Paleobiology | 2019
Étude et description de la sépulture de l’enfant de l’abri Labattut (vallon de Castelmerle, Sergeac, Dordogne, France)
Abstract
La redecouverte du squelette de l’enfant de l’abri Labattut (vallon de Castelmerle, Sergeac, Dordogne), degage en 1913 par M. Castanet et « perdu » depuis sept decennies, a permis l’etude d’un ensemble inedit, comprenant le squelette de l’enfant et plusieurs dizaines de coquilles de gasteropodes. \nDu squelette, tres degrade a la suite des fouilles et d’une histoire chaotique posterieure a la decouverte, une datation 14C a pu etre effectuee. Elle indique un âge dryas ancien, synchrone du Magdalenien moyen recent, rompant avec la litterature anterieure qui attribuait le squelette au Solutreen. L’etude des os, du mobilier et de l’architecture du depot conforte la presomption de sepulture, ajoutant de precieux indices a la connaissance des pratiques funeraires du Paleolithique superieur, vu la rarete des tombes datees de cette epoque, a fortiori de sujets immatures. En effet, l’analyse de l’âge dentaire et des os situe l’enfant dans la classe d’âge 0-1 an. En revanche, le sexe est inconnu, et aucune pathologie expliquant le deces n’a ete diagnostiquee. \nLe corps a probablement ete inhume dans une fosse, de l’ocre a ete depose. De nombreux coquillages, ornant un vetement ou constituant un bijou ou encore tout autre objet, etaient associes. La majorite d’entre eux a, semble-il, une origine mediterraneenne et correspond a des choix de taille et d’especes traditionnelles : Tritia neritea, Homalopoma sanguineum, Zonaria pyrum ou Schilderia achatidea. Vitta picta, espece fossile des faluns bordelais, elargit le champ d’approvisionnement. \nTous les coquillages sont perces. Plus ou moins bien conserves, ils montrent des stigmates d’usage d’intensite variable selon les especes, invalidant l’hypothese d’un ensemble fabrique a l’occasion du deces. \nLa comparaison avec les autres sepultures du Paleolithique superieur europeen montre que la mort de cet enfant, en depit de son jeune âge, n’a pas donne lieu a un traitement funeraire particulier sauf en ce qui concerne la parure. Les caracteristiques de cette sepulture sont comparables a ce que l’on connait pour d’autres defunts adultes ou immatures. Toutefois, le nombre de coquillages est l’un des plus eleves pour une sepulture du Paleolithique superieur. Les cyprees – avec vingt-sept exemplaires, et cela en depit des difficultes supposees d’acquisition (rarete, eloignement…) de ces gasteropodes emblematiques et sans doute prises – constituent a elles seules un ensemble unique d’autant plus insolite que le defunt est un tres jeune enfant. \nPlusieurs hypotheses expliquant le depot de ces coquillages sont discutees (objets personnels, signe d’affection, temoignage de l’appartenance a un groupe particulier, privilegie ou non…). Aucune n’est veritablement demontrable, mais il demeure que l’inhumation de ce jeune enfant a donne lieu a une sequence de gestes temoignant de l’interet qui lui etait porte ou de ce qu’il representait.