptibles de changer les facons de faire de la sante publique au plus pres des besoins des populations vulnerables. Les pratiques et les principes deontologiques de la mediation en sante sont, en effet, a meme de cristalliser les problematiques sociales et sanitaires autour d’une dynamique collective et participative fortement ancree dans leurs contextes locaux et tirant parti des caracteristiques et ressources de ces derniers.