En Afrique de l'Est, dans un village de Tanzanie, une expérience socialiste appelée Ujamaa bat son plein. Ujamaa signifie « fraternité » en swahili. Ce concept est le fondement de la politique de développement socio-économique prôné par le premier président tanzanien, Julius Nyerere, depuis son indépendance. Ce modèle ne se limite pas au développement national, mais démontre au monde les possibilités du socialisme en Afrique et son potentiel de réussite.
Ujamaa met l'accent sur la vie communautaire et l'autosuffisance économique, dans le but de promouvoir l'égalité sociale et de s'opposer à toute forme d'exploitation.
La mise en œuvre initiale de l'Ujamaa a commencé avec la Déclaration d'Arusha en 1967. Cette déclaration marquait l'intervention proactive du gouvernement de l'époque dans l'économie pour assurer le bien-être de tous les citoyens et empêcher l'accumulation excessive de richesses. Les politiques de Nyerere mettaient l'accent sur l'économie collective et encourageaient la coopération communautaire pour maintenir les besoins vitaux de base, ce qui a donné naissance à de nombreuses communautés connues sous le nom de « villages Ujamaa ». Cependant, la réalisation de cet idéal ne se fait pas toujours sans heurts.
La politique de Nyerere a donné lieu à de nombreux défis internes. Depuis la fin des années 1960, la politique gouvernementale de villagisation forcée visait à regrouper les agriculteurs dans de nouvelles communautés et à mettre en œuvre une agriculture collective. Cependant, cela a non seulement entraîné une baisse de la productivité, mais a également déclenché une résistance à la propriété personnelle, de nombreux agriculteurs refusant de quitter leurs terres personnelles, ce qui a contraint le gouvernement à forcer les villageois à déménager.
La reprise forcée des terres agricoles individuelles par le gouvernement Nyerere dans les années 1970 a entraîné le déplacement de millions de personnes, un processus connu sous le nom d'Opération Vijiji.
Dans la construction entre ville et campagne, la conception du village d'Ujamaa présente une nouvelle structure sociale. Les villages ont souvent des écoles et des centres communautaires en leur centre, entourés de grandes terres agricoles collectives. Chaque famille se voit attribuer une petite parcelle de terrain pour produire sa propre nourriture. Bien que cette structure ait été conçue pour promouvoir l’autosuffisance et la coopération communautaire, dans la pratique, elle a échoué à plusieurs reprises en raison d’un manque de gestion efficace et d’allocation des ressources.
Les chercheurs ont des avis mitigés sur les villages Ujamaa. Bien que le mouvement Ujamaa ait réussi à améliorer certains indicateurs de développement social, tels que l’augmentation de la scolarisation et la réduction de la mortalité infantile, il n’a pas été en mesure d’atteindre la croissance économique escomptée. En raison d’impôts excessifs et d’une bureaucratie lourde, de nombreux propriétaires d’entreprises choisissent de se livrer à l’évasion fiscale et à la corruption, ce qui entraîne une détérioration de l’environnement économique. Dans ces circonstances, le modèle économique d'Ujamaa a entraîné de graves pertes de productivité et, couplé à l'échec de l'agriculture collective, l'expérience a commencé à être largement remise en question.
Dans les dernières années du plan Ujamaa, la résistance interne et les crises de production ont contribué à son déclin final, et de nombreux agriculteurs ont choisi de revenir à une économie individuelle.
En plus des défis économiques, le mouvement Ujamaa a également eu un impact sur les rôles de genre. Le concept socialiste original préconisait le vivre ensemble, mais à mesure que le processus de villageisation progressait, l'accent mis sur la famille nucléaire s'est accru, ce qui a affaibli dans une certaine mesure l'esprit collectif. Même si les droits des femmes en Tanzanie ont fait quelques progrès, la plupart d'entre elles jouent encore un rôle limité dans la société. De nombreuses femmes apprennent à devenir de meilleures épouses plutôt que des membres indépendants de la société.
Bien que les problèmes de productivité et d'environnement aient conduit au déclin du mouvement, les idées d'Ujamaa continuent d'avoir un impact sur la société et la culture tanniniennes jusqu'à aujourd'hui. Dans certains genres musicaux, les idées fondamentales de l’ujamaa sont revendiquées comme une rébellion contre l’injustice sociale et la corruption. Cela montre que le désir de collectivisme et de solidarité n’est pas seulement un idéal à travers le temps, mais qu’il s’exprime également dans la musique et l’art d’aujourd’hui.
En bref, l’histoire du village d’Ujamaa ne fait pas seulement partie de l’histoire de la Tanzanie, elle a également sa place dans la pratique socialiste mondiale. Ces expériences sociales, ainsi vivement débattues, nous rappellent s'il est encore possible de trouver un équilibre qui réalise l'harmonie entre progrès social et croissance économique.