Evelyne Ledoux-Beaugrand

L’œuvre du fantasme infanticide et matricide dans l’évolution d’une prise de parole au féminin

Au Québec, comme ailleurs, la mère semble avoir été un enjeu important pour la pensée féministe. S’il fallait dans les années 60 et 70 tenter de déconstruire l’idée qu’une femme était une mère, la maternité n’a pu être épargnée dans la lutte que les femmes ont menée et c’est souvent à travers des fantasmes de matricide et d’infanticide, que l’on retrouve très présents dans la production culturelle que se manifeste la haine de la maternité vécue par celles qui veulent se réapproprier leur corps et détrôner la mère en elles. Or, il semble que depuis déjà plusieurs années, l’infanticide et le matricide ne peuvent plus faire partie d’un projet politique. À travers l’évolution de l’œuvre de la cinéaste Micheline Lanctôt, féministe de la première heure, il est possible de voir que la pensée du meurtre des enfants par les mères, la famille, la société s’est considérablement transformée. Ce changement a peut-être permis a une nouvelle génération d’artistes et d’écrivaines de repenser la place de la maternité dans des termes différents. En réponse à un féminisme hanté par la mère toute-puissante et proche de la pulsion de mort, des jeunes auteures contemporaines dites postféministes ou méta-féministes mettent quant à elles en scène une pulsion matricide qui s’adresse à une mère déchue et pourtant très forte et montrent dans leur désir autodestructeur un geste infanticide. C’est cette articulation de l’infanticide et du matricide que nous tenterons de cerner rapidement ici en opposant deux générations d’artistes.