Revue de Primatologie | 2019

Le jeu des illusions : discrimination entre apparence et réalité chez les primates

 

Abstract


La perception est un processus indispensable pour recueillir des informations sur notre environnement physique et social, et ajuster notre comportement aux changements de notre milieu de vie. Or, nous sommes tous les jours confrontes a des situations ambigues, comme le cas des illusions visuelles, ou les choses paraissent differentes de ce qu’elles sont en realite. De nombreuses etudes ont demontre que les primates non humains et l’humain partagent une sensibilite aux illusions mais qui differe entre les especes selon les caracteristiques et la disposition des elements visuels, mettant alors en evidence des differences interspecifiques dans l’organisation perceptuelle des stimuli visuels. Outre le fait d’y etre sensible, etre capable de comprendre quand une perception erronee peut nous amener a mal interpreter notre environnement, et par la meme a emettre un comportement inadapte, confere un avantage evolutif evident. Se rendre compte que ce que l’on percoit de notre environnement peut differer de la realite correspond ainsi a la capacite de discriminer l’apparence de la realite. La discrimination apparence-realite apparait importante socialement puisque nous pouvons etre trompes par les informations que nous recevons d’individus ou d’actions dans des interactions sociales complexes. Certains considerent ainsi cette capacite comme un prerequis au developpement d’une « Theorie de l’esprit », c est-a-dire la capacite a attribuer des etats mentaux a soi-meme et a autrui. Malgre son importance ecologique et sociale indeniable chez les primates, la discrimination apparence-realite n’a suscite l’interet que des psychologues du developpement qui nous ont apporte de precieuses informations sur son ontogenese chez l’enfant. Ce n’est que tres recemment que quatre etudes ont ete realisees chez des primates non humains et leurs resultats montrent que ces especes sont capables elles aussi de discriminer l’apparence de la realite. Ces resultats prometteurs sont un premier pas dans la recherche sur l’origine evolutive de la discrimination apparence-realite mais nos connaissances actuelles sur le sujet sont encore tres limitees. Il apparait donc aujourd’hui necessaire de multiplier les etudes, avec d’autres especes de primates non humains, afin d’apporter de nouveaux elements sur cette capacite et, plus generalement, sur l’evolution de la cognition des primates.

Volume None
Pages None
DOI 10.4000/primatologie.4056
Language English
Journal Revue de Primatologie

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