Revue de Médecine Interne | 2019

Un trismus révélant une amylose AL

 
 
 
 

Abstract


Introduction L’amylose AL est caracterisee par l’accumulation de depots fibrillaires de chaines legeres monoclonales. Elle peut toucher de nombreux organes comme le cœur, les reins, le systeme nerveux, le systeme digestif et parfois les parties molles comme les muscles. Nous rapportons ici une presentation atypique avec comme plainte un trismus, une claudication de la mâchoire et une dysphagie. Observation Une femme de 76\xa0ans a consulte en chirurgie maxillofaciale pour un trismus associe a une otalgie gauche evoluant depuis 18\xa0mois. Ses antecedents notables sont des morphees, un psoriasis et une hysterectomie pour fibromes. Elle avait consulte un chirurgien ORL en ville un an auparavant\xa0: l’IRM realisee avait trouve une infiltration aspecifique de la partie anterieure de la langue\xa0; le scanner du cou avait retrouve une infiltration diffuse des muscles sus-hyoidien sans masse individualisable. Les biopsies realisees avaient retrouve des ganglions sans signe de malignite\xa0; et l’absence de lesion musculaire specifique. L’avulsion d’une dent presentant un granulome apical n’avait pas modifie les symptomes. Il est decide une cervicotomie exploratrice qui a retrouve une infiltration et un epaississement de tous les muscles sous hyoidiens\xa0; l’analyse anatomopathologique extemporanee evoquait une myosite. La patiente est adressee en medecine interne pour poursuite des explorations. L’examen clinique retrouvait une claudication de la mâchoire evoluant depuis 2\xa0ans\xa0; une dysphagie fluctuante aux liquides et aux solides avec perte de 4\xa0kg en 6\xa0mois. Pas de deficit a l’examen neurologique\xa0; les reflexes osteotendineux etaient presents jusqu’en distalite. L’examen de la cavite buccale - gene par le trismus - retrouvait une macroglossie avec empreintes dentaires. Les analyses biologiques ne retrouvaient pas de cytopenies ni de syndrome inflammatoire\xa0; la fonction renale etait normale et la proteinurie negative\xa0; les CPK etaient normaux. Les anticorps antinucleaires tout comme ceux des myosites etaient negatifs. L’electrophorese des proteines realisee retrouvait une hypogammaglobulinemie a 4,6\xa0g/L sans pic avec une diminution de tous les isotypes\xa0; l’immunofixation serique ne revelait pas d’immunoglobuline monoclonale. Les chaines legeres libres seriques etaient dosees a 263\xa0mg/L pour les lambda et 7,8\xa0mg/L pour les kappa. L’analyse histologique des muscles sous mentaux retrouvait un infiltrat inflammatoire avec presence d’un tissu de granulation\xa0; le rouge Congo a revele des depots amyloides au sein des fibres musculaires et en perivasculaires avec une immunofluorescence positive pour les chaines legeres lambda. Le myelogramme realise retrouvait 80\xa0% de plasmocytes dysmorphiques. Les enzymes cardiaques, l’echocardiographie et l’IRM cardiaque etaient normaux. Pas de lesion myelomateuse aux radiographies du squelette ni a l’IRM du rachis et du bassin. Le diagnostic de myelome avec amylose AL infiltrant les muscles sus-hyoidiens sans atteinte cardiaque ni renale etait pose. Un traitement par melphalan/bortezomib/dexamethasone a ete debute. Apres 3\xa0cures, les chaines legeres etaient normalisees\xa0; la tolerance a ete marquee par neuropathie peripherique iatrogene justifiant le passage du bortezomib en hebdomadaire. A 6\xa0mois de traitement, amelioration de la macroglossie et de l’hypertrophie des muscles sus-hyoidiens avec une infiltration moins marquee a l’IRM, le trismus et la dysphagie persistaient, necessitent le recours a une alimentation enterale. Discussion La macroglossie est une lesion typique d’amylose\xa0; elle est presente dans 30\xa0% environ des amyloses AL avec atteinte musculaire. La claudication de la mâchoire est presente dans 12\xa0% des cas d’une serie d’amlylose AL avec atteinte musculaire [1] . En revanche la presence d’un trismus revelant les symptomes est rare\xa0; celle-ci pourrait etre causee par une arthropathie amyloide atteignant les articulations temporomandibulaire. Celle-ci est caracterisee par un epaississement ferme de la membrane synoviale associee a une douleur, une raideur avec limitation des amplitudes sans erosions. Elle est presente dans 3,7\xa0% des cas d’amylose AL\xa0; principalement dans les formes avec une atteinte des tissus mous et des os predominante [2] . Conclusion L’atteinte musculaire de l’amylose AL est de presentation variable pouvant aller d’une forme pseudo myositique a des formes localisees. L’absence de pic, de proteinurie et d’anomalie cardiaque ne doit pas faire eliminer le diagnostic. La coloration au rouge Congo est simple et peu onereuse et doit donc etre effectuee au moindre doute sur les biopsies musculaires pour ne pas retarder le diagnostic.

Volume 40
Pages None
DOI 10.1016/j.revmed.2019.10.145
Language English
Journal Revue de Médecine Interne

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